Le conflit du Sahara, vers un nouveau capital de légitimité juridique fondé sur l’équité
Rachid El Houdaigui Pr. de droit international public, Faculté de droit, Tanger Senior fellow OCP Policy Center
Le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations-Unies (ONU), qui s’est réuni le 27 avril 2018, a chargé l’Envoyé personnel du Secrétaire Général pour le Sahara, Horst Köhler, de poursuivre les discussions pour une relance des négociations entre les parties.
L’enjeu est d’arriver, dans un délai de six mois, à un consensus permettant aux négociations de prendre forme. Or peut-on faire du neuf avec du vieux ? Autrement dit, le cadre juridique courant, basé sur la logique du « the winner takes all » est inadapté aux réalités multiples du différend saharien. Des éléments extra-juridiques (géopolitiques, sécuritaires et anthropologiques) interfèrent, si bien qu’ils doivent être pris comme point central dans tout processus de résolution de ce conflit, au même titre que la règle juridique internationale.
Dans ce contexte, l’explication du principe de l’autodétermination externe, quand bien même universel, ne doit pas se limiter à l’interprétation des sources formelles juridiques, mais elle doit tout particulièrement considérer les spécificités du Sahara et l’évolution de la situation pour expliquer son sens et son utilisation.
De ce fait, les critères fixés pour l’organisation du référendum sont incompatibles avec la réalité anthropologique de la population nomade sahraouie. Et même en cas de tenue du référendum rien n’indique que son issue pourrait pacifier la région. Il y aura toujours un perdant qui contestera les résultats et la légitimité du vainqueur. La logique du « the winner takes all » n’est donc pas appropriée.
La solution juridique est naturelle, car elle est légitime. Mais, la redéfinition de l’approche juridique du conflit en dehors des démarches classiques normatives et formalistes du droit international est inéluctable. Elle est nécessaire pour faire avancer le processus de résolution du conflit à partir d’une approche inclusive liant étroitement les exigences du droit international aux nécessités fonctionnelles d’ordre politique, sociale et géopolitique.
Dans ce sens, l’élément fondamental de la solution négociée pour une autonomie élargie au Sahara est qu’elle ne fait pas abstraction du droit international mais elle le renforce, parce qu’elle est fondée sur le principe juridique de l’équité, un principe supplétif du droit international.
L’autonomie, comme expression d’une autodétermination équitable, peut à ce titre constituer le cadre politique pour entériner le mode pacifique de règlement du conflit du Sahara. Le scénario inverse est également probable, au cas où le Polisario et l’Algérie refuseraient toute concession. Dès lors, nul ne pourra prédire exactement la voie qui sera adoptée par les protagonistes, ni quelles répercussions cela aura sur l’ensemble de la région. Les raidissements des positions politiques aboutissent à des situations géopolitiques déraisonnables, comme celle de la fermeture des frontières terrestres entre l’Algérie et le Maroc. La course à l’armement, à laquelle se livrent les deux pays, devrait normalement interpeller et mobiliser toutes les bonnes volontés dans le sens d’un rapprochement maroco-algérien, seul en mesure de débloquer la situation afin d’arriver à une solution négociée, juste et équitable, garante de la dignité des composantes sahraouies et de l’intégrité territoriale du Maroc