Le Conseil de l’Europe s’interroge sur la validité du mécanisme français d’adoption des lois sans vote
Le Conseil de l’Europe (CdE) s’est interrogé sur la validité de l’article 49.3 de la Constitution française, qui permet de faire adopter une loi sans vote au Parlement et a été récemment utilisé pour la réforme des retraites.
« La question se pose de savoir si l’utilisation de l’article 49.3, dans la mesure où il permet l’adoption d’une loi sans l’approbation finale du Parlement et, dans certains cas, sans une discussion réelle et approfondie de son contenu, viole les principes du pluralisme, de la séparation des pouvoirs et de la souveraineté du législateur« , a souligné le Conseil de l’Europe dans un « avis intérimaire » publié mercredi.
La crédibilité démocratique des pouvoirs de couperet est depuis longtemps remise en question, fait remarquer le document adopté lors de la 135è session plénière de la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l’Europe composé d’experts indépendants en droit constitutionnel, en soulignant la nécessité de “préserver l’équilibre des pouvoirs entre le Parlement et l’exécutif« .
Pour la Commission de Venise, qui a rédigé l’avis, l’article 49.3 de la Constitution française « renverse la charge de l’initiative » du rejet d’un texte, « d’une manière apparemment inégalée par rapport aux autres pays européens« , en ce sens qu’il ne prévoit pas la possibilité pour le Premier ministre de demander la confiance de l’Assemblée nationale afin d’inciter à l’approbation de la loi.
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« Au contraire, il renverse la charge de l’initiative en prévoyant que les membres de l’Assemblée nationale doivent présenter une motion de censure, et que cette motion doit être approuvée à la majorité absolue dans les 48 heures, afin de rejeter le projet de loi”, fait remarquer la commission.
« Si la motion est votée, le gouvernement tombe. Si aucune motion n’est présentée ou si elle n’atteint pas la majorité absolue, le projet de loi est considéré comme approuvé sans le vote de l’Assemblée nationale« , fait remarquer le document.
La commission a également annoncé qu’elle procèdera à une « analyse comparative » des dispositifs qui permettent aux gouvernements « d’intervenir dans les pouvoirs législatifs des parlements » des autres pays européens, avant de publier ses conclusions définitives.
Le gouvernement d’Elisabeth Borne a eu recours à 11 reprises à ce dispositif, depuis sa formation en mai 2022, notamment en mars pour faire adopter la très contestée retraite à l’âge de 64 ans.
Avec MAP