Le coronavirus et la mondialisation libérale
Née en Chine comme la plupart des pandémies qui ont ravagé le monde, depuis la fameuse grippe de 1918, injustement appelée «grippe espagnole» parce que les Espagnols ont été les premiers à en signaler le danger, en passant par le SRAS ou le H1N1, la propagation du coronavirus Covid-19 met surtout en relief tous les effets pervers de la mondialisation.
Au vu des crises sociales qui ravagent une partie du monde (notamment le vieux monde de l’Europe et des pourtours méditerranéens), on savait que, contrairement à ce que prétendent les niais, la mondialisation n’est pas «heureuse». On savait aussi que les délocalisations entreprises par des sociétés (des fabricants de chaussettes aux fabricants d’aspirateurs ou d’ordinateurs), qui n’ont que le profit pour idéologie et ont cherché par tous les moyens à faire fabriquer au plus bas prix, ont précipité le chômage et la misère des classes moyennes, en particulier dans les pays industrialisés.
Le profit contre l’ordre social
On découvre maintenant que la mondialisation, voulue par la finance anonyme et vagabonde, présente de graves risques pour la santé mondiale, notamment du fait que la Chine, système totalitaire communiste, a imposé des règles du jeu inacceptables (absence de normes, culture sanitaire déficiente, faible degré de pureté des médicaments, transfert de technologies criminelles, etc.). En même temps, on a appris, avec effroi, que près de 85% des médicaments sont fabriqués…en Chine! Ce qui démontre l’irresponsabilité des thuriféraires de Pékin, à commencer par un ancien premier ministre français qui devrait être jugé pour haute trahison.
85% des médicaments sont fabriqués…en Chine!
En tout cas, on ne peut que se réjouir que des dirigeants découvrent aussi que des pans entiers des secteurs stratégiques occidentaux, notamment en France, sont tributaires de la Chine, au point que même le ministre des Finances, Bruno Le Maire, a déclaré, le 25 février 2020, que l’épisode du coronavirus devrait inciter la France à produire davantage de biens stratégiques à l’intérieur de ses propres frontières. Pourtant ce n’est qu’à la fin d’un trop long discours, le 12 mars 2020, dans lequel il a dit tout et son contraire, qu’Emmanuel Macron a abordé le fond du problème, posant les principes de la stratégie de l’après-coronavirus: «Il nous faudra, demain, tirer les leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde, depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour, interroger les faiblesses de nos démocraties. » Et voici le président le plus libéral et mondialiste de la Vè république affirmer : «Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, notre État-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe… Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché… Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie au fond, à d’autres, est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle…» C’est un singulier hommage que rend le vice à la vertu, puisque Macron semble redécouvrir les bienfaits de l’État-providence et de la souveraineté nationale. Faut-il que la crise soit profonde pour conduire un chantre patenté du libéralisme-mondialiste à revenir aux grands fondamentaux que défendent Trump, Poutine, Boris Johnson, Victor Orban et bien d’autres ? Mais il y a loin du verbe à l’action, surtout quand il s’agit d’un homme qui continue, contre toute logique, à célébrer non pas la nécessaire souveraineté nationale mais la prétendue souveraineté d’une Europe qui n’existe qua dans son imagination.
Vraiment il est temps de constater que la Chine est l’ennemi mondial et que la mondialisation libérale est un cancer qui nous ronge. A cet égard, on ne peut que souscrire à ce qu’écrit le député Éric Ciotti dans le Parisien du 26 février : «Nous découvrons avec stupeur que la Chine, devenue usine du monde, a relégué l’Europe et la France au rang de simples consommateurs. Frappés par une désindustrialisation suicidaire, nous sommes devenus dépendants de Pékin».
Bruno Le Maire, décidément sur le chemin de Damas, estime que le coronavirus va changer la donne dans la mondialisation en obligeant les économies «à relocaliser une partie de leurs productions et d’être plus indépendant sur un certain nombre de chaînes de production». Il était temps d’ouvrir les yeux pour constater que beaucoup de productions (industries de défense, produits médicaux, alimentation, produits de haute technologie…), doivent évidemment relever du stratégique et ne peuvent pas être délocalisées.
Voici enfin dévoilés les méfaits de la mondialisation qui n’est rien d’autre que l’ultra-libéralisme. C’est dire la société de profit et la loi du libre renard dans le libre poulailler, qui a conduit à une fragilité extrême, et cette dépendance encouragées par une foi aveugle dans la mondialisation et des logiques économiques, à court terme des délocalisations en plus d’une désindustrialisation massive, sans compter la grande misère des hôpitaux sacrifiés au dogme de la rentabilité la plus méprisable.
L’État protecteur
Il est donc temps de retrouver le rôle indispensable de l’État-nation, tant décrié à la fois par les libéraux et les libertaires gauchistes depuis mai 1968. C’est naturellement vers l’État que se tournent les peuples en quête de protection. Vers l’État et non vers les GAFA, Alibaba ou de misérables succédanés comme l’union européenne. Vers l’État pour forcer les entreprises à trouver des solutions de production locale. Vers l’État pour rétablir les frontières protectrices. Vers l’État pour privilégier l’impératif de sécurité sur le profit. Oui, l’épidémie du coronavirus remet les États au centre du jeu alors que les chantres de la mondialisation nous avaient annoncé leur disparition.
Pendant des siècles, nos sociétés ont vécu, suivant le noble principe d’Aristote, que l’économie est au service de la société et l’argent doit s’adapter au besoin social. Le catholicisme comme l’Islam ne disent pas autre chose. La mondialisation a renversé ce paradigme en imposant la seule loi du profit. Seul l’État nation peut mettre un terme à cette funeste dérive. Mais encore faudrait-il avoir des dirigeants nationaux à la hauteur. L’exemple du Maroc prouve que là où existe un pouvoir légitime, sûr de lui et fort, on peut faire face à la crise d’une manière satisfaisante. Le moment venu, il sera intéressant de comparer comment le défi du Covid-19 a été géré par divers pays du Nord et du Sud…