Le désaccord énergétique entre Moscou et Minsk menace »l’Etat de l’union » et fragilise l’équilibre géopolitique de la région
La question énergétique a été au centre des divergences, ces derniers mois, entre la Russie et la Biélorussie au point de fragiliser l’accord sur »l’Etat de l’Union » scellé entre les deux pays et de menacer l’équilibre géopolitique de la région.
La Russie a arrêté, début janvier dernier, la livraison de pétrole à la Biélorussie à l’issue de l’expiration du contrat régissant les prix et les volumes de pétrole livrés par Moscou avant la conclusion d’un nouveau contrat dont les termes ne sont pas connus et qui prévoit la fourniture de livraisons partielles de pétrole.
Minsk, qui recevait annuellement 24 millions de tonnes de pétrole russe pour le raffiner et le livrer aux pays européens et dont 6 millions de tonnes étaient destinées à sa consommation interne à des prix préférentiels semblables au marché interne russe, a récemment protesté contre la manœuvre fiscale lancée par Moscou, qui a modifié ces prix, poussant le président Biélorusse, Alexander Loukachenko, à menacer en novembre dernier la Russie de perdre son « seul allié » du côté occidental.
La Biélorussie, qui a réclamé une compensation financière pour cette manœuvre fiscale, se trouve face à des négociations infructueuses pour un nouvel accord avec la Russie, la poussant à entamer depuis le début de l’année la réflexion afin de réduire sa dépendance du pétrole russe et rechercher des alternatives.
Ces divergences entre les alliés russe et biélorusse se poursuivent, impactant l’accord sur l’Etat de l’Union signé entre Moscou et Minsk et fragilisant en particulier l’intégration entre les pays de l’Union économique eurasiatique, dernière influence russe dans l’ancien espace post-soviétique.
Cette situation s’était aggravée à la mi 2019, lorsque les autorités biélorusses avaient découvert un problème dans la qualité du pétrole qu’ils recevaient de la Russie via l’oléoduc de « Droujba », provoquant l’arrêt du transit du pétrole raffiné vers l’Ukraine et la Pologne et vers d’autres pays européens (République tchèque, Slovaquie, Hongrie et Allemagne).
D’intenses rounds de négociations avaient suivi entre Moscou et les pays ayant reçu ce pétrole contaminé, portant notamment sur les mesures pour retourner les 3 millions de tonnes de pétrole en Russie, nettoyer l’oléoduc et payer une compensation financière pour l’arrêt de transit via l’oléoduc.
Toutes ces questions ont été longtemps sur la table des négociations au sommet des deux pays voisins, ce qui a retardé les chances d’atteindre un consensus sur un nouvel accord qui tienne compte des doléances de Minsk, poussant le chef de l’Etat biélorusse à affirmer que son pays cherche à obtenir 30 à 40 pc de pétrole russe, 30 pc de la région Baltique et 30 pc d’Ukraine, et ce « quelles que soient les pertes matérielles qu’il pourrait subir en coopérant avec d’autres partenaires ».
A cet égard, le président biélorusse a demandé au gouvernement de proposer d’autres fournisseurs d’énergie et des canaux fiables pour leur fournir du pétrole, précisant que « toutes les raffineries de pétrole doivent fonctionner et nous devons fournir des produits pétroliers non seulement au marché local, comme c’est le cas actuellement, mais également aux marchés étrangers conformément aux engagements du pays ».
Il a, dans ce sens, souligné que dans le cadre de l’accord conclu avec Moscou en début de l’année pour la livraison de pétrole à Minsk, la Russie n’a rempli en janvier que le quart de ses obligations, en fournissant 500.000 tonnes de pétrole seulement contre 2 millions de tonnes prévues par l’accord, affirmant qu’à cause de ces manœuvres, la Biélorussie est trop souvent contrainte d’ajuster ses plans de développement économique.
Dans ce contexte, la Russie et la Biélorussie se trouvent dans l’obligation d’atteindre un consensus qui puisse permettre un réchauffement des relations historiques entre les deux pays, au risque de bouleverser l’équilibre géopolitique de la région.