Le nouveau Brésil de Bolsonaro , réaliste, pragmatique et plus proche du Maroc
Par Hassan Alaoui
Dans le cadre de l’investiture du nouveau président du Brésil, sur instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le chef du gouvernement Saad Eddine El Othmani, accompagné par l’Ambassadeur du Maroc Mohamed Nabil Adghoughi, a représenté le Souverain aux festivités qui ont marqué l’installation de Jair Bolsonaro à la tête du pays.
Cette présence du Maroc a été significative, et surtout saluée par le président brésilien et son gouvernement. Le Brésil et le Maroc cultivent depuis plus de 60 ans des relations d’amitié et de coopération, illustrées par l’existence entre autres d’une ligne aérienne régulière et – paradoxalement – d’un océan, l’Atlantique qui est plus un facteur de rapprochement et un pont franchi en moins de 8 heures. Le Brésil abrite une des plus importantes communautés de Juifs marocains des Amériques, attachée à ses traditions marocaines.
S’il est dit ici et là que le nouveau président du Brésil conférera à son pouvoir une dimension inédite, si les uns et les autres s’offusquent de ses propos militaristes et « musclés » en décalage avec ceux des sophistes , il n’est pas dit en revanche qu’il cédera aux facéties – à cette corruption d’argent et de morale – dont ses prédécesseurs ont usé jusqu’à la corde. Nationaliste jusqu’aux bouts des ongles, Jair Bolsonaro, nouveau Président du Brésil enterre une époque de confusion qui est au pays ce que des décennies d’anarchie et de gabegie fut autrefois aux empires en perte de vitesse ou de fin de règne .
Dans son discours d’investiture, prononcé le mardi 1er janvier, devant une foule impressionnante et suivi partout dans le monde, il a déclaré que l’un des tout premiers objectifs est de « libérer son pays du joug de la corruption, de la criminalité, de l’irresponsabilité économique et du carcan idéologique ». Ses paroles étaient scandées par une ferveur à couper le souffle et des cris de joie d’un peuple qui a décidé de le baptiser « Mito », le mythe.
Quatre mots-clés qui résument en effet, entre autres, la pensée du nouveau président sur fond d’une autre conviction, lancée du haut de la tribune du Palais de Planalto de Brasilia et du Congrès : « Aujourd’hui est le jour où le peuple commence à se libérer du socialisme et du politiquement correct ». Il a pour ainsi dire porté le coup de dague à ceux qui l’ont précédé dans cet exercice périlleux de gouverner un pays – le plus grand de toute l’Amérique du sud – et un peuple de 200 millions d’habitants, dont 55% lui ont accordé leur voix.
On aura beau gloser sur ses idées politiques, ses mépris affichés pour la théorie des genres, le socialisme, la gauche et la tolérance envers les criminels, expiés par Lula et autres du Parti du travail. A vrai dire Bolsonaro n’a jamais affirmé, en tout cas ouvertement, son appartenance au fascisme, manière Mussolini ou Hitler, comme certains ont été tentés de l’écrire. Ce serait en effet se méprendre que de lui coller impunément de tels attributs. C’est un patriote qui porte le projet de réformer son pays, en le libérant du joug de la profonde corruption sur laquelle il a fondé sa campagne électorale.
Les scandales financiers de Petrobras et autres retentissent toujours dans les oreilles des Brésiliens pour ne pas les interpeller encore sur cette affaire qui a brisé le mythe de la gauche et détruit sa réputation. L’image est encore frappante de l’arrestation de l’ancien président socialiste Luiz Inacio Lula da Silva, sa condamnation à 12 ans de prison ferme avec 8 nouveaux procès qui l’attendent , l’empeachment appliqué en 2017 à sa successeure Dilma Roussef et la mise à l’écart de Fernando Henrique Cardoso, improbable successeur de cette dernière, ont dévoilé les soubassements de l’une des plus importantes affaires de corruption du pays. Lula et sa protégée Dilma Roussef appartenaient tous deux au Parti des travailleurs ( PT) et incarnaient l’espoir de plusieurs générations de jeunes.
Le président Bolsonaro, quant à lui se prévaudra de n’avoir pas les « mains sales », et de fait, il ne lui est nullement reproché d’avoir commis quoi que ce soit, hormis ses idées que l’exercice du pouvoir et la responsabilité étatique corrigeront à coup sûr. S’il affirme abhorrer un « pouvoir gouverné par le bas », et rompre avec ses prédécesseurs de gauche en la matière , il use en revanche d’un franc-parler qui lui est propre. De la même manière, si certains lui collent à la peau l’étiquette de misogyne, il aura été le premier président du Brésil à accorder à une femme , son épouse la possibilité de prononcer quasiment en même temps que lui, lors son investiture, un discours au peuple en usant du langage des signes destiné aux sourds…
Jair Bolsonaro mène tambour battant une campagne contre la corruption et le « politiquement correct », c’est-à-dire le népotisme et le favoritisme tout simplement. Il accède au pouvoir dans un pays, bigarrée et complexe, mais un grand pays gangréné par les scandales et la criminalité : 178 meurtres violents par jour ; soit 65.000 par an dont seulement 4% sont éclaircis, ce qui fait dire au nouveau président que « c’est inadmissible ! ».
Il affirme sa ferme volonté de « rétablir l’ordre », de moraliser la vie publique dans le sillage de cette opération spectaculaire lancée en 2014, appelée « Lava Jato », vaste enquête de la justice fédérale dirigée alors par le juge Sergio Moro que Bolsonaro vient de nommer ministre de la Justice. « Lava Jato » a mis en cause la classe politique brésilienne, sans toutefois toucher Bolsonaro. Il se prévaudra à juste titre de cette probité et en fait un critère absolu. Peu importe pour lui les raccourcis dont une catégorie de ses adversaires use et abuse, qui le taxe « d’homophobe », le réduit à cette image caricaturale de « partisan de l’extrême-droite »… Il veut des hommes « compétents et attachés à leur pays ». Patriote invétéré, il veut hisser le Brésil dans le cap des 5 premières puissances mondiales et le réformer profondément tous azimuts.
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