Le secteur des taxis: un casse-tête pour les autorités et les usagers

Le secteur des taxis au Maroc, emblématique de la mobilité urbaine, est devenu un véritable casse-tête pour les autorités, les usagers, et les professionnels eux-mêmes. Malgré les annonces répétées du gouvernement, notamment du ministère de l’Intérieur, les réformes concrètes tardent à voir le jour, laissant un secteur vétuste et désorganisé face à des enjeux de modernisation et d’efficacité.

Sous la houlette du ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, des instructions ont été données aux gouverneurs et walis pour renforcer l’application des règles en vigueur. Cependant, cette approche répressive, centrée sur le contrôle des infractions existantes, semble ignorer la nécessité d’une refonte en profondeur.

Les problématiques qui gangrènent le secteur sont bien connues : refus de clients par les chauffeurs, non-respect des tarifs officiels, absence généralisée de taximètres, et un parc automobile souvent en mauvais état. Ces défaillances, bien que récurrentes, restent non résolues, accentuant le sentiment d’immobilisme à l’approche d’échéances majeures telles que la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et la Coupe du Monde 2030, dont le Maroc sera co-organisateur avec l’Espagne et le Portugal.

Parallèlement, le Maroc persiste dans son interdiction des plateformes numériques de transport comme Uber ou Bolt. Alors que ces applications modernisent le secteur dans de nombreux pays, offrant des solutions abordables et efficaces, leur absence au Maroc témoigne d’un manque de vision stratégique. Cette position conservatrice pénalise non seulement les usagers, mais limite aussi la compétitivité d’un secteur confronté à des défis croissants.

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La modernisation des taxis marocains nécessiterait une synergie entre services traditionnels et innovations technologiques. Or, au lieu d’explorer cette complémentarité, les autorités maintiennent un statu quo qui bride le potentiel du secteur, notamment dans un contexte où le Maroc cherche à attirer un public international.

Les récentes annonces, telles que l’imposition de taximètres fonctionnels, la standardisation des tarifs et une meilleure formation des chauffeurs, bien qu’utiles, ne suffisent pas à répondre aux attentes des usagers. Ces initiatives, sans être accompagnées d’une vision globale, risquent de rester symboliques.

Les défaillances du secteur ont même attiré l’attention internationale. La FIFA, dans son évaluation des infrastructures de Tanger en vue de la Coupe du Monde 2030, a attribué une note médiocre à la ville pour ses capacités de transport, un maigre 2,6 sur 5. Cette notation met en lumière l’urgence pour Tanger – et d’autres grandes villes marocaines – de réorganiser leur mobilité pour répondre aux standards mondiaux.

Des réformes structurelles indispensables

Pour un secteur des taxis performant, le Maroc pourrait s’inspirer d’autres pays où taxis traditionnels et technologies coexistent harmonieusement. Des plateformes comme celles adoptées en Égypte ou au Kenya intègrent des applications mobiles pour dynamiser les services. Ces outils permettent une meilleure transparence des tarifs, des évaluations en temps réel, et un accès élargi, notamment dans les zones urbaines mal desservies.

En outre, le renouvellement des véhicules par des modèles plus écologiques et la mise en place d’un cadre législatif adapté à la numérisation pourraient transformer le secteur. Une telle modernisation ne bénéficierait pas uniquement aux usagers, mais améliorerait également les conditions de travail des chauffeurs. Ces derniers, souvent piégés par des redevances élevées aux détenteurs de licences (souvent surnommées grima), voient leur marge de manœuvre économique se réduire, ce qui contribue à la détérioration générale du service.

Dans un Maroc en pleine mutation économique et sociale, l’état du secteur des taxis reflète une inadéquation préoccupante entre les besoins croissants de mobilité et la capacité à y répondre efficacement. Alors que le pays ambitionne de s’ériger en modèle régional, notamment à travers l’organisation de compétitions internationales de grande envergure, un retard dans la modernisation des infrastructures de transport risque d’éclipser ses progrès dans d’autres domaines.

Seules des réformes structurelles, couplées à une ouverture à l’innovation, permettront au Maroc de transformer ce casse-tête en opportunité. Le secteur des taxis, s’il est repensé, pourrait devenir un pilier de la mobilité urbaine moderne, à la hauteur des ambitions du pays sur la scène internationale.

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