Le Soudan toujours dans l’attente d’un nouveau gouvernement post-Béchir
Le Soudan reste jeudi dans l’attente de l’annonce de son premier gouvernement depuis la chute d’Omar el-Béchir, les discussions se poursuivant autour du choix des ministres qui devront gérer les multiples maux du pays durant sa transition vers un pouvoir civil.
Le Premier ministre soudanais Abdallah Hamdok devait annoncer mercredi les noms des principaux ministres, mais une source proche de cet économiste a indiqué jeudi qu’il n’avait pas encore arrêté son choix.
« Les délibérations continuent et il n’est pas clair quand elles s’achèveront », a indiqué cette source à l’AFP.
Investi le 21 août, M. Hamdok doit choisir les membres de son cabinet parmi les noms proposés par les Forces pour la liberté et le changement (FLC), fer de lance du mouvement de contestation, selon les termes d’un accord historique conclu le 17 août.
Seuls les postes de ministres de l’Intérieur et de la Défense seront nommés par les militaires siégeant au sein du Conseil souverain, une instance à majorité civile mais dirigée par un militaire, qui doit mener pendant un peu plus de trois ans la transition vers un pouvoir civil.
Samedi, M. Hamdok a promis que son gouvernement de 20 membres serait composé de technocrates choisis en fonction de leurs « compétences » et qu’il constituerait « une équipe homogène à la hauteur des défis ».
Agé de 63 ans, Abdallah Hamdok, ancien collaborateur de l’ONU, a aussi affirmé qu’il s’attacherait à « une représentation juste des femmes » au sein du gouvernement.
Une fois nommé, son cabinet doit se réunir le 1er septembre avec le Conseil souverain, selon les termes de l’accord.
Cette date sera peut-être reportée, si l’annonce d’un nouveau cabinet est à nouveau repoussée.
L’un des premiers défis du gouvernement sera de relever l’économie du pays, qui s’est écroulée après la sécession du Sud en 2011, le Soudan ayant été privé des trois quarts de ses réserves de pétrole.
Deux décennies de sanctions américaines pour violations des droits humains, levées en 2017, ont aggravé la situation et le pays fait face à une inflation galopante, des pénuries chroniques de biens de première nécessité et un manque criant en devises étrangères.
La détresse économique des Soudanais a été la cause principale du déclenchement des manifestations en décembre 2018, après la décision du gouvernement de tripler le prix du pain.
Les manifestations s’étaient transformées rapidement en contestation de M. Béchir, au pouvoir depuis 1989. Durant les près de huit mois de manifestations, plus de 250 personnes ont péri dans la répression, selon un comité de médecins proche de la contestation.
Le futur gouvernement devra aussi composer avec un autre défi de taille: la conclusion d’accords de paix dans les six mois avec les groupes rebelles dans les régions du pays en conflit, notamment ceux qui ont rejeté l’accord du 17 août.
Plusieurs de ces groupes, situés dans des Etats marginalisés –comme le Darfour, le Nil Bleu et le Kordofan-sud– ont combattu les forces de M. Béchir pendant des années.
Le nouveau Premier ministre a promis « d’arrêter la guerre et de construire une paix durable ».
Des centaines de milliers de personnes ont été tuées dans les conflits au Darfour, au Nil Bleu et au Kordofan-sud, et des millions ont été déplacées.
Le report de l’annonce du cabinet de M. Hamdok a suscité jeudi un début d’inquiétude parmi les Soudanais.
« Ce n’est pas une bonne chose (…). Le pays a été sans gouvernement depuis près de cinq mois maintenant », a estimé à l’AFP Hassan Abdelmeguid, un fonctionnaire de 48 ans.
« Le Soudan est confronté à de grands défis et a besoin qu’un gouvernement se forme au plus vite », a-t-il ajouté.
D’autres, comme Sanya Mohamed, ont tenté de relativiser.
« Si cela permet de trouver des personnes compétentes pour ces postes (de ministres), alors ça va », a estimé cette fonctionnaire de 32 ans.
« Mais si (le retard) est causé par des désaccords concernant les candidats, alors c’est inquiétant », a-t-elle jugé. « Le pays ne le supportera pas ».
Le mois dernier, le début du processus de transition avait connu un premier retard, sans conséquence, de 48 heures, au moment de la formation du Conseil souverain.
Avec AFP