L’Elysée et les changements de saison au Maghreb
Par Hassan Alaoui
« Les faux amis sont des oiseaux de passage qui viennent à la belle saison, et s’en vont à la mauvaise », dit un proverbe français populaire, qui reflète subtilement, la perception actuelle qu’ont de plus en plus de marocains, à la vue du pathétique et périlleux numéro d’équilibriste, auquel se prête, non sans mesquinerie, l’Elysée, dans la gestion de ses relations avec Rabat et Alger.
L’occasion de ces propos, c’est la récente publication d’une chronique centrée sur les relations maroco-algeriennes, par le journaliste Benoit Delmas, de l’hebdomadaire « le Point », celui là même qui, à l’époque où il était correspondant de ce magazine en Tunisie, ne croyait pas si bien dire en 2018, lorsqu’il affirmait que la légère brise démocratique qui a soufflé de manière éphémère sur ce pays, « n’était pas une exception, mais une hérésie au sein du monde arabe ».
Sauf qu’en cherchant à scruter, dans son dernier article ,les perspectives des relations maroco-algeriennes, Benoit Delmas semble s’être étrangement délesté de sa capacité d’analyse habituelle, pour succomber benoîtement à ce tropisme algérianophile, que la macronie tient désormais à promouvoir, à travers sa constellation de médias publics financés directement par le Quai d’Orsay, ou revendiquant une pseudo indépendance éditoriale, tout en demeurant dans les faits, étroitement satellisés autour de l’Etat profond français.
Il n’est donc pas surprenant de voir Benoit Delmas ressasser sur les colonnes du « Point », les passages marocophobes, de l’interview accordée par le président algérien, Abdelmajid Tebboune, au quotidien « Le Figaro », et qui selon certaines indiscrétions journalistiques, « a été préparée, relue et annotée par des conseillers diplomatiques français et fait l’objet de plusieurs échanges entre la DGSE et les services secrets algériens ».
Bien au contraire, il est plutôt logique de constater comment la chronique en question, cherche en filigrane, à faire endosser au Maroc, la responsabilité exclusive de cette haine viscérale et hystérique, qu’entretient avec perfidie la junte militaire algérienne à l’encontre du Maroc, depuis l’indépendance des deux pays voisins, tout en mettant en exergue le ton « docte » du Président Tebboune, lorsqu’il explique que « l’Algerie a décidé de rompre ses relations avec le Maroc, pour ne pas lui faire la guerre ».
Et puis en ces temps de crise publicitaire dont pâtit la presse française, c’est sans doute pour s’attirer les bonnes graces de la macronie, que le magazine « le Point » et son journaliste précité, sont même allés jusqu’à supputer sans fondement, que « l’ONU prône l’organisation d’un référendum d’autodétermination pour résoudre le conflit du Sahara ».
Une assertion qui intervient au moment où la France, qui a toujours exprimé son soutien à l’intégrité territoriale du Maroc, et figure parmi les premieres puissances occidentales ayant jugé « crédible et sérieux », le plan d’autonomie présenté par Rabat en avril 2007, s’entête à conserver une position ambiguë.
Pourtant les véritables alliés du Maroc, à l’image des Etats-Unis, l’Allemagne, l’Espagne, la Belgique et les Pays-Bas ont, soit reconnu expressément la souveraineté marocaine sur les provinces du Sud, soit admis que l’autonomie est la solution « la plus adéquate », pour solutionner de manière définitive la question du Sahara marocain, tout en excluant de facto, l’option référendaire, laquelle n’a plus jamais été mentionnée dans les vingt dernières résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU.
Tout le monde l’aura donc compris. Au delà de son jargon diplomatique, qui n’arrive plus à camoufler ses véritables intentions politico-mercantilistes, la France ne veut pas se résoudre à lâcher cet ultime levier de pression concernant le droit légitime du Maroc à parachever son intégrité territoriale.
A la différence de la realpolitik affichée par plusieurs capitales occidentales, qui ont clarifié leur position sur la marocanité du Sahara, Paris croit pouvoir continuer à profiter, en priorité, voire par complaisance, des nombreuses opportunités d’investissement et des marchés économiques qui s’offrent à Rabat, et aussi des contrats gaziers à Alger et ce, en jouant au jeu de balancier, sur fond de la rivalité géopolitique maroco-algérienne.
A ce jeu là, le Maroc, qui n’a jamais pratiqué de politique saisonnière ou de chantage avec ses partenaires internationaux, n’est pas dupe, et il restera jusqu’au bout, intransigeant sur la récupération de ses provinces du Sud et ce, au delà des manigances qui surgiront, dans le sillage de la romance naissante entre Macron et Tebboune.