Les dérives de l’Union européenne
Par Gabriel BANON
L’Union européenne est née du Traité de Rome et du Marché commun mis en place à la sortie de la deuxième guerre mondiale. L’idée directrice était : « la paix par la prospérité ».
Aujourd’hui, des traités successifs ont fait du rêve européen une grosse machine lointaine, sourde et dogmatique.
La Cour constitutionnelle fédérale allemande a déclaré que « les principes d’égalité entre les Etats et d’égalité entre les citoyens ne peuvent pas être conciliés dans le cadre institutionnel actuel de l’Union européenne ».
Certains observateurs trouvent que Bruxelles subvertit les Institutions européennes afin qu’elles s’attribuent, en sus de leurs objectifs économiques fondamentaux, des missions qui leur sont étrangères. Certes, nous devons à l’Europe la fin du recours à la guerre pour régler les différends entre Etats européens, des années de prospérité, la libre circulation des personnes, des capitaux, des services et des marchandises entre les Etats membres.
Mais le Pacte Vert pour l’Europe est un projet qui a pour ambition de faire de l’Europe le premier continent « neutre pour le climat » en réduisant à « zéro » les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2050. L’ennui est que les conséquences économiques insoutenables pour les Européens n’ont pas été prises en compte. Selon la Fédération des syndicats industriels européens, le risque loin d’être négligeable, est que le Pacte Vert pour l’Europe marginalise des secteurs industriels entiers, avec des millions d’emplois supprimés. Que va-t-on leur proposer comme avenir de rechange ?
L’UE traditionnellement faisait contrepoids à la fureur antiéconomique de certains de ses États membres, elle est aujourd’hui dans l’amplification permanente de cette fureur antiéconomique.
La version la plus extrême de la théorie du genre, l’idée que « masculin » et « féminin » sont des concepts culturels et non biologiques, est désormais la politique officielle de l’UE. Aucune résolution des Parlements allemands ou français sur le genre ou l’environnement ne peut rivaliser avec les positions radicales adoptées sur ces sujets, comme sur d’autres, par les Institutions de l’UE.
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Cette surenchère des Institutions européennes dans des thèmes idéologiques, n’est freinée par aucune perspective d’une sanction démocratique, du fait que l’Organisation est intergouvernementale. Le « Parlement européen » élu avec des capacités très limitées, ne change rien aux préoccupations intergouvernementales d’une telle Organisation.
Il ne faut pas s’étonner de constater qu’on est loin d’avoir développé chez les citoyens, le sentiment d’être Européens avant d’être Italiens, Espagnols, Suédois ou Polonais.
La tentation autoritaire, qui menace les fondements du projet européen, commence à inquiéter. L’avenir même de l’Union européenne, confrontée à une succession de chocs sans précédent, tant internes qu’externes, est en jeu. La crise financière et économique, et aujourd’hui la crise sanitaire, ont révélé les défauts de construction de la zone euro. L’absence de diplomatie commune et d’armée européenne, la méfiance persistante entre les polices de l’Union, le rejet de plus en plus grand des valeurs qui ont fondé l’Europe au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, démontrent le besoin, aujourd’hui, de repenser l’Europe.
Les solutions bricolées dans l’urgence n’ont fait qu’accroître la défiance d’une partie croissante des citoyens. Ils se posent de plus en plus la question : Quelle est la valeur ajoutée de l’Union ?
Vingt ans après la percée de l’extrême droite en Autriche, le populisme de droite radicale, et parfois de gauche radicale, est désormais soit au pouvoir, soit aux portes du pouvoir, un peu partout en Europe. Des partis de gouvernement se sont « populisés » pour se maintenir au pouvoir.
Les citoyens, déboussolés par cette série de chocs, sont tentés par des solutions nationalistes et autoritaires qui pourraient résoudre la complexe équation à laquelle ils sont confrontés. « On a tout essayé, alors allons voir chez ces extrêmes. »
Seule une réforme des Traités européens permettrait de sortir de cet enlisement rapide du projet européen. Mais elle ne peut, malheureusement, se faire qu’à l’unanimité, sauf à passer par la création d’une nouvelle Europe, à un traité à quelques-uns qui signerait l’échec des élargissements successifs. La France, sans qui rien ne peut se faire, ne semble pas en avoir la volonté. Elle reste traumatisée par l’échec de 2005, et est elle-même, rongée par le vote FN.
Pourtant, c’était un beau rêve !