Les prix du poulet risquent de faire l’ascenseur encore longtemps

Par Hicham LOURAOUI

Au moment où la pandémie du nouveau coronavirus (covid-19) continue de sévir dans le Royaume et partout à travers le monde, les Marocains ont été secoués la semaine dernière par une hausse spectaculaire des prix du poulet.

Une hausse qui serait, selon bon nombre d’opérateurs du secteur, « passagère » et devrait s’atténuer à l’avenir, sans toutefois écarter la possibilité d’une nouvelle envolée. Si cela se confirme, la nouvelle donne plongerait les prix dans une forte volatilité, alors que le secteur est confronté à une situation des plus incertaines, en raison des mesures de confinement imposé par la crise du covid-19.

« La hausse des prix du poulet intervient après de lourdes pertes que nous avons encaissées durant ces derniers mois », a avancé, dans une déclaration à la MAP, Said Chennaoui, éleveur de volailles dans la région de Casablanca-Settat.

Le confinement et l’arrêt de plusieurs activités économiques comme la restauration et l’événementiel ont causé une baisse de la demande du poulet d’environ 50%, alors que la production, elle, est restée à un niveau normal, a-t-il expliqué.

Par conséquent, le prix de volailles a brutalement chuté, ce qui a paralysé la production des éleveurs à défaut de ressources financières, a déploré M. Chennaoui.

L’offre a ainsi diminué suite à l’arrêt « forcé » de l’activité, engendrant une envolée des prix, a-t-il relevé, rassurant que l’on devrait retourner à normalité relative dans les jours à venir.

« Même avec ces prix, les éleveurs ne pourront pas compenser leurs pertes de ces derniers mois. D’ailleurs, il ne reste qu’une minorité d’éleveurs qui continuent à produire en ce moment, puisque le marché ne peut absorber actuellement que 50% de l’offre », a fait savoir M. Chennanoui.

Et d’ajouter: « Si l’on craint une deuxième vague du Covid-19, nous, en tant qu’éleveurs, nous redoutons une deuxième vague de pertes ».

Même son de cloche pour Miloud B., vendeur de viandes de volailles dans un marché de Casablanca, qui a regretté la situation que traverse le secteur depuis pratiquement plus de sept mois.

« Nous vivons une crise étouffante et inédite. Tout semble part en ruine et cela n’est pas prêt à s’arrêter avec l’incertitude qui entoure notre situation », a-t-il lancé lors d’une visite effectuée samedi par une équipe de la MAP.

Et de soutenir: « Durant une année normale, l’été constitue une haute saison pour nous, puisque les événements (mariages, fêtes, etc) se multiplient. En 2020, c’est quasiment le néant ».

Pour Miloud, les prix du poulet, dont la récente hausse était prévisible puisque les éleveurs ont vendu à perte pendant des mois, devraient diminuer graduellement dans les prochains jours. « Aujourd’hui, j’affiche un prix de 15,5 DH/Kg contre 17 dirhams il y a quelques jours », a-t-il précisé.

Mardi dernier, l’Association nationale des Producteurs de viandes de Volailles (APV) a réagi à la flambée des prix du poulet au Maroc qui est « due à un repli significatif de l’offre comparativement à la demande dans le sillage de la crise sanitaire liée au covid-19 ».

L’association a attribué cette baisse de l’offre volailles à la chute de la production dictée par l’arrêt forcé de nombreux éleveurs sur fond de lourdes pertes encaissées par ces derniers durant les six mois écoulés.

Si les consommateurs et l’opinion publique ont été surpris par cette hausse des prix, qui ont atteint 20 DH/KG pour le poulet vif et plus de 30 DH/KG pour le poulet prêt, l’APV a indiqué avoir alerté à maintes reprises sur les répercussions de l’épuisement de la trésorerie des éleveurs portant atteinte à leur pérennité et engendrant d’éventuelles hausses des prix.

En revanche, l’association ne considère pas cette hausse comme étant le bout du tunnel, d’autant plus qu’elle constitue à peine une embellie temporaire qui ne compensera en rien les grosses pertes enregistrées depuis le déclenchement de la crise sanitaire.

En effet, elle a constaté une forte augmentation de la demande sur les poussins d’un jour de la part des éleveurs, ce qui augure d’un retour de la production à des niveaux très élevés, engendrant une rechute des prix surtout si l’état d’urgence sanitaire est prolongé.

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