L’exécutif européen prend très au sérieux le problème du détournement de l’aide humanitaire destinée aux camps de Tindouf
La Commission européenne « prend très au sérieux le problème du détournement de l’aide humanitaire » destinée aux camps de Tindouf, en Algérie, a affirmé Christos Stylianides, commissaire européen chargé de l’aide humanitaire.
Répondant à une question parlementaire sur le «détournement systématique» de l’aide humanitaire européenne, organisé par le polisario et «certaines autorités algériennes», le commissaire européen a rappelé les conclusions du rapport de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) publié en 2015 qui fait état de graves détournements de l’aide humanitaire de l’UE à destination des camps de Tindouf en Algérie, notant que la Commission européenne a pris à cet effet des «mesures prudentielles et correctives énergiques».
La question des eurodéputés évoque également la taxation par l’Algérie de cette aide, rappelant que lors d’une audition du directeur chargé de l’aide humanitaire à la Commission européenne (DG ECHO) en juillet 2015, il mentionnait en effet que l’Algérie soumettait à une taxe de 5 % les 10 millions d’euros d’aide humanitaire européenne versés annuellement aux camps de Tindouf. D’après une estimation, l’UE aurait ainsi payé au cours des trente dernières années entre 10 et 15 millions d’euros de taxes à l’Algérie.
Le commissaire européen a rappelé que jusqu’au début de l’année 2016, les achats destinés à être distribués sous forme de dons aux populations des camps, effectués sur le territoire algérien, étaient encore soumis à la TVA locale, dont le taux varie en fonction des produits.
Il a précisé que depuis 2004 la Commission, avec L’Agence Espagnole de Développement (AECID), a régulièrement entrepris des démarches auprès des autorités algériennes au sujet de la récupération de la TVA sur les achats locaux dans le cadre des projets humanitaires.
Entre 2010 et 2014, a-t-il rappelé, la Commission européenne a évalué le montant de la TVA payé sur les achats locaux de marchandises à destination des populations des camps de Tindouf à un million d’euros, soit une moyenne de 200.000 euros par an, équivalent à 2 % du montant annuel de l’aide fournie par l’Union européenne.
Cette situation a interpelé les eurodéputés qui ont demandé à la Commission européenne d’exiger des explications de l’Algérie sur ce détournement.
Ils ont également interrogé l’exécutif européen sur les mesures prises pour faire pression sur l’Algérie en vue d’un recensement des bénéficiaires de cette aide, sachant que la surestimation de ces populations a facilité ce détournement comme cela a été établi par l’OLAF.
Rappelant que les autres donateurs ont réduit leur contribution financière, le Commissaire européen a précisé qu’il n’appartient pas à l’Union européenne d’effectuer un recensement des bénéficiaires, relevant que cette question doit être examinée dans le cadre du processus conduit par les Nations unies.
La question du détournement de l’aide humanitaire européenne par le polisario est souvent évoquée au niveau du Parlement européen, soit à travers les questions des eurodéputés soit à l’occasion de l’examen devant la commission de contrôle budgétaire de la décharge relative à l’exécution des budgets.
Dans l’une des résolutions de décharge budgétaire, le Parlement avait demandé à la Commission européenne de veiller à ce que les responsables algériens et ceux du polisario incriminés par le rapport de l’OLAF «n’aient plus accès à l’aide financée par les contribuables européens».
Le Parlement européen avait également exprimé son inquiétude face à l’absence d’un recensement de la population des camps de Tindouf, soulignant qu’il s’agit là d’une «situation anormale et unique dans les annales du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies».