M. Lahlimi appelle à un « véritable plan Marshall » de la statistique pour l’Afrique Economie et finances
-Propos recueillis par : Nadia El Ahmar-
L’Afrique a besoin d’un « véritable plan Marshall » de la statistique pour qu’elle puisse décliner, à l’horizon 2030, des performances au niveau de son poids géostratégique et de la grandeur de sa civilisation, a affirmé le Haut Commissaire au plan, Ahmed Lahlimi Alami.
« Il doit y avoir un fonds pour financer un véritable plan Marshall pour la statistique offrant à l’Afrique les moyens humains et technologiques de conception et de réalisation de sa propre statistique pour garantir la souveraineté de ses modèles de développement par ses capacités endogènes », a souligné M. Lahlimi Alami dans un entretien accordé à la MAP dans le cadre du 61è Congrès international des statistiques.
Le Haut-commissaire au Plan a, dans un cadre lié, fait savoir que l’ensemble des pays africains sont confrontés à trois grandes échéances, en évoquant l’agenda 2063 élaboré par les pays de l’Union africaine qui va être décliné en plans décennaux et qui vise l’accès de l’Afrique à un modèle de développement plus endogène comme d’ailleurs l’avait préconisé SM le Roi Mohammed VI.
Le Haut-commissaire au plan a, de même, mis l’accent sur la deuxième échéance internationale relative à la réalisation des objectifs du développement durable à l’horizon 2030, précisant que le troisième pari revêt une dimension environnementale et consiste à faire face aux effets des changements climatiques.
« Toutes ces échéances et ces grands programmes nécessitent que l’Afrique puisse être en mesure de les réaliser. Il faudrait qu’il y ait un système qui mesure les réalités au départ, qui suit le développement des programmes et évalue leur effets en les comparant aux objectifs qui sont fixés, de manière à pousser les responsables de la décision politique à ajuster leurs politiques pour pouvoir atteindre les objectifs escomptés », a-t-il estimé.
M. Lahlimi a, toutefois, noté que les systèmes nationaux de statistiques ne disposent pas du niveau d’appropriation de tous les outils technologiques, conceptuels et méthodologiques pour l’élaboration d’indicateurs et pouvoir suivre et réaliser, dans les trois domaines du développement du capital physique, humain, institutionnel et environnemental, les objectifs qui sont à l’échéance et qu’ils auraient prévu.
« Le monde est préoccupé par les émissions des gaz à effets de serre et l’excès du carbone qui se dégage aujourd’hui et étouffe la terre. C’est une chose dont tout le monde est victime, mais pour les Africains, les effets des changements climatiques se manifestent dans leur vie quotidienne à travers l’envasement des barrages, la salinisation et la stérilisation du sol et l’absence d’assainissement », a-t-il martelé.
Il a de même fait remarquer que l’Afrique, qui se trouve dans l’obligation ardente de réaliser cette performance statistique, est en retard, tandis que le monde est entrain de connaître une révolution numérique extraordinaire avec le développement d’outils technologiques et des concept d’accès à l’information partout et par tous les moyens.
« Tandis que le monde est en train de développer une intelligence artificielle qui permettra de mettre en relation les informations les plus diverses, C’est comme si l’Afrique n’a pas de moyens pour remettre à niveau très rapidement le niveau des exigences de l’actualité internationale. Si elle n’est pas en mesure de faire cet effort, elle va perdre ce que j’appellerai sa souveraineté statistique », a-t-il renchéri.
M. Lahlimi a aussi souligné l’impératif de développer la formation et l’enseignement scientifique pour tirer profit de la montée de l’intelligence artificielle.
« Il faut que nous luttions contre l’analphabétisme et étendions au maximum la formation qui ne doit pas être limitée à des taux de scolarisation importants, mais doit prendre en compte le contenu de scolarisation émancipateur, à double niveau intellectuel mais aussi humain et démocratique », a-t-il insisté.
Il a, par ailleurs, signalé que ce congrès constitue une sorte d’assemblée générale d’une académie internationale de la statistique, avec un aréopage d’experts qui ne sont admis à ce carrefour statistique international que par leur contribution à la recherche et leur disponibilité à la mettre généreusement à la disposition du monde, soit « une qualité humaine qui force le respect ».
« J’espère que l’opinion publique et les faiseurs de l’opinion publique auront l’occasion d’accéder à une partie de ce qui a été exposé et qu’on ne se limite pas uniquement à la présence », a-t-il conclu.
Organisé du 16 au 21 juillet à Marrakech, sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammd VI, le 61ème congrès mondial des statistiques constitue un hommage à la qualité du système marocain de statistique.