Macron appelle à une mobilisation européenne pour la défense

La sécurité du continent européen se trouve à un tournant. À la veille d’un sommet décisif à Bruxelles, le président français Emmanuel Macron a pris la parole mercredi soir dans une allocution solennelle. Face à une conjoncture internationale de plus en plus instable, il a plaidé en faveur d’un renforcement de la défense européenne et a évoqué, pour la première fois avec autant de clarté, l’hypothèse d’un partage de la dissuasion nucléaire française avec l’Union européenne.
Le contexte est grave. Dans son discours, d’un ton que la presse européenne qualifie de « dramatique« , Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité pour l’Europe de s’affirmer sur l’échiquier mondial. « L’Europe doit peser face à des puissances comme la Russie et les États-Unis« , a-t-il déclaré, mettant en garde contre les dangers d’une Union européenne vulnérable aux menaces extérieures, qu’elles soient militaires ou économiques.
L’un des axes forts de son intervention a été l’isolement croissant de l’Europe face à la Russie et aux États-Unis. Emmanuel Macron n’a pas mâché ses mots pour décrire la menace russe, citant des chiffres alarmants sur l’expansion de l’armée de Moscou : « D’ici 2030, la Russie aura augmenté ses effectifs de 300 000 soldats, renforcé ses blindés avec 3 000 chars supplémentaires et modernisé sa flotte aérienne avec 300 avions de chasse de dernière génération« .
L’autre inquiétude réside dans la fiabilité de l’allié américain. « Nous devons nous préparer à l’éventualité où les États-Unis ne seraient plus en mesure ou ne souhaiteraient plus garantir notre sécurité« , a-t-il averti, rappelant que l’avenir de l’Europe ne saurait être décidé à Washington ou à Moscou.
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Emmanuel Macron a salué les efforts budgétaires inédits annoncés ces dernières semaines par plusieurs pays européens, à l’instar de l’Allemagne, qui s’apprête à lancer un plan massif d’investissements militaires. La France, qui a déjà doublé son budget de défense sous ses mandats, entend s’inscrire pleinement dans cette dynamique.
Mais la proposition qui suscite le plus de réactions concerne la dissuasion nucléaire. En ouvrant la porte à des discussions avec l’Allemagne sur une extension du parapluie nucléaire français, Emmanuel Macron enclenche un débat explosif. Cette perspective a déjà été vivement contestée à l’Assemblée nationale, notamment par le Rassemblement national et La France insoumise, qui craignent une dilution de la souveraineté française sur l’atome.
Un sommet déterminant à Bruxelles
Cette offensive diplomatique précède une réunion stratégique à Bruxelles. Les dirigeants européens doivent y débattre d’un ambitieux plan de 800 milliards d’euros en faveur de la défense, proposé par Ursula von der Leyen. L’objectif est clair : tendre vers une autonomie militaire européenne, en rupture avec la dépendance historique vis-à-vis des États-Unis.
Toutefois, des dissensions persistent au sein de l’Union. Certains chefs d’État, comme le Premier ministre hongrois Viktor Orbán et son homologue slovaque Robert Fico, restent réticents à cette approche, en raison de leurs liens diplomatiques avec Moscou.
Ce jeudi 6 mars pourrait donc s’avérer décisif pour l’avenir de la défense européenne. Entre volonté de réarmement, nécessité d’une stratégie commune et débat sur le nucléaire, les discussions promettent d’être aussi tendues que cruciales.