Mme Zakia El Midaoui, ambassadeur du Maroc en Bulgarie et en Macédoine « Les valeurs culturelles et le dialogue des civilisations peuvent rapprocher les peuples et atténuer les frictions, mieux que ne pourrait le faire la politique »
Depuis l’établissement des relations diplomatiques entre le Maroc et la Bulgarie, en septembre 1961, le respect mutuel et l’amitié, de part et d’autre, ont été les mots d’ordre qui scellent une coopération fructueuse dans divers domaines et des relations bilatérales solides et stables. Preuve en est le soutien de la Bulgarie pour le développement du partenariat entre le Maroc et l’Union Européenne. En plus de sa position inébranlable et son appui pour la souveraineté du Maroc et son intégrité territoriale.
D’ailleurs, après la visite du Ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita, à Sofia, en septembre 2018, la première après 38 ans, le Premier Ministre de la République de Bulgarie, Boyko Borissov, a effectué, à son tour, une visite officielle au Maroc, en novembre de la même année, la première depuis 2005, ce qui a par ailleurs permis de relancer le dialogue politique. C’est dire que des deux côtés, une forte impulsion est donnée aux relations bilatérales pour une coopération solide basée sur des échanges constructifs et un partenariat gagnant-gagnant, sachant que le Royaume, en tant que hub régional, peut constituer pour la Bulgarie la porte d’entrée vers l’Afrique au moment où le Pays des Roses représente pour le Maroc une pierre angulaire pour accéder aux marchés des Balkans.
Il est bien vrai que les échanges commerciaux restent en deçà des attentes et le partenariat économique est loin d’être représentatif des relations politiques qui lient les deux pays. Mais force est de constater que la dynamisation des relations économiques et commerciales entre nos deux pays reste la priorité des politiques. Aussi, au cours de ces dernières années, la coopération économique entre la République de Bulgarie et le Royaume du Maroc a-t-elle enregistré une forte croissance et les échanges commerciaux entre les deux pays ont progressivement augmenté.
Dans cet entretien avec Madame Zakia El Midaoui, ambassadeur de Sa Majesté le Roi en Bulgarie et en Macédoine, nous abordons différentes questions relatives notamment aux relations entre le Maroc et la Bulgarie et au rôle de la culture dans le rapprochement des peuples.
MAROC DIPLOMATIQUE : Depuis que vous avez présenté vos lettres de créance en tant qu’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume auprès de la République de Bulgarie, vous ne ratez aucune occasion pour mettre en valeur la diplomatie culturelle. Pensez-vous que les valeurs culturelles et le dialogue entre les civilisations rapprochent les peuples ? La culture l’emporte-t-elle sur la politique ?
Madame Zakia MIDAOUI : Un ambassadeur assume une multitude de responsabilités dans son pays d’accréditation, dont celle de maintenir et de promouvoir l’image de son pays, selon une vision et une approche pertinentes, adaptées au contexte. Pour ce faire, dans mes deux pays d’accréditation, la République de Bulgarie et la République de Macédoine du Nord, je m’appuie sur la diplomatie culturelle.
J’estime que la diplomatie culturelle, en tant que « Soft power », est l’un des instruments de diplomatie publique auquel les pays, tant développés qu’en voie de développement, ont recours pour mobiliser leurs ressources afin de produire de l’attraction, à travers divers moyens et outils de communication avec le public, en général, et certains groupes cibles, en particulier.
En ce qui concerne ma propre expérience en tant qu’Ambassadeur de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, dans ces deux pays, je considère la diplomatie culturelle comme un outil important dans l’arsenal du « Smart power », tout en étant un outil de promotion des industries du tourisme et de l’artisanat. Pour ce faire, je m’inspire humblement de ce noble idéal qu’est « L’unité dans la diversité », exprimé et prôné par Sa Majesté le Roi afin de sensibiliser les composantes de la communauté internationale à contribuer, entre autres, au maintien de la paix, de la sécurité et de la justice sociale, aux fins de la prospérité et du bien-être commun de l’humanité et ce malgré nos différences.
Comme nous vivons dans un monde interdépendant et hautement interconnecté, où se confrontent différents courants idéologiques et des intérêts divergents, où sévit une multitude de conflits et de défis globaux, à l’origine de l’instabilité et de l’insécurité au niveau mondial, j’estime que les valeurs culturelles et le dialogue des civilisations peuvent rapprocher les peuples et atténuer les frictions, mieux que ne pourrait le faire la politique.
En effet, la culture est un facteur de rapprochement entre les peuples et les civilisations puisqu’une personne peut admirer son semblable ou un peuple à travers sa culture, son histoire, ses valeurs et traditions contribuant ainsi, à la fois, à instaurer un climat de compréhension mutuelle et de tolérance tout en renforçant le sentiment de cohabitation, de coexistence et du « Vivre ensemble », ainsi qu’à prévenir, entre autres, les conflits et l’extrémisme sous toutes leurs formes.
Convaincue de ces principes et valeurs, j’ai opté pour la diplomatie culturelle en tant que « Soft power » pour promouvoir l’image de notre pays en République de Bulgarie et en République de Macédoine du Nord, tout en tenant compte de ses idéaux et fondamentaux.
MD : Mme l’Ambassadeur, on a entendu dire qu’en Bulgarie, on vous appelle « la vraie Ambassadrice » et « l’amie de la Bulgarie ». Quel est votre secret pour gagner le cœur des Bulgares ?
– M.Z.M : Sans prétention aucune, je peux dire que j’ai pu marquer mon mandat d’Ambassadeur de Sa Majesté le Roi en République de Bulgarie et aussi en République de Macédoine du Nord par des actions concrètes et visibles, en consacrant une grande partie de mon temps et de mon énergie à faire reconnaître les compétences des diplomates marocains, en général, et de la Femme marocaine, en particulier, quand il s’agit de défendre les causes nobles de notre mère patrie.
Grâce à l’action pertinente de l’Ambassade, les populations et les forces vives de mes deux pays d’accréditation connaissent mieux notre pays dans tous ses aspects. Elles connaissent, à présent, le Maroc en tant que pays politiquement stable et modèle de société musulmane ouverte sur le monde, qui a fait de la tolérance et du « vivre ensemble » un choix irréversible depuis plus de 12 siècles. Ils comprennent plus pourquoi le Royaume est un carrefour où se sont toujours rencontrées et cohabitées, dans la paix et le respect mutuel, des civilisations, des ethnies, des cultures et des langues aussi diverses que différentes.
Par ailleurs, ma personnalité et mon attitude envers les autres m’ont aidée dans ma démarche parce qu’en général, je perçois mon environnement avec beaucoup de bienveillance. Mes interlocuteurs et les personnes que je côtoie le remarquent. Ils sentent que je les respecte et apprécie leur culture, leurs traditions, et aussi leur beau pays.
Tous ces éléments m’ont aidée à entretenir des relais, à promouvoir l’image de notre pays et sa réputation auprès des élites et des populations de mes deux pays d’accréditation. C’est cette approche qui m’a permis de bien représenter notre pays et d’améliorer mon réseau d’amis et de sympathisants.
Dans cette optique, l’action diplomatique de l’Ambassade est mise en œuvre avec courage et détermination aussi bien dans l’adversité que dans la coopération. Au-delà de l’épreuve, j’assume avec force et ténacité les missions et obligations découlant de mon statut d’Ambassadeur, tout en gardant mon attention focalisée sur les objectifs que j’ai arrêtés dans mon plan d’action.
Mes compétences sont également le fruit des expériences accumulées au sein du ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains Résidant à l’étranger (MAECAMRE) où j’avais assumé plusieurs responsabilités importantes et de l’addition de rencontres enrichissantes à l’international, que j’avais faites durant mon parcours professionnel, ainsi que du plaisir d’être créative en portant de nouvelles idées et en les faisant aboutir conformément aux priorités.
Je n’aurais peut-être pas réussi sans les consignes et l’éclairage de ma hiérarchie et encore moins si je n’étais pas passée par la grande école du MAECAMRE, où j’ai eu la chance d’apprendre l’essentiel du travail de « manager », qui m’a permis de définir les priorités, d’apporter ma contribution à travers des réflexions et des analyses et de mener des négociations.
MD : Vous parcourez la Bulgarie pour connaître le pays. On aimerait savoir plus sur vos déplacements et du coup, pouvoir se faire une idée du pays.
– M.Z.M : À l’instar du Maroc, la Bulgarie est une destination touristique internationale par excellence. C’est un pays touristique pour les quatre saisons, avec une offre très diversifiée (balnéaire, rurale, religieuse, thermale, sports d’hiver et de montagne, écologique, de chasse, gastronomique…). Ce pays, qui compte une population d’environ sept millions, a reçu plus de neuf millions de touristes en 2019. Selon de nombreux classements internationaux, le pays séduit avec le standing de ses hôtels et avec sa nature bien préservée qui offre les conditions optimales pour un séjour atypique et agréable. C’est une des meilleures destinations de tourisme familial et des villes touristiques les plus fréquentées et les plus abordables dans la région.
Etant donné que la Bulgarie est classée 3e au niveau européen en termes de richesse du patrimoine culturel, le peuple et les pouvoirs publics bulgares impressionnent par leur désir de préserver ce patrimoine riche et diversifié et aussi par leur sens de la créativité, comme en témoigne le nombre d’institutions spécialisées dans toutes sortes d’arts et de festivals culturels internationaux organisés annuellement. D’ailleurs, c’est pour cette raison que Plovdiv, la 2e plus importante ville bulgare, a été consacrée en 2019, Capitale européenne de la culture.
Depuis ma prise de fonction en Bulgarie, j’ai visité de nombreuses villes, villages et municipalités de toutes les régions de ce pays des Balkans pour montrer la riche diversité culturelle, les traditions et l’histoire de mon pays et informer au sujet des réformes qui ont lieu dans les domaines politique et socioéconomiques, depuis l’avènement de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, au Trône de Ses Glorieux Ancêtres. Ce n’est certes pas un travail de tout repos, quand on doit parcourir des contrées lointaines et parfois difficilement accessibles, mais l’effort est toujours récompensé quand les régions et les populations visitées ont montré un intérêt grandissant pour toutes ces activités et en redemandent davantage. C’est ainsi que l’Ambassade se retrouve invitée aux fêtes annuelles de la plupart des villes et municipalités bulgares.
Je réponds toujours favorablement à toutes les invitations émanant des maires, des présidents de Conseils régionaux, des parlementaires et des eurodéputés ainsi que des représentants des médias, du monde académique et des ONG, pour organiser conjointement avec eux des évènements culturels. C’est ce qui a permis à cette Ambassade d’élargir son réseau à tous les niveaux et de se positionner parmi les missions diplomatiques les plus actives en Bulgarie.
De même, je m’assure pour que le Maroc, à travers l’Ambassade, soit toujours partie prenante et représenté, de manière optimale, à d’autres manifestations telles que les festivals thématiques, foires et autres événements (films, jeunesse, poterie, costumes nationaux, sculpture sur bois, peinture, photographie, cinéma, art culinaire, écologique, musique, équestre, pêche, agriculture, tourisme, etc…).
Je participe également à beaucoup de conférences thématiques organisées par les autorités bulgares et nord-macédoniennes et à celles organisées par les universités, les élus locaux, les eurodéputés, les think-tanks, etc…pour que le Maroc soit visible là où il faut à travers son Ambassade.
En toute modestie, je dirai que l’Ambassade investit un grand espace et cela me motive à persévérer. Je suis toujours en mouvement, toujours dans l’action ! C’est ce qui me permet d’élargir mon périmètre d’intervention.
Je travaille également, avec mon équipe, en collaboration avec les agences de voyages et les compagnies aériennes de mes deux pays d’accréditation pour organiser des portes ouvertes sur la destination Maroc. L’Ambassade organise également avec les hôtels et les restaurants des semaines de l’art culinaire marocain. D’ailleurs, la prochaine manifestation est prévue en novembre prochain, dans un hôtel 5 étoiles à la ville de Kustendil, à l’occasion de la commémoration du 45e Anniversaire de la Marche Verte et du 65e Anniversaire de la Fête de l’Indépendance de notre pays.
C’est ainsi que l’Ambassade a organisé dans certaines villes et municipalités des journées et soirées culturelles sous forme d’expositions d’affiches et de photos sur le Maroc touristique, sur les opportunités d’investissement, etc. Hormis la capitale Sofia, où ont été organisées de nombreuses manifestations culturelles avec plusieurs partenaires, l’Ambassade a organisé des événement culturels, à Plovdiv avec le Musée éthnologique, à Kazanlak avec le Musée de la Rose en collaboration avec l’Ombudsman de la région, pour montrer également le Moussem des roses de Galaat Megouna, à Gabrovo avec le Musée de l’éducation et de l’histoire, où j’ai donné un aperçu de ces deux domaines au Maroc, à Tryavna, Capitale de la sculpture sur bois, à Blagoevgrad au profit des étudiants de l’Université publique qui abrite notamment les facultés de droit, d’économie, des relations internationales, à Troyan pour le Festival annuel des arts et de la céramique, à Banité, dans le cadre du Festival des eaux minérales et thermales, à Samokov, à un événement sur la tolérance financé par l’Union européenne, à Momchilovtsi pour célébrer la Fête du Cheval où j’ai parlé des purs sang et chevaux berbères marocains, à Sozopol (en tant que Présidente de la 8e Edition dudit Festival) dans le cadre du Festival francophone international « Soleil » et du Festival international de la Jeunesse, sous le Haut patronage de la vice-présidente de la République Mme Ilana Yotova, à Veliko Tarnovo, ancienne capitale de la Bulgarie, où est célébrée, chaque année, la Fête de l’Indépendance, à Kustendil pour le Festival de la Cerise et celui du Pain, à Tchernomorets pour la Fête de la Pêche et à Chepelare, Borino, Belitsa, Madan, Ribnovo et Nova Mahala, pour célébrer la Fête annuelle de ces villes ainsi qu’à Bansko (capitale du Ski) à l’occasion de la 17e Edition du Festival des films se rapportant aux sports extrêmes où j’ai eu l’opportunité de présenter le Maroc, en compagnie de Mme Leila Ouachi, qui a donné un aperçu sur le Raid multisports féminin « Sahraouiya » organié à Dakhla, sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, et de M. Nacer Benabdeljalil, qui a partagé son expérience en tant que premier Marocain à avoir gravi le mont « Everest » en mai 2013.
Au cours de toutes ces manifestations, le défilé du Caftan et de la Tekchita est présent ainsi qu’une cérémonie de thé au profit du grand public et un cocktail dînatoire au profit des invités officiels.
MD : En 2021, les relations diplomatiques maroco-bulgares, établies le 1er septembre 1961, vont fêter leur 60e anniversaire. Comment se portent, aujourd’hui, les relations bilatérales entre les deux pays ?
– M.Z.M : Les relations bilatérales maroco-bulgares se sont distinguées, depuis l’établissement des relations diplomatiques, par un respect et une amitié sincères, favorisant leur développement à tous les niveaux. L’adhésion de la République de la Bulgarie à l’UE en 2007, et le rôle important qu’elle joue dans l’Europe du Sud-Est et dans la région des Balkans, d’une part, et le statut avancé du Maroc auprès de l’UE et sa présence sur le Continent africain, d’autre part, ont donné un nouveau souffle à ces relations.
Aujourd’hui, on peut dire que ces relations ne se sont jamais aussi bien portées ; en témoignent la dernière visite à Sofia du Chef de la diplomatie marocaine, M. Nasser Bourita, en septembre 2018, la première après 38 ans, et celle du Premier Ministre de la République de Bulgarie, M. Boyko Borissov, en novembre de la même année, la première du genre depuis 2005, qui traduisent la volonté politique des deux pays à consolider ces relations.
Dans cette dynamique, des visites officielles de haut niveau aussi bien du côté marocain que du côté bulgare, qui étaient prévues en 2020, notamment celles du Chef du gouvernement et du Président de la Chambre des Représentants à Sofia, et celle de la Vice-Première Ministre et Ministre de Affaires étrangères à Rabat, ont dû être reportées en raison de la pandémie de la Covid-19.
MD : En dépit de l’excellence des relations politiques et amicales et de la forte volonté de part et d’autre de renforcer davantage les relations riches et denses entre les deux pays et construire un véritable partenariat bilatéral sur des bases solides, le volume des échanges commerciaux reste en deçà des attentes. Pourquoi à votre avis ?
– M.Z.M : Concernant le faible volume des échanges commerciaux et ce malgré les excellentes relations politiques et d’amitié entre nos deux pays, force est de reconnaître que le volume des échanges commerciaux bilatéraux, pourtant en augmentation chaque année, reste effectivement en-deçà des potentialités des deux pays. Le développement des relations économiques et commerciales a, d’ailleurs, été le sujet principal des discussions entre le Ministre marocain des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, M. Nasser Bourita, et les responsables bulgares rencontrés lors de sa visite à Sofia, en septembre 2018.
Ce volet des relations bilatérales a été également au centre des discussions entre le Chef de gouvernement marocain, M. Saâd Dine El Otmani et le Premier Ministre bulgare, M. Boyko Borissov, à l’occasion de la dernière visite de ce dernier à Rabat, en novembre de la même année.
Les deux parties se sont accordées sur la nécessité de renforcer les liens économiques entre nos deux pays dans tous les domaines d’intérêt commun tels que le commerce, l’investissement ou la coopération tripartite.
Le Maroc, en tant que plaque tournante régionale importante, serait aujourd’hui un partenaire idéal pour la Bulgarie pour atteindre les marchés africains, tirant parti de l’excellente position du Royaume en Afrique. J’aimerais ici saluer la réactivité et la volonté sincère du gouvernement bulgare de développer ses relations bilatérales avec le Maroc, à travers la visite du Premier Ministre, M. Boyko Borissov, qui, je tiens à le préciser, a été décidée, programmée et réalisée en un temps record, à peine deux mois après la visite de M. le Ministre Nasser Bourita à Sofia.
Le Premier Ministre, M. Borissov, qui était accompagné lors de cette visite par une importante délégation d’hommes d’affaires, a assisté à l’ouverture des travaux d’un Forum économique Maroc-Bulgarie, organisé pour la circonstance à Casablanca.
Ce Forum économique a permis aux opérateurs économiques bulgares de s’informer sur la stratégie marocaine de diversification des partenaires économiques et des diverses réformes économiques, et notamment des stratégies sectorielles lancées par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu L’assiste, qui ont permis au Maroc de se positionner comme une plate-forme pour les investisseurs en Afrique et dans le monde arabe.
MD : Pensez-vous que la création de la Chambre mixte maroco-bulgare de commerce et d’industrie intensifiera les échanges entre la République bulgare et le Maroc ?
– M.Z.M : J’aimerai d’abord souligner que le projet de création de cette Chambre remonte à 2005, et ce n’est qu’en 2018 et 2019 qu’il a vu le jour grâce à la volonté politique exprimée par les gouvernements des deux pays de développer les relations économiques et commerciales bilatérales et régionales, et ce à l’occasion du dernier échange de visites.
C’est justement après ces deux importantes visites et toute la dynamique qu’elles ont engendrée qu’est venue l’idée de relancer le projet de création de la Chambre mixte de commerce Maroc-Bulgarie, qui sera amenée à jouer un rôle de catalyseur pour booster et revigorer la coopération économique et commerciale.
Effectivement, quelques mois après sa création, la Chambre mixte de commerce maroco-bulgare, vecteur important dans le développement des relations économiques bilatérales, a pu préparer et finaliser, en coordination avec l’Ambassade, une mission d’hommes d’affaires de haut niveau, représentant divers secteurs de l’économie et de l’industrie bulgares, et qui devait se rendre au Maroc en octobre 2019, pour être finalement reprogrammée pour le mois d’avril 2020.
Les membres de cette mission économique, qui est d’ailleurs toujours à l’ordre du jour, devaient visiter les villes de Marrakech, Casablanca, Agadir et Oujda et rencontrer les opérateurs économiques de chacune de ces villes et régions. Les opérateurs des deux pays, qui sont en contact permanent, devaient, lors des réunions qui étaient prévues avec les responsables de la CGEM, de l’ASMEX et de l’AMDIE, examiner également la possibilité d’organiser une mission économique marocaine en Bulgarie.
A mon grand regret, comme pour de nombreuses actions similaires, cette mission a été annulée à la dernière minute et reportée à une date ultérieure en raison des restrictions de déplacement engendrées à l’échelle mondiale par la pandémie de la Covid-19.
Je suis néanmoins confiante quant à la réalisation très prochaine de cette mission et des résultats positifs qui en découleront.
MD : Selon vous, comment revigorer la coopération économique, élargir et donner une forte impulsion à notre partenariat bilatéral pour une coopération plus dense, plus riche et plus diversifiée sachant que le Maroc, en tant que hub régional, peut constituer la porte d’entrée vers l’Afrique d’autant plus que la Bulgarie représente pour le Royaume une pierre angulaire pour accéder aux marchés des Balkans ?
– M.Z.M : Le Maroc et la Bulgarie, qui ont exprimé, à maintes reprises, leur volonté politique de renforcer leur coopération économique, devraient sans tarder saisir toutes les opportunités offertes aux économies des deux pays, à la faveur de la forte présence des entreprises marocaines sur le Continent africain et le lancement, en janvier 2021, de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), dont le Maroc est signataire, d’une part, et de l’expertise et du savoir-faire des entreprises bulgares incontestables et reconnus dans la région des Balkans, au Maroc et en Afrique, d’autre part.
Concernant ce dernier point, il sied de noter que la République de Bulgarie porte, aujourd’hui, un intérêt particulier aux marchés africains au Sud du Sahara et serait disposée à examiner une coopération tripartite Maroc-Bulgarie-Afrique. La vice-Première Ministre et Ministre des Affaires étrangères bulgare, Mme Ekaterena Zahrieva, a déclaré, en décembre 2019, à Bruxelles dans ce sens que « l’Afrique est en train de devenir une priorité de la politique étrangère de l’Europe et de la Bulgarie. Il s’agit de la partie du Continent située au Sud du Sahara. Malheureusement, dans cette partie de l’Afrique, notre présence est faible ».
Dans ce sens, le Maroc et la Bulgarie sont appelés à multiplier les rencontres, les visites et les missions économiques dans les deux pays, en réalisant, pour commencer, les visites et missions reportées, et en en programmant de nouvelles. Ils devraient également organiser des missions économiques conjointes en Afrique et dans la région des Balkans.
Concernant la coopération inter-régions, j’aimerai mentionner ici la visite officielle effectuée du 18 au 20 février 2020, à Rabat, par le Gouverneur de la Région de Sofia, M. Ilian Sashov Todorov, à l’invitation du Président du Conseil de la Région de Rabat-Salé-Kénitra, M. Abdessamed Sekkal.
Cette visite initiée par l’Ambassade, en coordination avec les présidents des deux régions, a vu la signature d’une Convention-cadre de coopération entre les deux régions. Les deux parties ont également discuté et identifié des formes de coopération concrètes, et ont échangé sur les possibilités de reserrer les liens entre la Région de Rabat-Salé-Kénitra et celle de Sofia, plus particulièrement dans les domaines de l’économie, de l’éducation, des échanges culturels et du tourisme.
MD : Quels sont les atouts offerts par la Bulgarie et quels sont les domaines les plus prometteurs pour les investisseurs marocains ?
– M.Z.M : En tant que pays balkanique, membre de l’Union européenne, la Bulgarie offre aux investisseurs étrangers la stabilité politique ainsi qu’un cadre juridique et réglementaire fiable. Sur le plan macroéconomique, la Bulgarie offre une croissance économique soutenue, des niveaux d’inflation relativement bas et une stabilité de la monnaie nationale (Lev) grâce à un niveau de taux de change fixe par rapport à l’Euro. Parmi les avantages comparatifs dont dispose la Bulgarie, sa main-d’œuvre qualifiée dont le coût est concurrentiel comparé à celui des autres pays de l’Union européenne.
Ces atouts ont permis au cours des dernières années de développer des secteurs comme les technologies de l’information et de la communication, l’externalisation des processus d’affaires, la fabrication de machines et d’équipements. Les plus grandes sociétés internationales fournisseurs de composants et d’équipements pour l’industrie automobile sont installées en Bulgarie depuis des années, ce sont les mêmes sociétés et acteurs clés dans cette filière qui sont présents au Maroc.
Concernant les domaines pouvant intéresser les investisseurs marocains, je crois que de nombreux secteurs économiques ont le potentiel pour encourager les investissements, la coopération et la création d’entreprises mixtes. Pour les opérateurs marocains, les intérêts se porteraient éventuellement sur les secteurs tels que le textile, l’agroalimentaire, les technologies des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, qui se développent très rapidement dans les deux pays. La Bulgarie propose aux entreprises étrangères, notamment marocaines souhaitant s’y installer, une plateforme pour accéder aux marchés des pays de l’Europe du Sud-Est, ainsi que de la Russie.
De surcroît, l’Agence bulgare des Investissements offre l’accompagnement, l’information et le soutien nécessaires aux investisseurs étrangers lors de la première phase de l’étude de faisabilité.
MD : Un mémorandum d’entente a été signé, le 13 septembre à Sofia, entre le Maroc et la Bulgarie, avec notamment pour objectif de promouvoir la coopération bilatérale en matière de formation dans le domaine de la diplomatie. De quoi s’agit-ilexactement ?
– M.Z.M : Il s’agit, en fait, d’un accord-cadre, signé le 13 septembre 2018, par M. le Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, M. Nasser Bourita, et la vice-Première Ministre bulgare chargée de la Réforme de la justice et Ministre des Affaires étrangères, Mme. Ekaterina Zaharieva, qui vise à encourager la formation en matière d’échange d’informations sur des sujets de Droit international, de Droit diplomatique et d’autres disciplines en rapport avec la pratique de la diplomatie et des Relations internationales. La mise en œuvre de cet Accord fera certainement l’objet de discussions entre les deux ministres, lors d’une éventuelle prochaine visite de Mme. Zaharieva au Maroc, prévue fin 2020 mais, dont la date est encore à préciser.
MD : Le soutien de la Bulgarie pour le développement du partenariat entre le Maroc et l’Union européenne était salutaire. La Bulgarie soutient aussi les efforts du Maroc pour une solution politique durable à la question du Sahara. Peut-on parler d’une amitié acquise ?
– M.Z.M : La République de Bulgarie ne reconnaît pas la « pseudo rasd » et ne dispose d’aucune représentation de l’entité séparatiste sur son territoire.
La Bulgarie adopte une attitude constructive à l’égard de l’intégrité territoriale du Maroc, et exprime, notamment, dans ce sens sa position dans le cadre de l’Union européenne et de ses organes subsidiaires. En témoigne, d’ailleurs, le vote majoritaire du Parlement européen qui a validé, en séance plénière, le 16 janvier 2019, l’échange de Lettres concernant l’Accord agricole entre le Maroc et l’Union européenne, qui a été adopté par une écrasante majorité, élargissant ainsi les préférences tarifaires aux produits agricoles issus des provinces marocaines du Sud.
Un mois après, soit le 12 février 2019, c’était au tour de l’Accord de pêche entre l’Union européenne et le Maroc d’être voté avec le même succès par le Parlement européen.
Ces deux accords, pour lesquels les euros-députés bulgares avaient apporté leur soutien, consolident la continuité du partenariat entre le Maroc, l’Union européenne et ses États membres et reconnaissent, à juste titre, le Sahara en tant que région sous souveraineté marocaine, tout en consacrant de nouveau la souveraineté du Maroc sur ses ressources naturelles.
MD : Dans plusieurs événements surtout culturels, organisés par le pays accréditant, vous êtes presque l’une des rares missions diplomatiques à être invitée à prendre part à diverses manifestations. Au titre de l’année 2020, on vous a remis « l’étoile de la diplomate cultivée ». Comment peut-on expliquer ce succès ?
– M.Z.M : Effectivement, le « Conseil des Marocaines du Monde » a non seulement décidé de lancer, le 3 janvier 2020, son « Salon culturel diplomatique », dans sa première édition à Sofia, sous le thème « Les femmes et leur rôle dans la promotion des relations culturelles et diplomatiques entre les pays », en partenariat avec l’Ambassade du Royaume du Maroc en Bulgarie, mais a également décidé de me décerner l’Étoile de la diplomate cultivée ainsi que la Présidence d’honneur d’une durée d’une année (2020) dudit Conseil.
Ce Salon constitue un espace où la culture rencontre la diplomatie en présence d’acteurs appartenant à différents horizons et domaines, notamment culturel, diplomatique, politique, intellectuel, scientifique, artistique ou sportif. C’est un espace de dialogue et d’échange d’expériences et de bonnes pratiques, visant à renforcer les relations entre le Maroc et les autres pays où le Royaume est représenté au niveau diplomatique et consulaire.
J’étais agréablement surprise et ravie lorsque Mme Nadia Yakine, journaliste et experte dans le domaine de la condition de la femme et de l’immigration à Frankfurt (Allemagne), m’a contactée en sa qualité de présidente dudit Conseil pour m’annoncer ces bonnes nouvelles, en hommage à mes initiatives et actions à l’attention des intellectuels et des médias et aux efforts que j’ai déployés dans mes deux pays d’accréditation pour montrer la culture marocaine.
En somme, ce Trophée était pour moi un vrai accélérateur. Il m’a encouragée à faire encore plus en m’engageant davantage dans des actions plus importantes malgré la pandémie de la Covid-19. Cette mise en lumière m’a tellement enthousiasmée que cela m’a permis de développer des capacités dont je n’avais même pas conscience, le but étant d’essayer d’être à la mesure de la confiance que S.M. le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, a placée en ma modeste personne lorsque notre Auguste Souverain m’a nommée à ce poste.
A noter que l’Étoile du diplomate cultivé est un trophée spécial créé par le «Conseil des Marocaines du Monde », qui est octroyé une fois par an. Auparavant, cette distinction a été accordée à M. Jamal Chaibi, ex Consul général du Maroc en Allemagne et actuellement Ambassadeur de S.M. le Roi au Vietnam.
Un moment important de ce premier « Salon culturel diplomatique » a été la signature d’un mémorandum d’accord entre l’Union des écrivains bulgares et le « Conseil des Marocaines du Monde » dans le domaine de la coopération en matière de littérature, pour encourager le partenariat entre les écrivains et les intellectuels des deux pays.
Je me dois de rappeler que ce premier « Salon culturel diplomatique », a été également organisé sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi de Bulgarie, Siméon Saxe-Cobourg-Gotha, en collaboration avec le « Conseil de la Communauté marocaine à l’Etranger » et la « Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l’Etranger », en coordination avec «l’Union des écrivains bulgares », l’Association 21e Siècle et le Magazine « Diplomatic Spectrum » ainsi qu’avec le soutien du Groupe de danse « Sofistic Jivo » et l’Association des professeurs de français de Bulgarie.
MD : Vous venez d’être consacrée par la Fondation « l’Europe et le monde », le 24 septembre, pour un partenariat actif ainsi que pour le soutien que vous apportez aux talents bulgares et aux initiatives culturelles. En plus de ce prix remis pour la première fois à un membre du corps diplomatique, vous avez reçu des répliques d’objets provenant de trésors thraces, trouvés dans les terres bulgares, ce qui représente un pan de l’Histoire et de la culture de ce pays. Qu’est-ce que cela vous fait ?
– M.Z.M : Effectivement, à l’occasion de la commémoration du 5e anniversaire de son Site d’information www.evropaworld.eu, la Fondation « L’Europe et le Monde » m’avait décernée, le 24 septembre 2020, un prix en tant que partenaire active de cette Institution et aussi en reconnaissance au soutien que je ne cesse d’apporter aux talents et aux initiatives culturelles bulgares. Cette distinction, qui est également présentée sur le Site Web de la Fondation dans la section « Mission Patron/Mécène», n’a été avant la date précitée, accordée qu’aux personnalités (autres que les diplomates) du monde des affaires et celles en charge des programmes gouvernementaux en faveur des arts et de l’éducation. C’est pour la première fois que ladite rubrique introduit un diplomate étranger, sachant que 75 ambassadeurs sont accrédités en Bulgarie, dont une vingtaine de femmes.
Les mots ne peuvent guère exprimer les sentiments de satisfaction et du devoir accompli que j’ai ressentis suite à la distinction que m’avait accordée, la Fondation « L’Europe et le Monde », qui est une importante organisation non gouvernementale, partenaire de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe, et qui œuvre dans le domaine de la culture, de l’art, de l’éducation, du monde des affaires et du dialogue interculturel.
Le fait d’être mise en avant en raison, également, de la contribution de l’Ambassade marocaine à l’enrichissement de la vie culturelle, en Bulgarie, suite aux nombreuses activités culturelles que j’ai pu organiser, durant mon mandat dans toutes les régions de ce beau pays pour promouvoir l’image de mon pays qui jouit d’une stabilité politique et faire mieux connaître au peuple bulgare ce qui fait la richesse de notre histoire et de notre diversité culturelle, me conforte dans mon engagement et m’encourage à persévérer dans ma mission, tout en demeurant humble et modeste devant une telle marque de reconnaissance.
Je suis d’autant plus heureuse du témoignage de la Radio nationale bulgare, qui a publié un article sur son site Web sous le titre « Dynamisme de l’Ambassadeur Zakia El Midaoui », tout en soulignant que « … à travers elle, la Bulgarie a un ami sincère au grand cœur ».
MD : Vous êtes la Présidente du Groupe des ambassadeurs francophones en Bulgarie. Vous êtes membre du Conseil d’Administration de l’ESFAM (Ecole supérieure de la Francophonie pour l’Administration et le Management). Quels sont vos projets pour dynamiser la Francophonie ? Comment voyez-vous l’avenir de la Francophonie aussi bien en Bulgarie qu’à l’international ?
– M.Z.M : Avant de vous répondre, j’aimerai rappeler que lorsque j’étais Directrice de la Coopération multilatérale et des Affaires économiques internationales au Ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, j’étais également chargée par Monsieur le Ministre de représenter notre pays à l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) où j’avais assumé la position de vice-Présidente de la Commission économique de l’OIF. Je représentais aussi le Maroc au sein du Groupe ad hoc, qui a établi la Stratégie économique de l’OIF, et qui était présidé par l’Ambassadeur Mohammed Chafiki.
Etant donné que l’OIF n’est pas une Organisation à des fins de développement, le Groupe des ambassadeurs francophones (GAF) a, dans un contexte de pénurie budgétaire, conçu une politique adaptée à ses moyens et à ses objectifs stratégiques pour rechercher la meilleure efficacité.
Par conséquent, en temps normal et surtout avant la pandémie de la Covid-19, j’ai contribué avec mes collègues du GAF, à la fois, à la mise en réseau des différents acteurs de la Francophonie en Bulgarie pour qu’ils travaillent de concert et ne restent pas dispersés, et à l’enrichissement du contenu de l’agenda francophone en Bulgarie, et ce en collaboration avec le Bureau de l’OIF pour l’Europe orientale et centrale à Bucarest (Roumanie), le Centre régional francophone pour l’Europe centrale et orientale (CREFECO), l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) et l’ESFAM, tout en mettant à contribution d’autres acteurs de la Francophonie tels que notamment l’Association des professeurs de français de Bulgarie et les filières francophones internationales au sein des universités bulgares.
J’ai également organisé des déjeuners/débats thématiques auxquels étaient conviées des personnalités bulgares francophones tels que le Roi Siméon II ; la Commissaire européenne Mme Mariya Gabriel, en charge de l’Innovation, de la Recherche, de la Culture, de l’Éducation et de la Jeunesse et la vice-Présidente de la République Mme Iliana Yotova ainsi que des manifestations culturelles et éducatives (Festival de films francophones et de la musique où le Maroc était toujours mis en lumière).
De même, je représente le GAF à diverses manifestations et conférences organisées en Bulgarie, telles que le Colloque international « Être, venir d’ailleurs et écrire en français » organisé, les 9 et 10 décembre 2019, à l’Université de Sofia « Saint-Clément d’Ohrid » par le Centre régional francophone pour l’Europe centrale et orientale (CREFECO), qui a vu la participation du grand écrivain francophone marocain, M. Mahi Binebine, et la Table ronde ayant eu lieu en octobre 2019, à la Nouvelle Université bulgare, sur le thème « La Francophonie universitaire : perspectives bulgares, régionales et internationales ».
A l’occasion de la commémoration du 50e Anniversaire de l’OIF, avec mes collègues membres du GAF et les représentants des organisations francophones représentées en Bulgarie, nous avions préparé plusieurs événements et manifestations culturelles qui devaient avoir lieu en mars 2020. Cependant, en raison de la pandémie du Coronavirus nous avons reportés nos projets. D’ailleurs, l’un des événements phares programmé ayant été prévu à cette occasion était la remise de distinctions « Trophées de la réussite » à des jeunes bulgares francophones et talentueux, ayant contribué, dans leurs domaines respectifs, à la promotion de la langue française en Bulgarie. J’avais, pour la circonstance, adressé des invitations pour participer à la cérémonie officielle des « Trophées de la réussite », à des personnalités bulgares telles que Mme Ilianan Yotova, vice-Présidente de la République de Bulgarie et Mme Mariya Gabriel, Commissaire européenne en charge de l’Innovation, de la Recherche, de la Culture, de l’Éducation et de la Jeunesse, qui avaient marqué leur accord.
J’avoue que dans ce genre de tâches, je suis aidée par les autres membres du GAF, en particulier par mes deux vice-présidentes qui sont les ambassadeurs de France et de Suisse, que je salue vivement.
Etant donné que la promotion de la Francophonie passe prioritairement par la présence d’un réseau culturel et scolaire développé, en Bulgarie la Francophonie est caractérisée par son rôle innovateur, en matière pédagogie du français. En effet, il y a presque un demi-siècle que la Bulgarie créait des lycées bilingues, une première en Europe centrale et orientale, ce qui a valu au système bulgare d’acquérir une certaine légitimité pédagogique avant de devenir une référence, en Europe. Dans ce contexte, l’enseignement du français s’avère être d’un excellent niveau, tout particulièrement dans le cadre des sections bilingues des collèges et lycées.
C’est grâce à cette réussite que la Bulgarie compte actuellement de nombreux lycées de français renforcé, et de lycées techniques, qui ont ouvert depuis 1991 des classes préparatoires en français. Dans le supérieur, plusieurs établissements de Sofia ont créé des filières francophones à l’exemple de l’Université de Sofia, de l’Académie de l’Agriculture, de l’Université d’Économie nationale et mondiale de Sofia (économie et gestion). L’expérience la plus réussie dans ce domaine demeure l’Établissement Spécialisé de la Francophonie pour l’Administration et le Management (ESFAM), qui étant à vocation régionale, accueille des étudiants de nombreux pays africains, dont le Maroc, en offrant une formation destinée à renforcer l’État de droit et l’économie de marché.
En ce qui concerne l’avenir de la Francophonie dans le monde, je pense qu’elle continue de s’épanouir sur les cinq continents et bénéficie d’un véritable capital de sympathie à travers le monde, puisque l’OIF continue d’attirer de plus en plus de nouveaux candidats en son sein, élargissant ainsi son espace à tous les niveaux.
De même, la Francophonie, véhiculée à travers la langue française qui est la 3e langue des affaires et du commerce, est la seule avec l’anglais à être parlée sur tous les continents. Je considère qu’avec 300 millions de locuteurs en langue française, dont la grande majorité dans nombre de pays a moins de 30 ans, la Francophonie a un bel avenir.
MD : En votre qualité d’Ambassadeur de Sa Majesté le Roi en Bulgarie, quelles mesures avez-vous prises pour accompagner les Marocains de la Bulgarie pendant la pandémie de la Covid-19 ?
– M.Z.M : Avant de répondre à votre question, je voudrai d’abord rendre un vibrant hommage à Notre Auguste Souverain Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu L’Assiste, qui, depuis la déclaration du premier cas de Covid-19 au Maroc, n’a ménagé aucun effort pour préserver la santé de Son peuple et l’économie de Son Royaume.
En effet, dès la réouverture de l’espace aérien du Royaume, Sa Majesté le Roi a donné Ses Hautes Instructions afin qu’une opération de rapatriement de plus de 32.000 visiteurs et touristes marocains bloqués dans le monde et de milliers de binationaux soit organisée, en coordination entre les départements des Affaires étrangères, de l’Intérieur, de la Santé et du Transport.
Et c’est conformément aux Hautes Instructions Royales que l’Ambassade du Maroc à Sofia s’est mobilisée pour accompagner les membres de la communauté marocaine résidant en Bulgarie. Ainsi, dès l’annonce de l’état d’urgence sanitaire en Bulgarie, l’Ambassade a mis en place une cellule de crise, joignable 24/24 et 7/7, pour assister et accompagner les membres de la communauté marocaine, composée majoritairement d’étudiants, pour faire face aux nombreuses difficultés qu’ils ont rencontrées durant cette période difficile.
Ainsi, l’Ambassade a organisé durant le mois sacré de Ramadan, en pleine crise sanitaire, une opération de distribution d’une aide alimentaire au profit de nos concitoyens résidant en Bulgarie, dont un grand nombre s’est retrouvé en situation financière et sanitaire difficile, suite à l’instauration, depuis le 13 mars 2020, de l’état d’urgence dans le pays pour faire face à la propagation de la pandémie de la Covid-19.
Cette action, certes limitée dans le temps, a été organisée en coordination avec l’Association des étudiants marocains en Bulgarie, et a ciblé une cinquantaine d’étudiants et stagiaires marocains qui poursuivent leurs études ou leurs stages dans les universités et instituts bulgares, particulièrement ceux qui travaillaient pour payer leurs études et qui ont perdu leur emploi, et ceux parmi eux qui ne pouvaient plus recevoir d’aide de leurs familles à partir du Maroc.
Je tiens ici à préciser que compte tenu des difficultés de déplacement liées à l’état d’urgence, et pour éviter à nos concitoyens de se déplacer à la Chancellerie ou à la Résidence, le staff de l’Ambassade s’est déplacé, à plusieurs reprises, sur les lieux de résidence des bénéficiaires pour s’enquérir de leur situation et de leur santé, les assurer du soutien de l’Ambassade et leur apporter un peu de réconfort en leur offrant, à chacun, un panier contenant des produits alimentaires de première nécessité, de bonne qualité et en bonne quantité, ainsi que des boîtes contenant de la pâtisserie marocaine, des dattes et d’autres produits (ch’hiwat) appréciés particulièrement durant le mois sacré du Ramadan.
De plus, une attention particulière a été accordée -sous forme d’aide matérielle- à quelques Marocains souffrant de maladies chroniques ainsi qu’aux chefs de familles installés en Bulgarie et qui se sont retrouvés, du jour au lendemain en situation de chômage technique.