Omar Hilale : l’Initiative Atlantique, vecteur de transformation économique et politique du Sahel
La région du Sahel, actuellement vulnérable sur les plans économique et politique et considérée comme un sanctuaire du terrorisme, représente pour le Royaume une terre d’opportunités. L’Initiative Atlantique de Sa Majesté le Roi Mohammed VI est perçue comme une panacée pour la région du Sahel, car elle promet de transformer cette zone en un havre de stabilité économique et politique, propice au développement.
Omar Hilale, ambassadeur et représentant permanent du Royaume du Maroc auprès des Nations Unies, a déclaré dans son allocution que, selon les Nations Unies, un pays sans littoral présente un niveau de développement inférieur de 20 % à celui qu’il pourrait atteindre s’il avait un accès à la mer.
Le Sahel est classé par les Nations Unies comme la région la moins avancée d’Afrique. Toutefois, elle reste la plus prometteuse. La situation économique des pays du Sahel est ambivalente : les agences onusiennes et des rapports indépendants ont exprimé leur inquiétude, signalant que ces pays n’ont réalisé que 15 % de leurs objectifs de développement durable, alors qu’il ne reste que six ans avant l’échéance de 2030 fixée par l’Agenda des Nations Unies. D’un autre côté, les indicateurs économiques témoignent d’une certaine résilience, malgré les vulnérabilités climatiques et sécuritaires et la guerre imposée par les groupes terroristes Daech et Al-Qaeda. La stabilité politique et l’ouverture sur le monde apparaissent comme les seuls remèdes.
Paradigme économique
Entre 1990 et 2024, le PIB du Sahel a quadruplé. La région affiche un taux de croissance économique parmi les plus élevés d’Afrique, avec environ +4,8 % par an en moyenne depuis 2010. Le PIB combiné des pays du Sahel est estimé à 70 milliards de dollars, regroupant un ensemble d’entrepreneurs dynamiques qui constituent le tissu économique de la région. Le Sahel recèle d’importantes richesses, notamment dans les industries extractives, les énergies renouvelables et l’agroalimentaire. L’agro-industrie est appelée à devenir un levier de croissance significatif.
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Les pays enclavés du Sahel se caractérisent par un endettement modéré, à hauteur de 56 % du PIB en 2020, contre 66 % pour l’ensemble de l’Afrique. Le secteur agricole représente environ 30 % de la valeur ajoutée depuis les années 1990 et emploie plus d’un Sahélien sur deux en moyenne. L’agriculture occupe la première place dans le secteur économique du Sahel, représentant près d’un tiers du PIB et 75 % des emplois. La sous-région est un grand producteur de coton, de céréales et de bétail, et possède un potentiel important en produits horticoles, cultures oléagineuses et noix.
Omar Hilale a souligné la forte dépendance des pays du SAHEL vis-à-vis de l’extérieur, avec un déficit courant estimé à environ 8 % du PIB entre 2017 et 2019. Pour couvrir ces déficits, les pays du Sahel ont besoin d’aide extérieure. Ainsi, le Sahel est la région d’Afrique qui reçoit le plus d’aide publique au développement par rapport au PIB, avec 7 % en moyenne, et les transferts de la diaspora sont également significatifs, représentant 6 % du PIB.
Cependant, les investissements directs étrangers (IDE) sont faibles, environ 4 % du PIB, ce qui témoigne d’un climat peu propice aux affaires. Les pays à faible revenu sont concentrés dans la région du Sahel, et la crise sanitaire du COVID-19 a eu un impact négatif considérable sur l’économie déjà fragilisée du Sahel.
L’Initiative Atlantique s’inscrit dans une dynamique visant à résoudre les problèmes inhérents aux pays du Sahel, qui ont l’opportunité de bénéficier de ce projet visionnaire. En premier lieu, en tirant parti du corridor Atlantique et, par conséquent, des grands marchés mondiaux, et en second lieu, grâce à la mise en œuvre de 51 accords de coopération signés avec le Royaume entre 1999 et 2024, couvrant un large éventail de domaines, dont la lutte contre les changements climatiques, la formation et l’assistance technique, l’agriculture, la pêche maritime, la gestion hydraulique, la santé, le tourisme et le développement rural.
Sud-Global : initiative royale
Omar Hilale a souligné que les crises successives et juxtaposées ont fortement impacté et fragilisé l’Afrique. Ces turbulences mondiales, géopolitiques et pandémiques, ont eu un impact négatif sur l’aide au développement. L’Afrique s’est appauvrie, avec plus de 17 millions de personnes supplémentaires tombées dans l’extrême précarité.
L’Initiative Atlantique vient renforcer la coopération Sud-Sud avec les pays du Sahel dans divers domaines, tels que l’éducation, le développement social, les échanges culturels et religieux, la durabilité environnementale, l’adaptation climatique, l’économie bleue, etc.
Ce partenariat fructueux du Royaume avec les pays du Sahel concrétise la vision de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, exprimée dans son message aux Assemblées annuelles du Groupe de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international à Marrakech, le 13 octobre dernier : « Nous avons en particulier fait de la coopération Sud-Sud notre axe d’ouverture prioritaire et nous procédons en cela selon une démarche de co-développement avec les pays frères et amis du continent. »
Intégration régionale
Dans un monde globalisé, seules les économies intégrées régionalement pourront prospérer et survivre face à la concurrence des marchés et aux crises financières, énergétiques, alimentaires, sanitaires, entre autres.
Omar Hilale a déclaré que l’époque coloniale a morcelé l’Afrique du Nord et la région du Sahel, fragmentant leur zone géographique et leur ensemble géopolitique. Cette fragmentation, favorisée par les agissements politiques de l’Algérie, est remise en question par l’initiative royale, qui ambitionne de transformer les paradigmes géopolitiques entre les nations, passant du bilatéralisme à une nouvelle forme de multilatéralisme et d’intégration économique dans l’espace Sahel-Nord Afrique.
Cette initiative royale aspire à transformer le Sahel, actuellement vulnérable économiquement, politiquement et terreau de terrorisme, en un havre de stabilité et de développement économique. Ainsi, le Sahel ne sera plus perçu comme une immense barrière désertique séparant l’Afrique du Nord de la région sub-saharienne du continent, mais comme un pont de connectivité, de libre circulation, de prospérité et un moteur d’intégration régionale.
Autrefois, la région du Sahel était un carrefour des échanges commerciaux, connue sous le nom de « route des caravanes ». L’Initiative Atlantique ambitionne de la transformer en une autoroute de l’Atlantique, avec des objectifs de développement durable et des moyens modernes, en projets structurants et en nouvelles technologies.
D’envergure internationale, l’Initiative Atlantique vise à développer les liens, la coopération et les synergies intra-africaines du littoral, mais aussi avec les États des rives prospères des continents européen et américain.
L’Initiative Atlantique sera un pilier de la constitution de la ZLECAF (zone de libre-échange africaine). Ce nouvel espace Sahélo-atlantique ne constituera pas une concurrence aux institutions ou aires régionales ou subrégionales, mais une complémentarité vertueuse adaptée aux spécificités géographiques des pays sahéliens.