Palestine : Ce que le Maroc accomplit, ce que l’Algérie s’obstine à détruire et instrumentaliser
Par Hassan Alaoui
Le gouvernement algérien se découvre ces derniers temps une miraculeuse vocation de soutien et promoteur de la Palestine et du combat de son peuple. Tebboune a cru détourner ses dirigeants du Maroc, récupérer avec un lamento digne d’un crocodile en larmes les souffrances des Palestiniens. Sans vergogne, en privant le peuple algérien de lait et de produits de bases il « offre » la bagatelle de 100 Millions de dollars à Mahmoud Abbas ( Abou Mazen) pour se concilier ses bonnes grâces, non sans vitupérer le Royaume du Maroc et son Roi qui, l’Histoire l’atteste avec force, n’ont jamais eu de cesse d’être réellement aux premiers rangs du soutien à un Etat palestinien vivant en harmonie aux côtés d’Israël. Face au l’affolant dénigrement du Maroc par le gouvernement algérien jouant sur le dos des Palestiniens, ceux-ci ont exprimé leur désaccord total et dénoncé la manœuvre dilatoire. Car on ne se joue pas , jamais de la dignité du Maroc.
Ce qui se passe à Gaza ne réjouit personne, tant s’en faut et le Maroc est évidemment le premier touché par l’escalade dramatique qui, encore une fois, prend des allures de tragédie. Le ministère marocain des Affaires étrangères de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger a exprimé samedi soir son inquiétude et appelé vigoureusement à l’arrêt des hostilités. Dans un communiqué, « le ministère souligne que le Royaume du Maroc, dont le Souverain, Sa Majesté le Roi Mohammed VI préside le Comité Al-Qods, appelle à éviter davantage d’escalade et à rétablir le calme pour que la situation ne dégénère pas, épargnant ainsi à la région d’autres tensions qui compromettent les chances de paix ». L’appel lancé par le Maroc ne sacrifie à aucune ambiguïté ; il traduit une position qui a toujours été celle du Royaume. A la limite, on peut dire qu’elle s’impose du fait que le Roi Mohammed VI est le Président du Comité Al-Qods, instance suprême de solidarité agissante créée il y quelques années sous l’impulsion de feu Hassan II en étroite coopération avec des pays arabes. Le même communiqué réitère avec force cette ce soutien sans faille : « Tout en réitérant ses positions constantes soutenant les droits du peuple palestinien, le Royaume du Maroc affirme que la solution durable au conflit entre les deux parties, palestinienne et israélienne, réside dans l’établissement d’un État palestinien indépendant vivant côte-à-côte avec l’État d’Israël dans la sécurité et la paix »
La position du Maroc à l’égard de la cause palestinienne, on ne le dira jamais assez, est marquée au sceau de la constance. Plus que tout autre pays, ou autant que les plus importants du monde arabe, le Maroc a forgé et érigé une doctrine de l’engagement qui, au-delà des slogans et des barguignages, s’est imposée comme une règle incontournable. En 1974 , l’ors du Sommet arabe organisée à Rabat auquel feu Houari Boumediene avait pris part, et au cours duquel soit dit en passant il avait annoncé solennellement son « soutien indéfectible au Maroc pour libérer le Sahara du joug espagnol », le Roi Hassan II réussit ce qu’on avait appelé le « coup de théâtre » du Sommet : réconcilier le Roi Hussein de Jordanie et Yasser Aarafat, tous deux en grave brouille depuis septembre 19770, autrement le fameux Septembre noir qui avait opposé les forces jordaniennes et palestiniennes et donné lieu à Amman même à un carnage de triste mémoire.
Au même Sommet arabe de Rabat, les pays participants avaient pris la décision solennelle de reconnaître et hisser l’OLP ( Organisation de libération de la Palestine) comme l’unique représentant du peuple palestinien avec à sa tête Yasser Arafat, écartant ainsi Georges Habache du FPLP ( Front populaire de libération de la Palestine) et Nayef Hawatmeh, leader du FDLP ( Front démocratique de la Palestine d’obédience trotskiste. C’est à Rabat donc que le mouvement palestinien a connu sa magnifique consécration et que la communauté mondiale en a pris acte. Le Roi Hassan II, tout à sa volonté de bien coordonner le soutien arabe et international au peuple palestinien organisera par la suite au Maroc pas moins d’une dizaine de Sommets arabe et islamique tout au long des décennies. Rabat, Fès et Marrakech étaient devenues les capitales incontournables des rencontres des chefs d’Etat et de gouvernements de la Ligue arabe.
C’est peu dire que le Maroc, par la voix du Roi Hassan II et quasiment jusqu’à sa disparition en juillet 1999, était le porte-drapeau de la lutte pour la libération et la constitution d’un Etat palestinien. Plus : il était au cœur des événements croisés entre d’une part les Etats-Unis qui présidaient – sous Jimmy Carter, Ronald Reagan et Bill Clinton notamment – au devenir des négociations israélo-palestiniennes. Au lendemain de la signature des fameux accords de Camp David, en septembre 1978 suite à un long et interminable processus de rencontres entre les parties en conflit, Anouar El Sadate, président de l’Egypte et signataire des accords de paix avait été isolé, violemment pris à partie et méprisé. « L’Homme de la paix avec Israël » connaissait une disgrâce qu’il était manifestement l’hostilité et la cible à la fois de certains chefs d’Etat arabes comme Hafez al-Assad de Syrie, Saddam Hussein d’Irak et Mouâmmar Kadhafi de Libye, ainsi que des Frères musulmans d’Egypte qui finiront par l’assassiner le 6 octobre 1981…
Le Maroc terre bénie de la paix
Le processus de paix israélo-arabe dut passer par mille et une voies, emprunter des chemins tortueux, des navettes des responsables des deux parties entre le Moyen Orient et Washington. Or, le Roi Hassan II, dont l’entregent et la présence même au cours de ces négociations étaient significatifs, reconnus par la communauté internationale, loués. Il n’avait de cesse d’apporter son précieux soutien, d’engager sa propre personne. Il était plus qu’impliqué et bille en tête il était devenu de le parangon attitré du combat diplomatique palestinien. Des deux côtés, arabe et palestinien, on lui rendait hommage tant et si bien qu’à chaque séquence de négociation israélo-arabe, les protagonistes qui faisaient le voyage de retour de Washington chez eux au Moyen Orient, ils sacrifiaient à un rituel devenu obligation : s’arrêter à Rabat pour informer le Roi Hassan II des résultats de leurs rencontres aux Etats-Unis. Sadate comme Itzhaq Rabin – assassiné à son tour par un extrémiste juif – et Shimon Peres en illustrèrent des cas, une manière d’hommage à l’homme, au Roi qui, défrayant la chronique, prenant sur lui- était devenu le héraut de la paix, le conciliateur réaliste, le défenseur de cette thèse courageuse de coexistence de deux Etats, Israël aux côtés de la Palestine, pacifiés…
Quant aux visiteurs de l’ombre travaillant dans la même lignée pour la paix, alors que la tension extrême dominait tout le Moyen Orient, ils étaient légion : de Moshe Dayan, jusqu’à Nahum Goldman, en passant par Henry Kessinger, Jean Daniel ami de tous et autres…Dans cette perspective, on doit rappeler cette réflexion faite en son temps par Bill Clinton, le président des Etats-Unis qui s’est le plus impliqué dans le processus de règlement du problème palestinien avec le Roi Hassan II et qui est une manière d’hommage à ce dernier : « C’est une bonne chose que les Israéliens s’arrêtent au Maroc avant leur retour à Tel-Aviv. Connaissant mon ami Hassan II, je suis sûr qu’il fera le maximum pour les encourager à suivre la seule voie qui conduit à la paix et comme il connaît très bien les deux parties, je suis convaincu qu’il leur prodiguera les meilleurs conseils… » ! Venant du président des Etats-Unis, première puissance mondiale, un tel hommage, donne jusqu’à nos jours même la mesure de la confiance exprimée au Roi du Maroc et de la gratitude envers lui, pour l’immense mission entreprise en faveur de la paix au Moyen Orient.
Le vibrant hommage de Bill Clinton à Hassan II
En 1988, le Roi Hassan II prenait sur lui d’organiser à Casablanca l’un des plus importants Sommet de la Ligue arabe pour, entre autres, réintégrer l’Egypte exclue depuis 1979 suite aux Accords de Camp David, inviter le président Hosni Moubarak devenu président d’Egypte après Sadate, réconcilier les irréductibles ennemis que furent Saddam Hussein et Hafez al-Assad, Hassan II, jouant le Missi dominici entre les récalcitrants, a réussi le coup de force de les réconcilier et de préparer la fameuse plate-forme arabe de ce qui deviendra ensuite les préparatifs de la fameuse Conférence internationale de Madrid sur la paix israélo-palestinienne, aux pourparlers d’Oslo qui, discrets mais prometteurs, durèrent plusieurs mois avant la rencontre célèbre en 1993 à la Maison Blanche sous l’égide de Bill Clinton. Un pas considérable, un accord majeur dans lequel la main du Maroc fut plus que porteuse, déterminante. Après le succès de ce Sommet arabe de Casablanca qui vit la présence de la quasi-totalité des chefs d’Etat arabes, notre pays sortira auréolé par son action, par le modus operandi royal et l’adhésion des chefs d’Etat arabe. Comme le souligne Abdellatif Filali, ancien ministre des Affaires étrangères et ancien Premier ministre de Hassan II, le « Sommet de Casablanca fut un succès pour Hassan II toujours soucieux de convaincre ses collègues d’avancer dans la voie du compromis ».
En décembre 2000 , Clinton tenta de nouveau de faire renouer le dialogue entre Yasser Arafat et Ehoud Barak devenu Premier ministre en Israël et y parvint presque. Le président américain, tout à sa bonne volonté de parvenir à un accord sur la création de l’Etat palestinien avant de quitter la Maison Blanche , encouragé par le Roi Hassan II et de Hosni Moubarak, se rendit même à Gaza et prit part à une réunion du Conseil national palestinien. En réunissant les deux parties, il propose l’ébauche d’un Plan de règlement qui tient en si peu de mots : 96% de la Cisjordanie soient restitués aux Palestiniens et qu’Israël en retire ses troupes dans un délai de trois ans pour les remplacer par une force internationale qui protégerait l’Etat hébreu en cas de violation de l’accord, l’Etat palestinien étant totalement démilitarisé. Le plan stipulait également le retour des réfugiés palestiniens en Palestine exilés depuis 1948, ce qui constituait un véritable défi pour Israël, mais s’inscrivait dans l’ordre d’idée des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptées après la Guerre des six Jours de juin 1967.
Abou Mazen ( alias Mahmoud Abbas) et Farouk Kaddoumi étaient d’accord avec ce plan de Clinton et poussaient leur leader dans le sens de l’acceptation de ce qu’on a appelé par la suite la « chance historique » et que le Roi Hassan II qualifiera comme « Un tiens bon vaut mieux que deux tu l’auras » ! Le doute, la méfiance s’étant installés avec l’arrivée dans la scène à Gaza des groupes qualifiés de « terroristes », l’entrée en lice du Hezbollah de Hassan Nasrallah, soutenu et armé par l’Iran, les Jihadistes qui ont débordé al-Fatah et le Hamas, la Palestine est en lambeaux, devenue territoire réduit à une peau de léopard, où des contradictions suprêmes paralysent et pulvérisent le semblant d’Autorité qui reste encore. Gaza est devenue l’enjeu des intérêts opposés des puissances régionales, le miroir où se reflètent les ambitions dérisoires et ubuesques d’un gouvernement algérien qui n’a jamais rien accompli pour le peuple palestinien et qui se découvre subitement une vocation de son soutien.