PLF 2023 : les jeunes auto-entrepreneurs dénoncent des dispositions « aberrantes »
Les dispositions fiscales du projet de loi de finances au titre de l’année 2023 (PLF 2023) suscitent de vives polémiques.
Considérées comme un gage de la relance économique du royaume, les nouvelles mesures du PLF sont vivement défendues par le gouvernement. Toutefois, elles sont loin de faire l’unanimité et déplaisent aux auto-entrepreneurs ainsi qu’aux personnes inscrites au régime de la contribution unique (CPU) qui les considèrent comme un lourd fardeau venant mettre à mal leur secteur d’activité .
Lutter contre le salariat déguisé et faire face aux vulnérabilités de l’emploi, telles sont quelques unes des vocations du projet de loi de finances 2023. Des objectifs majeurs que le gouvernement aspire à concrétiser à travers de nouvelles mesures fiscales qui consistent notamment en l’augmentation de l’IR pour l’auto-entrepreneur.
En effet, le PLF 2023, prévoit d’exclure le surplus du chiffre d’affaires annuel, dépassant cinquante mille dirhams et réalisé pour des prestations de service avec le même client.
A cet effet, l’Impôt sur le revenu, fixé auparavant à 0,5 cent pour les entreprises industrielles et à un pour cent pour les sociétés de services, passera à un taux de trente pour cent sur le chiffre d’affaires annuel réalisé avec un seul client et dont le montant dépasse les 50.000 dirhams.
Une hausse « énorme » qui n’a pas été du goût des jeunes auto-entrepreneurs qui ont dénoncé des mesures « aberrantes » et « illogiques », qui impacteront de plein fouet le secteur, plongeant ainsi bon nombre de ses acteurs dans la précarité.
Il convient de rappeler, à cet égard, que le Maroc recense désormais près de 375.000 auto-entrepreneurs. Ainsi, la contribution du secteur au développement socio-économique du royaume n’est pas des moindres.
En effet, le statut d’auto-entrepreneur a été mis en place, dès le départ, pour résoudre la problématique du chômage et celle de l’informel. De ce fait, le secteur joue un rôle crucial dans l’entrée des jeunes sur le marché de travail et l’intégration du secteur informel. Sachant que le royaume ambitionne d’atteindre 4 millions de professionnels.
« Des ambitions qui pourraient, néanmoins, être revues à la baisse, en raison des mesures prévues dans le PLF 2023, susceptibles d’entraver le développement du secteur. », estiment les professionnels. Néanmoins, le gouvernement se montre rassuré et considère ces dispositions fiscales comme un gage de la préservation du statut de l’auto-entrepreneur.
PLF 2023: Un moyen de lutte contre l’évasion fiscale
Protéger les salariés, encourager les auto-entrepreneurs à diversifier leur clients et surtout faire face aux invasions fiscales ainsi qu’au contournement du salariat, autant d’arguments avancés par l’exécutif pour justifier les mesures du PLF 2023.
Dans ce sens, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a indiqué , lors d’un point de presse, le mardi 25 octobre, que « le statut de l’auto-entrepreneur est utilisé pour contourner le salariat et ses charges. », signalant que ces mesures visent plutôt à préserver le statut de l’auto-entrepreneur au Maroc.
Elle, a par ailleurs, souligné que ces dispositions interviennent pour lutter contre le « phénomène » du salariat déguisé qui permet aux employeurs de payer moins d’impôts et de charges salariales.
D’ailleurs, de nombreuses entreprises encouragent leurs nouvelles recrues à basculer vers le régime auto-entrepreneur, pour justement ne pas avoir à payer les charges sociales. Mais aussi pour pouvoir, à tout moment, mettre fin à la collaboration si celle-ci n’est plus satisfaisante pour l’une ou l’autre partie.
Peu convaincus par cet argumentaire officiel, les auto-entrepreneurs, notamment les jeunes s’estiment lésés par cette mesure « unilatérale », qui préserve, selon eux, les acquis du patronat au détriment de leurs intérêts.
A cet égard, les auto-entrepreneurs soulignent que « l’arme devait plutôt s’orienter vers les entreprises, et non vers les jeunes dont le seul soucis est de gagner leur vie ».
De son coté, Zakaria Fahim, fondateur de l’Union des Auto-Entrepreneurs Bidaya, conteste cette mesure qu’il qualifie d’illogique. « On ne pénalise pas tout un régime parce qu’il y a quelques fraudeurs », a-t-il précisé. Soulignant que le montant des 50.000 de chiffre d’affaire annuel, fixé par le gouvernement, représente l’équivalent de près de 4.500 DH par mois. « Si on déduit les charges, on comprendra qu’on vise un chiffre d’affaire de 2.500 DH par mois. C’est tout simplement illogique de taxer quelqu’un qui réalise ce petit montant par mois avec le même prestataire ? », a-t-il déploré.