La police « verte » débarque au Maroc: missions vastes et moyens d’action limités
Le Maroc se dote d’une police de l’environnement. La nouvelle, abondamment relayée et commentée par les médias en février dernier, date d’installation de la première promotion d’inspecteurs de l’environnement, a suscité des réactions mitigées.
Entre les partisans, qui y voient un pas vers le durcissement du contrôle et de la répression des infractions environnementales, et les sceptiques qui remettent en cause l’utilité, l’efficacité et surtout l’applicabilité de ce concept, la police « verte » intrigue.
Selon le décret n°2-14-782 relatif à l’organisation et aux modalités de fonctionnement de la police de l’environnement, cet organe se charge de la prévention, du contrôle, de l’inspection, de la recherche, de l’investigation, de la constatation des infractions et de la verbalisation prévus par les dispositions des lois relatives à l’environnement.
Quid du sort de ces procès-verbaux et de la suite donnée à ces « affaires »? Les infractions constatées donnent-elles lieu à des poursuites pénales ou autres? Les dommages sont-ils réparés? Sur ce point, on reste sur notre faim.
« Malgré leur appellation, les policiers de l’environnement sont des fonctionnaires civils dont la vocation est de constater, sensibiliser, prévenir, anticiper et dissuader plutôt que de réprimer ou sanctionner », explique à MLJ la secrétaire d’État chargée du Développement durable, Nezha El Ouafi.
Cela ne diminue en rien la valeur ni l’apport de cette nouvelle entité qui travaille en collaboration avec la police nationale, la Gendarmerie royale et le ministère de la Justice, pour constater les différentes infractions environnementales, notamment celles techniques liées à la pollution atmosphérique et aux études d’impact avant la réalisation des projets.
Se déplaçant à bord de véhicules de couleurs noire et verte, siglés en arabe et en français « police de l’environnement », les inspecteurs procèdent également à des contrôles dans les décharges, les stations d’épuration des eaux usées ainsi que dans les véhicules transportant des déchets dangereux.
Présentes dans toutes les régions du Royaume, les brigades « vertes » ont, sûrement, du pain sur la planche.
Pollution des cours d’eau et de l’air, pillage de sable, abattage des arbres, déchets chimiques et industriels jetés dans la nature, décharges anarchiques, braconnage…Les problématiques et les enjeux sont énormes et impliquent plusieurs départements et organes gouvernementaux et non gouvernementaux, d’où la nécessité de coordonner l’action et de délimiter les compétences et les champs d’intervention des uns et des autres pour éviter toute cacophonie ou dispersion des efforts.
Face à l’immensité et la rudesse de la tâche, la question des équipements et de la logistique nécessaires pour accomplir comme il se doit ce travail d’inspection, se pose avec acuité. Pour couvrir les périmètres géographiques dont ils ont la charge, être présents partout où l’environnement est mis en danger et accomplir leur travail dans de bonnes conditions, les policiers de l’environnement devraient, bien entendu, être dotés de tous les moyens matériels et logistiques nécessaires.
« En effet, c’est un concept qui reste à échafauder. Pour ce faire, des réunions de concertation seront tenues avec différentes parties prenantes afin de trouver un modus operandi, une vision commune sur les prérogatives et les modalités d’action de cette entité ainsi que les moyens à mettre à sa disposition pour qu’elle puisse mener à bien les missions qui lui sont dévolues », souligne Mme El Ouafi.
Grosso modo, poursuit-elle, « le premier bilan est plutôt positif. Les brigades de l’environnement installées sont actives, vont sur le terrain, dressent des PV et sont de plus en plus connus des gens ».
En matière de connaissance, de diffusion de l’information et de sensibilisation au travail et au rôle de la police de l’environnement, beaucoup reste à faire. Peu visibles sur le terrain et dans les médias, ces auditeurs de l’environnement risquent de ne pas être pris au sérieux par les contrevenants, encore moins par les citoyens lambda.