Présentation à Copenhague du modèle énergétique marocain
Le modèle énergétique marocain et les projets structurants à l’œuvre dans le Royaume ont été jeudi au centre d’un focus animé par un panel d’intervenants nationaux et étrangers, dans le cadre de la 19ème édition de l’Africa Energy Forum (AEF), dont les travaux se tiennent du 7 au 9 juin au Bella Center à Copenhague.
Ce focus, portant sur les projets énergétiques au Maroc durant les cinq années à venir, a été ponctué par une présentation donnée par le Secrétaire général du ministère de l’Energie, des mines et du développement durable, Abderrahim El Hafidi, dans laquelle il a livré un exposé sur les grands axes qui façonnent la transition énergétique nationale et sa déclinaison en programmes et projets phares.
L’intervenant a, de prime abord, rappelé que la stature internationale du Maroc, un pays du sud dépourvu de ressources énergétiques fossiles et avec des moyens financiers relativement limités, repose sur son engagement, depuis fort longtemps, dans la voie du développement durable.
Il a indiqué que le Maroc a vécu une situation énergétique critique en 2008 en raison de l’augmentation de la demande et d’une dépendance quasi-totale de l’étranger pour son approvisionnement énergétique avec un taux de dépendance qui avoisinait les 98%.
Sa demande énergétique, encore dominée par les énergies fossiles, a enregistré durant les 10 dernières années un taux de croissance moyen de 6,5%, qui s’explique par son développement socioéconomique et la généralisation de l’électrification rurale qui dépasse actuellement 99,2%, a-t-il dit.
Pour faire face à ces challenges, le Royaume a adopté, depuis 2009, une stratégie énergétique qui constitue une solution appropriée à ses défis de sécurité d’approvisionnement, d’accès à l’énergie et de préservation de l’environnement, a-t-il noté.
Cette transition a été accélérée en décembre 2015 par la forte impulsion donnée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, dans la déclaration faite lors de la COP21 à Paris, consistant à porter la part des énergies renouvelables de 42% de puissance installée, prévue en 2020, à 52% à l’horizon 2030.
Dans cette perspective, les programmes nationaux porteront sur une capacité additionnelle de production d’électricité de sources renouvelables d’environ 10100 MW, dont 4560 MW de source solaire, 4200 MW de source éolienne, et 1330 MW de source hydrique, ce qui permettra de réduire la dépendance énergétique du Royaume, qui dépassait les 98% en 2008, à moins de 82% en 2030.
Aujourd’hui, a-t-il souligné, le Maroc est engagé sur la voie de la transition énergétique, les énergies renouvelables représentent 34,5% dans la puissance installée en fin 2016.
Or, la montée en puissance des énergies renouvelables dans le système électrique national nécessite la mobilisation de moyens flexibles de production pour faire face à leur intermittence, a-t-il soutenu, ajoutant que les technologies de stockage représentent la première source de flexibilité à l’avenir.
Pour ce faire, le Maroc a opté pour ce moyen de flexibilité dans le développement de la centrale solaire NOOR 1 de 160 MW qui offre un stockage de 3h et pour les centrales NOOR 2 et 3 de 350 MW avec un système de stockage d’au moins 7h, a-t-il précisé.
Le renforcement des réseaux électriques étant essentiel pour une intégration massive des énergies renouvelables, le Maroc a adopté cette approche en vue de surmonter les défis liés à l’ouverture des réseaux électriques de basse et moyenne tension, a-t-il signalé.
Et c’est dans ce cadre précisément que s’inscrit le développement des centrales à cycle combiné fonctionnant au gaz naturel comme étant le moyen de flexibilité le plus approprié, a-t-il poursuivi, relevant que le Maroc a lancé sa feuille de route pour le développement du gaz naturel (GNL).
Soutenant que l’intégration énergétique régionale permet de réduire les contraintes techniques de l’intermittence des énergies renouvelables, il a indiqué que le Maroc a développé les infrastructures électriques avec l’Espagne (1400 MW) et l’Algérie (1200 MW) et compte développer de nouvelles capacités additionnelles, notamment avec le Portugal (1000 MW), l’Espagne (700 MW) et la Mauritanie.
M. El Hafidi a fait observer que le Maroc a opté pour une révision à mi-parcours de la stratégie de l’efficacité énergétique nationale adoptée en 2009, et préconisé l’accélération de la cadence des actions d’efficacité énergétique à travers une vision stratégique, ciblant les secteurs à grand potentiel en terme de consommation énergétique finale.
Il s’agit notamment du transport, premier secteur consommateur d’énergie finale avec une part de 38%, suivi du secteur du bâtiment qui consomme le tiers de l’énergie finale, et de l’industrie avec une part de 21% de la consommation énergétique finale, sachant que l’agriculture et l’éclairage public font également partie des secteurs à cibler par les mesures d’efficacité énergétique.
Selon lui, l’objectif d’économie, fixé à l’horizon 2030, est de 20% et une stratégie nationale d’efficacité énergétique est en cours de finalisation, dont la première phase sera mise en œuvre dans le cadre d’un contrat programme entre l’Etat et l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE) et les collectivités territoriales pour les cinq années à venir.
Il a signalé qu’en plus de l’exploitation des sites de production d’énergie électrique de source solaire, éolienne et hydraulique au Maroc, l’utilisation de la biomasse comme source d’énergie renouvelable est essentielle à l’élaboration d’une politique énergétique durable.
A cet effet, a-t-il poursuivi, le Maroc prévoit le lancement d’une étude visant à analyser les flux de matières des différentes filières de la biomasse, afin d’apprécier leurs potentiels de valorisation énergétique et de mettre en place une stratégie nationale à l’horizon 2030, qui sera déclinée en plans d’actions au niveau régional à court, moyen et long termes pour les filières de l’agriculture, foresterie, déchets (solides et liquides).
Soucieux de maîtriser les technologies prometteuses de valorisation des ressources énergétiques renouvelables et d’être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques, le Royaume, a-t-il rappelé, a entrepris un programme de création d’Instituts de formation aux métiers des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (IFMEREE), dont le premier est déjà opérationnel à Oujda, alors que les travaux de construction du deuxième Institut à Tanger ont été lancés.
S’agissant de la Recherche&développement, il a évoqué la réalisation, par l’Institut de recherche en énergie solaire et énergies renouvelables (IRESEN), d’un complexe baptisé « Green Energy Park » qui, s’étalant sur 8 hectares à Benguerir, renferme des laboratoires de pointe et plusieurs plateformes de tests et de projets-pilotes.
En parallèle, le Maroc a étoffé son arsenal juridico-institutionnel par une série de lois permettant l’ouverture au secteur privé du marché de la production et de la commercialisation d’électricité produite à partir de sources renouvelables, outre la prochaine création d’une Autorité de régulation du secteur de l’électricité indépendante, a-t-il dit, ajoutant que la nouvelle reconfiguration du paysage institutionnel énergétique permettra, avec d’autres leviers, d’atteindre l’objectif annoncé des 52%.
Toujours est-il que cette reconfiguration s’est traduite par l’élargissement des prérogatives de l’Agence marocaine pour l’énergie durable (MASEN) au développement de toutes les énergies de sources renouvelables et la focalisation des missions de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE), a-t-il expliqué.
Fort de sa stabilité politique et de son grand potentiel en énergies renouvelables, le Royaume poursuit sereinement ses efforts en vue de renforcer son positionnement et d’attirer de plus en plus les investisseurs et les institutions financières internationales, pour participer davantage au développement de grands projets à forte croissance dans les domaines des énergies renouvelables, a-t-il soutenu.
Concernant la coopération Sud-Sud, il a souligné que le Maroc, capitalisant sur son expertise en électrification rurale, se positionne actuellement via l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) comme un acteur principal sur le marché de l’électricité en Afrique grâce au savoir-faire acquis à travers ses expériences en matière de planification, d’exploitation, de maintenance et d’électrification rurale.
Aujourd’hui, l’ONEE est présent dans plusieurs pays africains amis, dont le Sénégal, la Gambie, le Tchad, la Mauritanie, le Mali, le Sierra Léone et le Cap Vert, a-t-il dit.
Il a relevé que la nouvelle concrétisation de la vision de SM le Roi d’une Afrique maîtresse de son destin et confiante en son avenir s’est traduite par la signature, en mai dernier, d’accords relatifs au projet du Gazoduc Nigéria-Maroc, mégaprojet conçu par les Africains pour les Africains.
Et de conclure que le pipeline Nigéria-Maroc aura un impact positif direct sur plus de 300 millions d’habitants et permettra d’accélérer les projets d’électrification dans toute la région de l’Afrique de l’Ouest, servant ainsi de base pour la création d’un marché régional compétitif de l’électricité.