Récolte d’avocats : Une performance controversée par la consommation d’eau
La filière marocaine de l’avocat connaît un essor sans précédent cette saison, avec une récolte prévue de plus de 90 000 tonnes, dont plus de 80 000 tonnes destinées à l’exportation vers les marchés européens. Néanmoins, cette dynamique soulève des interrogations quant à l’impact environnemental de cette culture, notamment en termes de consommation d’eau, un sujet qui tient à cœur la politique du gouvernement.
L’eau, ressource de plus en plus précieuse, fait l’objet d’une préoccupation alors que les changements climatiques menacent d’aggraver les situations de pénurie. D’ici à 2050, près de 5 milliards de personnes pourraient être confrontées à des difficultés d’accès à l’eau, selon un rapport des Nations Unies. Ce constat met les autorités marocaines en état d’alerte, leur imposant de trouver un équilibre entre le développement économique et la gestion durable de l’eau.
La récolte des avocats, qui a commencé en septembre et se poursuivra jusqu’à décembre, se concentre actuellement sur les variétés « Zutano », « Fuerte » et « Bacon », tandis que la très demandée variété « Hass » sera récoltée plus tard dans la saison. Ces variétés génèrent d’importantes opportunités économiques, notamment pour les travailleurs saisonniers dans les régions côtières de Larache et Moulay Bousselham, où une estimation suggère qu’il faut jusqu’à 24 travailleurs pour charger un camion de taille moyenne d’avocats.
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Les experts s’interrogent cependant sur les besoins en eau de cette culture. La consommation d’eau des avocatiers, jugée excessive, est souvent citée comme une source de préoccupation. En effet, selon des études, la culture de l’avocat nécessiterait en moyenne 2 000 litres d’eau pour produire un kilogramme d’avocats, soit quatre fois plus que pour la production d’oranges ou de tomates. Cette alarming data a été mise en avant par le Water Footprint Network, une organisation néerlandaise qui milite pour une gestion durable des ressources hydriques.
Cependant, des acteurs du secteur, tels que l’Association marocaine de l’avocat, réfutent ces inquiétudes, affirmant qu’en raison de la proximité avec l’océan Atlantique, les régions de Loukkos et Gharb ne souffrent pas de pénurie d’eau. Ces professionnels soutiennent que la récolte d’avocats ne contribue pas de manière significative à un épuisement des ressources hydriques dans ces zones.
Le climat tempéré observé lors de cette saison a par ailleurs favorisé une récolte de haute qualité, propice aux premières expéditions d’avocats vers l’Europe, où la demande est en constante augmentation. Cette situation apporte également des bénéfices aux marchés locaux, qui se réjouissent d’avoir accès à des produits frais.
Cependant, les défis sont réels. Plus de 25 % des cultures dans le monde sont cultivées dans des régions aux ressources en eau gravement compromises. Par exemple, la culture des amandes, qui nécessite également des quantités d’eau considérables, souffre de cette crise. Entre 2004 et 2015, il a été estimé qu’en moyenne, la production d’une seule amande ne nécessitait pas moins de 12 litres d’eau.
Dans les zones arides, où la culture de l’avocat se développe de manière intensifiée, chaque hectare d’avocatiers requiert jusqu’à 100 000 litres d’eau irriguée par jour. L’ONG WaterAid souligne l’importance de l’irrigation pour soutenir la croissance de la production d’avocats. Cependant, cette dépendance à l’irrigation et aux changements climatiques soulève la question de la durabilité de ces pratiques agricoles et de la sécurité alimentaire dans plusieurs régions du continent africain.
L’ONG a également mis en exergue que l’inéluctabilité du changement climatique affecte l’approvisionnement futur en eau, soulevant des enjeux de gestion à long terme des ressources hydriques. « Une approche axée sur le court terme peut nuire à la durabilité de nos ressources en eau », a-t-elle averti.