Réforme de la Justice : le bras de fer continue entre ministre et avocats

Le climat juridique au Maroc est en proie à de vives tensions, suscitées par les réformes du ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi. Le bureau de l’Ordre des Avocats a annoncé, lors d’une réunion publique tenue le week-end dernier, son intention d’organiser des manifestations à travers tout le pays. Ces actions sont destinées à dénoncer ce qu’ils qualifient de « manœuvres visant à saper la justice et à porter atteinte aux acquis juridiques et constitutionnels des citoyens marocains ».

La profession d’avocat au Maroc se trouve aujourd’hui sur le front d’un combat jugé essentiel pour la défense de l’État de droit. Le communiqué de l’Ordre des Avocats, souligne les inquiétudes grandissantes face aux réformes introduites par Ouahbi, qui affectent non seulement la pratique professionnelle de la justice, mais remettent en question la pérennité des droits fondamentaux des citoyens.

Au cours de cette réunion, le bureau a examiné les propositions législatives en cours, parmi lesquelles figure l’adoption d’un projet de loi sur la procédure civile, qui a déjà été soumis à la Chambre des représentants. De plus, le projet de loi sur la procédure pénale est également au centre des débats, son renvoi au mécanisme législatif ayant été perçu par les avocats comme un signal inacceptable concernant l’intention du ministre d’imposer des changements significatifs sans consultation adéquate des professionnels du droit.

L’appel à la mobilisation est clair : les avocats sont encouragés à continuer d’afficher des pancartes de protestation, tout en participant à des manifestations qui s’annoncent comme un tournant décisif dans la lutte pour défendre leur profession. Ce mouvement se traduira notamment par une rencontre nationale, prévue pour le 21 septembre à Rabat, ainsi qu’une conférence de presse programmée le 18 octobre dans le Barreau de Marrakech, au sujet du projet de loi sur la procédure pénale.

Par ailleurs, l’Ordre a également demandé aux avocats ayant reçu des avis de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale de se regrouper pour discuter d’une réponse collective aux réformes prévues. En effet, les changements envisagés dans la politique de sécurité sociale des avocats suscitent des inquiétudes quant à la couverture maladie de base dont bénéficient ces derniers. Les avocats, qu’ils soient hommes ou femmes, ainsi que leurs familles, dépendraient fortement de l’entraide publique pour couvrir leurs besoins en matière de santé, et toute modification dans ce domaine serait perçue comme une menace sérieuse à leur bien-être, souligne le communiqué.

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Les avocats estiment que les réformes en cours ne prennent pas en compte la réalité du terrain et les spécificités de leur profession. Ils craignent qu’en l’absence d’un dialogue constructif et d’une véritable consultation, ces réformes ne soient qu’un moyen pour la tutelle de renforcer son emprise sur la profession juridique, risquant ainsi d’affaiblir l’indépendance des avocats et, par conséquent, celle de la justice elle-même.

La situation s’est détériorée au fil des mois, les tensions s’accumulant avec chaque nouvelle annonce de réforme. Les avocats s’inquiètent d’une dérive vers un système judiciaire qui pourrait favoriser la compromission des droits humains et la primauté du droit. D’après leurs déclarations, les réformes portent atteinte à la confiance du public dans les institutions judiciaires et augurent des perspectives sombres pour l’avenir du système judiciaire marocain.

Dans un contexte où la justice devrait être un bastion des droits civils, le rejet systématique des initiatives législatives du ministre Ouahbi par les avocats révèle un fossé grandissant entre les décideurs politiques et les professionnels du droit. Cela soulève des interrogations sur l’orientation future des politiques judiciaires marocaines et leur impact sur la société civile.

Les avocats continuent donc d’appeler à un dialogue constructif et à une vraie concertation entre le ministère de la Justice et les représentants de la profession. La peur d’une régression des acquis démocratiques fait l’unanimité au sein de la profession, dont les membres sont bien déterminés à se battre pour « défendre les principes fondamentaux » sur lesquels repose l’État de droit au Maroc. La mobilisation annoncée ne doit pas seulement être perçue comme une simple réaction aux réformes, mais comme une déclaration d’intention des avocats de protéger la justice et les libertés fondamentales des citoyens marocains.

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