Réforme de la TVA : le gouvernement dans un jeu d’équilibre
Le Conseil de gouvernement, sous la présidence d’Aziz Akhannouch, se réunira, le jeudi 26 décembre 2024, pour étudier plusieurs projets de décrets, dont une révision majeure de la Taxe sur la valeur ajoutée. Cette réforme fiscale a pour objectif de clarifier les règles en vigueur, renforcer les finances locales et soutenir l’économie circulaire, tout en préservant le pouvoir d’achat des citoyens.
Le Conseil de gouvernement, présidé par Aziz Akhannouch, se réunira demain pour examiner plusieurs projets de décrets, dont une révision importante de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cette réforme vise à ajuster les dispositions fiscales en vigueur, afin de clarifier les règles de la TVA, de stimuler l’économie et de favoriser une gestion fiscale plus transparente, en conformité avec le Code général des impôts. Toutefois, la question qui se pose est de savoir si cette révision de la TVA saura réellement renforcer les ressources des collectivités territoriales tout en préservant le pouvoir d’achat des ménages dans un contexte économique déjà fragilisé par l’inflation.
Le projet de loi de finances 2025 pourrait constituer une réponse stratégique aux défis socioéconomiques exacerbés par la pandémie de Covid-19 et l’inflation alimentée par la guerre en Ukraine. En mettant l’accent sur la réforme de la Taxe sur la Valeur Ajoutée, cette réforme fiscale viserait à renforcer les ressources financières des collectivités territoriales, tout en abordant des préoccupations liées à la décentralisation et à l’autonomie locale. Au-delà des ajustements fiscaux, la révision de la TVA soulèverait des questions sur son impact à long terme sur l’économie, la gouvernance locale et le pouvoir d’achat des citoyens.
Une des préoccupations majeures du PLF 2025 serait de soutenir le pouvoir d’achat des ménages, fortement impacté par l’inflation et la crise économique. Dans cette optique, plusieurs mesures, notamment des exonérations de TVA, viseraient à réduire les coûts des produits de consommation essentiels. En exonérant de TVA certains produits alimentaires comme la viande, le riz ou l’huile d’olive, le gouvernement chercherait à atténuer l’impact de l’inflation sur les ménages les plus vulnérables. Ces mesures de soutien direct pourraient être complétées par des subventions pour le gaz butane, le sucre et la farine, ainsi que par des soutiens sociaux pour les familles en situation de précarité.
Selon les experts, ces exonérations de TVA et subventions ne constitueraient que des solutions à court terme pour pallier la hausse des prix. Elles permettraient de maintenir un certain niveau de stabilité des prix, mais ne résoudraient pas les causes sous-jacentes de l’inflation et de la volatilité des prix des produits alimentaires. Selon les experts, le Maroc devrait, à long terme, développer une stratégie visant à renforcer la production locale, en particulier dans le secteur agricole, pour réduire la dépendance aux importations et garantir une sécurité alimentaire durable. De plus, la TVA resterait un outil puissant pour la politique fiscale, mais son impact sur le pouvoir d’achat dépendrait largement de la manière dont elle serait utilisée. Un levier fiscal mal utilisé pourrait entraîner des effets indésirables, notamment en termes de distorsion de concurrence ou d’injustices sociales.
Quelle approche pour le financement local ?
La révision de la TVA constituerait un levier essentiel pour améliorer les ressources des collectivités territoriales. L’augmentation de la part de la TVA allouée à ces collectivités, passant de 30% à 32%, pourrait sembler marginale, mais représenterait un apport substantiel de 3 milliards de dirhams supplémentaires chaque année. Cette augmentation des ressources serait particulièrement importante dans un contexte où les budgets locaux seraient souvent insuffisants pour répondre aux besoins croissants des populations locales en matière de services publics (éducation, santé, infrastructure) et de développement économique.
Selon les chiffres officiels, le Maroc aurait enregistré en 2023 des recettes records de 316,26 milliards de dirhams de TVA. Cette manne supplémentaire pourrait fournir aux régions un moyen de financer des projets de développement local : construction d’infrastructures, soutien à la création d’emplois locaux, mise en place de services publics de proximité, et promotion d’un développement durable. Cependant, l’impact de cette mesure dépendrait largement de la capacité des collectivités à gérer et allouer ces fonds de manière efficace.
Les experts insistent sur le fait que l’enjeu principal réside dans le fait que cette révision ne soit pas simplement vue comme une solution temporaire, mais comme une véritable opportunité de décentralisation fiscale. En effet, une telle augmentation de la part des recettes de TVA allouée aux collectivités territoriales permettrait de leur accorder davantage d’autonomie financière, réduisant ainsi leur dépendance aux subventions de l’État central. L’objectif serait de stimuler les économies locales et de rapprocher l’action publique des besoins concrets des populations, en renforçant le pouvoir d’initiative des collectivités à l’échelle locale.
Quid des entreprises ?
Une autre dimension clé de la révision de la TVA dans le cadre du PLF 2025 concerne la promotion de l’économie circulaire et la gestion des déchets. Pour rappel, afin de favoriser la valorisation des déchets, la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) a proposé une TVA spécifique appliquée uniquement sur la marge des produits plastiques recyclés, limitant la mesure aux déchets plastiques bruts et aux produits contenant plus de 95 % de plastique recyclé. Cette initiative vise à dynamiser le secteur du recyclage, tout en réduisant l’usage de plastiques vierges et en soutenant une économie plus verte.
Dans le domaine agroalimentaire, la CGEM a également proposé une réduction de la TVA de 20 % à 10 % pour les produits de l’agro-industrie, dans le but de soutenir un secteur clé de l’économie marocaine et de réduire les coûts pour les consommateurs. De plus, des mesures favorisant l’industrie du thon et des conserves de poisson ont été suggérées, telles que l’exonération de TVA sur les commissions des intermédiaires d’assurances, ainsi que l’exonération des droits de douane sur le thon congelé.