Réussir la relance économique et conforter un nouveau contrat social, mots-clés du discours royal au parlement
Le Discours que SM le Roi Mohammed VI a adressé vendredi à l’occasion de l’ouverture de la 1ère session de la 5ème année législative de la 10ème législature est venu mettre en tête des priorités la réussite de la relance économique, tout en confortant un nouveau contrat social, a affirmé le politologue et universitaire, Mustapha Sehimi.
Dans une déclaration à la MAP, M. Sehimi a indiqué que le discours adressé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI au parlement, à partir du Palais Royal de Rabat, « présente un relief particulier » parce qu’il intervient à la dernière année législative de l’actuelle législature et à un moment exceptionnel lié à la crise sanitaire, sociale et économique.
« C’est un discours sur l’état des lieux », a poursuivi M. Sehimi, « mais aussi sur des axes de réformes qui vont se décliner au-delà de l’année en cours et de 2021 » et s’inscrire, ainsi, dans le moyen terme.
Le politologue a, dans ce sens, évoqué l’ensemble des « dysfonctionnements et déficits » qui ont impacté l’économie nationale et l’emploi et auxquels a fait référence SM le Roi dans Son discours.
« C’est bien l’état des lieux qui pose problème et c’est précisément face à cette situation, que le Souverain propose trois axes devant fonder les politiques publiques dans les mois et les années à venir », a-t-il précisé.
Le premier axe, qui consiste en la relance de la machine économique, comprend tout ce qui a été fait jusqu’à présent par l’Etat avec les mobilisations de moyens qui ont été assurés, notamment les prêts garantis par l’Etat, ainsi que les divers avantages et facilités accordés aux PME et au tissu productif, a expliqué M. Sehimi, qui a également souligné que cette politique prend forme avec la mise sur pied du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement, dont le Souverain a annoncé la création.
« C’est une institution nouvelle qui va être créée et à ce titre, elle aura un rôle clé dans la relance économique et la promotion de l’investissement », a-t-il relevé, notant qu’il s’agit là « d’un fonds qui va aider au financement du secteur productif et accompagner les grands projets dans le cadre d’une formule de partenariat public-privé ».
« Ce fonds est doté d’une allocation budgétaire de 15 milliards de dirhams, mais il faut bien voir que cette dotation aura certainement un effet levier », a estimé M. Sehimi, « soit un effet d’entraînement parce qu’elle va conduire des partenaires marocains et internationaux à accompagner, suivant des formules diverses, les interventions du fonds et par là même, contribuer aux projets d’investissement ».
« Il y a des priorités qui seront retenues évidemment, parce que le fonds devra préciser et orienter ces interventions », a ajouté à ce propos le politologue, faisant savoir que celui-ci pourra même s’accompagner de fonds sectoriels spécialisés qui lui seront rattachés.
Revenant sur les domaines considérés prioritaires par le Souverain, M. Sehimi a cité « la restructuration industrielle, l’innovation, les activités à fort potentiel, les PME, les infrastructures, l’agriculture et le tourisme », s’arrêtant particulièrement sur l’agriculture.
« Elle n’est pas oubliée bien au contraire elle est, elle aussi, priorisée, du fait qu’elle est un secteur ne pouvant que dynamiser la relance économique », a insisté M. Sehimi, mettant en avant l’un des leviers essentiels de la nouvelle stratégie agricole qu’est « l’opération de mobilisation d’un million de hectares de terres agricole collectives ».
« Il y a là un grand programme de valorisation du potentiel agricole », a affirmé le politologue, mettant en exergue l’évaluation du « volume des investissements attendus, dans le cadre de ce projet de valorisation et de mobilisation d’un million de hectares, estimé à 38 milliards de dirhams à moyen terme, c’est-à-dire dans les deux, trois, quatre ans à venir ».
« Il s’agit là d’un effort d’investissement important qui va générer une augmentation de deux points du PIB supplémentaires », a rappelé le politologue, mais c’est aussi un programme générateur d’emplois, « ce qui ne manque pas d’intérêts compte tenu de la situation de l’emploi dans le monde agricole ».
Quant au deuxième grand axe de ce discours, celui de la question sociale, M. Sehimi a indiqué que, pour SM le Roi, « le souci a toujours été que la dynamique de développement économique soit articulée à la promotion du secteur et à l’amélioration des conditions de vie des citoyens ».
« Sur ce plan là, le Souverain a été précis et a donné les axes de cette réforme sociale », qui consistent à étendre la couverture médicale obligatoire d’ici la fin 2022, de manière à ce que « 22 millions de bénéficiaires additionnels accèdent à l’Assurance maladie de base, ce qui est important », a jugé l’universitaire.
« Le deuxième axe, c’est la généralisation des allocations familiales à près de sept millions d’enfants et au profit de trois millions de familles », a-t-il noté, enchaînant avec l’éligibilité de la population active qui n’a pas droit aujourd’hui à une pension, à un système de retraites et l’accès à l’indemnité pour perte d’emploi, au profit de ceux qui ont perdu un emploi.
Abordant la gouvernance, troisième axe du discours royal, M. Sehimi a déclaré que « le Souverain a insisté, à ce sujet, sur le fait que la bonne gouvernance soit corrélée à la reddition des comptes, ce que prévoit d’ailleurs la Constitution de 2011 ».
Le discours royal « a insisté pour que toutes les institutions de l’Etat et les entreprises publiques soient mieux gérées et qu’elles soient un vecteur de développement et non pas un frein, à ce développement », a-t-il relevé à cet égard.
« Il a aussi appelé à une mise à plat des participations de l’Etat et du secteur public et a confirmé la création d’une agence chargée de la supervision des participations de l’Etat et du suivi de leurs performances », a poursuivi M. Sehimi.
« Ce sont là des mots-clés, parce qu’il ne s’agit pas simplement de superviser, il s’agit aussi d’évaluer leurs performances », a indiqué le politologue et universitaire, avançant que « dans la loi de finance 2021, il est prévu un « dégraissage » du secteur public et semi-public avec la liquidation de près de 70 entreprises publiques qui ne sont plus viables depuis des années ».
Il est aussi question, a dit M. Sehimi, de l’insistance du Souverain sur un nouveau contrat social, avec une nouvelle culture. « Une culture de management et un changement dans les rapports des établissements publics », a-t-il souligné, notant que le discours de SM le Roi « offre des perspectives et des axes d’orientation, pas seulement pour ce gouvernement qui finit son mandat dans moins d’un an, mais également pour les années à venir ».
« Et c’est là l’aspect le plus important de ce discours, ces axes devant inspirer et fonder les politiques publiques dans les mois et années à venir », a conclu M. Sehimi.
(Avec MAP)