Sahara marocain: La situation de « ni paix, ni guerre » imposée à la région n’est plus acceptable au vu de son coût élevé pour les peuples
Les intervenants à une conférence organisée, mardi à Rabat, sous le thème : « La zone tampon : un moyen de gestion du cessez-le-feu ou une bombe à retardement » ont été unanimes à souligner que la situation de « ni paix, ni guerre » imposée à la région en raison du conflit artificiel autour du Sahara marocain, n’est plus acceptable au vu de son coût élevé pour les peuples de cette partie du monde.
Les participants à cette conférence organisée par le Centre marocain des études stratégiques (CMES), en partenariat avec l’Agence Maghreb Arabe Presse (MAP), ont fait savoir que la persistance de la situation d’immobilisme autour de ce dossier ainsi que les manœuvres du front séparatiste du polisario visant à brouiller les faits et à changer le statu quo exigent une intervention ouverte sur toutes les possibilités afin de mettre fin à « l’hémorragie » sociale, économique, politique et sécuritaire dont souffre l’ensemble de la région des décennies durant.
Dans ce sens, le professeur des relations internationales à l’Université Mohammed V de Rabat, Miloud Loukili, a indiqué que les provocations auxquelles s’adonnent les éléments du polisario à l’est du dispositif de défense marocain visent clairement à changer la donne sur le terrain et à brouiller la situation historique qui a toujours été régie par les résolutions onusiennes des décennies durant, ce qui incite la communauté internationale à assumer ses responsabilités entières et à œuvrer d’urgence pour arrêter les dépassements du front séparatiste soutenu par l’Algérie.
M. Loukili a, par ailleurs, relevé dans une présentation intitulée « Lecture dans l’accord du cessez-le-feu et la création de la zone tampon » que la « Minurso » est appelée à accomplir le rôle onusien qui lui est assigné et d’œuvrer, dans l’immédiat, à mettre un terme aux agissements du polisario visant à imposer le fait accompli qui entrave l’accord du cessez-le-feu et qui mène l’ensemble de la région vers une éventuelle guerre aux conséquences irréparables, estimant que le Royaume est en droit de riposter à ces actes provocateurs.
De son côté, Tajeddine El Husseini, professeur des relations internationales à l’université Mohammed V de Rabat, a passé en revue, dans une présentation intitulée « Les perspectives de la gestion de la zone tampon », les scénarios possibles pour l’avenir de la question du Sahara marocain à la lumière des différents développements qui pointent à l’horizon, à savoir le scénario du statu quo avec tout ce qui en découle de points négatifs ainsi que celui de la guerre ouverte qui impliquera, à coup sûr, l’Algérie, puisqu’elle est le soutien essentiel du front séparatiste, un scénario à éviter à tout prix, selon M. El Husseini, compte tenu de son coût humain, matériel et politique sur les deux parties.
Les autres scénarios consistent en le déclenchement d’une guerre limitée qui permettra de résoudre la situation militairement avant de passer au règlement politique dans le cadre de la négociation, ou la révision des conventions militaires ratifiées sous l’égide de l’ONU, ce qui « dépoussiéra » les changements sur le terrain, qui ont affecté la zone tampon au profit du polisario au su et au vu de la Minurso, a-t-il ajouté.
M. El Husseini a également précisé que le différend avec les ennemis de l’intégrité territoriale « n’est pas un conflit de frontière mais d’existence », appelant l’ensemble des Marocains à se mobiliser davantage et à faire front uni pour défendre l’intégrité territoriale du Royaume.
Dans la même veine, Abdelkhalek Touhami, professeur à l’Institut national de statistique et d’économie appliquée (INSEA), a affirmé, dans un exposé intitulé « la perpétuation du conflit et le coût de ni paix ni guerre », que les pays de la région du Maghreb qui enregistre les niveaux les plus bas en terme d’échanges commerciaux dans le monde perdent selon une étude du Fonds monétaire international entre deux à trois points de la croissance du PIB chaque année en raison notamment des conflits et de l’absence de l’intégration régionale, dont le conflit artificiel autour du Sahara marocain constitue l’une des causes principales.
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M. Touhami a également relevé que la division affaiblit d’une manière considérable l’attractivité de l’investissement pour l’ensemble des pays de la région de même qu’il compromet le développement des infrastructures, notamment du projet de l’autoroute maghrébine qui est resté « lettre morte » et qui conduit à l’incapacité d’exploiter les ressources naturelles et saborde le rêve de se doter un jour d’une devise maghrébine unifiée, contraignant ainsi chaque pays à « chercher une intégration à part dans d’autres régions ».
Pour sa part , Mohamed Benhammou, professeur des relations internationales à l’université Mohammed V de Rabat a relevé l’importance de procéder à une « vérification conceptuelle » pour comprendre la situation actuelle et dissiper la confusion que le polisario a tenu à exploiter, à l’instigation de l’Algérie, pour ériger des concepts erronés qui l’aident à réaliser quelques « acquis » dérisoires.
Il a, dans ce contexte, fait observer que « l’indulgence de la Minurso a encouragé les séparatistes à se tenir à un jet de pierre du dispositif de défense marocain », notant que la communauté internationale doit réévaluer le rôle de cette mission onusienne conformément à une vision plus réaliste.
Dans une présentation intitulée « la zone tampon : la bombe à retardement et la recrudescence des dangers et menaces », M. Benhammou a souligné qu’il est temps de franchir une nouvelle étape qui verra le changement de la dénomination de ce mécanisme onusien et d’œuvrer pour que ses missions se limitent à surveiller le cessez-le-feu et à délimiter les champs de mines tout au long de la zone tampon.
En clôture de cette conférence, à laquelle ont pris part nombre de personnalités du monde académique et des médias, le CMES a appelé, en guise de recommandations, à la nécessité de procéder à une évaluation de la Minurso après que l’ONU ait dépassé l’option du référendum et que les parties se soient engagées dans le processus politique en vue d’aboutir à une solution mutuellement acceptable.
Le Centre a estimé que les missions de la Minurso doivent se limiter à la surveillance du cessez-le-feu et à la réduction du risque d’explosion des mines et d’autres munitions non-explosées.
Il a, en outre, souligné que le dispositif de défense marocain contribue grandement à la garantie de la paix et la stabilité dans la région ainsi que dans le sud européen, relevant qu’il ne sera donc pas permis de transformer la région en une zone grise et un sanctuaire pour les organisations criminelles et terroristes.
Il a également appelé l’ONU à assumer sa responsabilité entière puisque son mutisme et indulgence ont encouragé le polisario à persister dans les violations, insistant que la zone tampon et le reste des zones allant jusqu’aux frontières internationales maroco-algériennes relèvent du territoire marocain faisant partie du dispositif de défense du Royaume.
Le Centre a, enfin, exprimé son rejet de tout changement du statut juridique et historique de la zone à l’Est du dispositif de défense du Maroc puisqu’elle est sous souveraineté marocaine, ajoutant que le Royaume n’a pas cédé ce territoire mais l’a remis volontairement à l’ONU comme moyen pour gérer le cessez-le-feu.