Le Sahara : Il y a 42 ans l’Accord de Madrid de décolonisation incontestable et irréversible
Par Hassan Alaoui
L’Histoire ne saurait être compatible d’aucun cynisme, et certainement pas de celui des dirigeants algériens dans leur opération de sabotage et de sape contre le Maroc. Le 14 novembre 1975, cinq jours seulement après le succès de la Marche verte, Maroc, Espagne et Mauritanie signaient, à Madrid, l’Accord tripartite qui mettait fin à l’occupation du Sahara par l’Espagne.
Après 45 ans de colonisation et d’occupation, des décennies de revendication par le Maroc de son territoire, au niveau de l’ONU, de la Cour internationale de justice (CIJ), de l’OUA et de plusieurs instances, et en marge de l’agonie du maréchal Franco, hostile au droit du Maroc de récupérer ses provinces, l’accord de Madrid clôturait une période pour en libérer une autre. Décolonisation au sens littéral, accomplie en conformité avec l’article 6 de la Charte et de la Résolution 1514 des Nations unies, votée en 1961 et qui prenaient acte de la résolution d’un conflit territorial, entre les parties concernées, directement et de manière négociée. Depuis le déclenchement officiel de ce qu’on appelle « l’affaire du Sahara » en 1975, les gouvernements algériens qui se sont succédé jusqu’ici, leurs services et leurs propagandistes, tous dans un même mouvement de mystification, n’ont cessé de jouer sur une confusion majeure.
Celle de l’usage ou du mésusage volontaire du concept de décolonisation. Avec cette conséquence malheureuse que certains gouvernements et Etats du monde se sont laissé fourvoyer. Pis : les responsables de notre diplomatie nationale n’avaient pas, voire jamais accordé une attention particulière à ce point précis, celui de la formule de décolonisation qui est à la propagande algérienne – à ses stipendiés comme Zuma, Chissano et autres Mugabe – ce que le pivot est à une architecture. Tant et si bien que, d’une négligence à un simple et piteux abandon de la part de nos responsables, on arrive à ce paradoxe que ce sont les obligés algériens du polisario qui veulent écrire notre histoire, la déforment à leur guise et, grave, l’utilisent contre nous.
L’irrésistible fantasme d’accéder à l’Atlantique
Passe encore que notre dossier fut, en cette époque, à peine bien défendu, qu’il changeât de mains et d’acteurs ; mais qu’un point essentiel comme celui du processus de décolonisation fasse, aujourd’hui, l’objet d’une violation sémantique à dessein, d’une ignorance de notre part et serve d’argument à nos adversaires patentés, voilà qui nous interpelle. Le dossier du Sahara, finalement, n’oppose que le seul Maroc et la seule Algérie, celleci l’utilisant depuis le début – déjà 1973 en catimini – comme une «guerre de tranchées» avec l’objectif (in)avoué de s’approprier un territoire marocain, depuis la nuit des temps, d’y installer une «république fantoche», la «rasd» et de s’accaparer de ses richesses, sans compter l’irascible rage d’encercler le Maroc, dans ses frontières méridionales, par l’Atlantique et ses frontières à l’est…Autrement dit, toute la géopolitique peaufinée, articulée et défendue, depuis des siècles, par nos Rois et notre histoire, tomberait dans l’escarcelle d’une Algérie qui, non contente de posséder en abondance pétrole et gaz, voudrait encore mettre la main sur les ressources du Maroc.
En fait donc de «décolonisation» que les gouvernements algériens n’ont cessé d’agiter, depuis quarante-deux ans maintenant, il s’agit d’un projet criminel de recolonisation des provinces du sud marocain par l’Algérie. La théorie des Nations unies, défendue par la 4e Commission chargée des questions politiques spéciales et de décolonisation, est de faciliter l’accession des « peuples coloniaux » à l’autonomie. C’est inscrit et, bel et bien, exprimé par les législateurs et juristes de l’organisation internationale, notamment à travers la Charte de l’ONU et son chapitre 6. Mieux : la Quatrième commission de l’ONU, dans le cas de différend opposant une puissance occupante et un pays revendiquant un territoire – comme ce fut le cas explicite de l’Espagne et du Maroc – , apporte officiellement son soutien à toute solution, à toute formule négociée, autrement dit elle entérine ce qu’on appelle de nos jours la «solution politique consensuelle» ! Le 14 novembre 1975, après le succès de la Marche verte et deux semaines marathoniennes et alors que le général Franco agonisait, le Maroc, l’Espagne et la Mauritanie signaient donc l’Accord tripartite de Madrid. Sa finalité ? Ni plus, ni moins que rétrocéder au Maroc le territoire du Sahara marocain que l’Espagne occupa en deux temps, à la fin du XIXème siècle et en 1930.
L’accord de Madrid illustrait une décolonisation en bonne et due forme, sans guerre ni effusion de sang. Il s’inscrivait dans la droite ligne de la doctrine de l’ONU. Que les dirigeants algériens, sans foi ni loi, l’aient combattu et – leur presse aidant – le combattent avec acharnement relève d’un singulier cynisme. Pourquoi ? Parce que la même Algérie – tout à l’honneur de son peuple – n’a pas seulement combattu, glorieusement, pour arracher son indépendance, mais elle a négocié, deux années durant, avec la France, à Melun, à Evian ensuite et Dieu sait que la séquence des négociations sur le volet du Sahara algérien a constitué une dure partie, parce que les représentants du GPRA ( Gouvernement provisoire de la République algérienne) avaient pour consigne de ne «céder aucun pouce» du Sahara… Il convient de rappeler que le gouvernement français de l’époque manifestait de réelles intentions de conserver le Sahara algérien, pourvu de ressources pétrolières et gazières dont il entendait faire un département français à jamais.
Un débat furieux à l’Assemblée nationale, des lobbies et groupes de pression caractérisaient donc cette inclinaison pour séparer l’Algérie en deux. En témoigne le livre, publié comme un samizdat par Alain Peyrefitte – qui deviendra un grand ministre du général de Gaulle – pour revendiquer, officiellement, la partition de la future Algérie en deux territoires, le Sahara revenant, bien entendu, à la France. Le livre portait le nom : «Faut-il partager l’Algérie ?». Le Roi Mohammed V, conscient de la gravité des enjeux, plus que solidaire du peuple algérien, s’opposa violemment à cette politique française et milita pour l’unité de la future Algérie comme aussi pour la récupération de son Sahara face à l’irrédentisme des nostalgiques. Quand la même France lui proposa, comme l’on sait, de récupérer les territoires de l’est marocains, depuis des siècles et contestés – Tindouf, Saoura, Bechar entre autres -, Feu Mohammed V eut cette réponse d’une générosité à toute épreuve : «Je préfère attendre la libération de nos frères algériens et discuterais avec eux cette question» !
En juillet 1962, l’Algérie a accédé à l’indépendance et ses dirigeants, qui avaient donc obtenu, à l’arraché, l’incorporation de leur Sahara et des territoires marocains, ignoraient jusqu’à la revendication du Maroc sur son Sahara, déposée sur les bureaux des Nations unies bien avant, autrement dit, au lendemain de l’Indépendance, en 1956. Quant au polisario, instrument créé ex nihilo par les prédécesseurs du DRS, en 1974, personne ne contestera que ses dirigeants sont originaires du Maroc, ni plus ni moins, manipulés et devenus créatures des services algériens…
La contradiction algérienne
Pourquoi donc ce qui était bon pour l’Algérie avec la France, ne le pourrait être pour le Maroc avec l’Espagne ? Pourquoi le Maroc ne serait-il pas dans son droit et dans «ses bottes», comme l’est une Algérie qui, au mépris du bon voisinage avec le Maroc, s’épuise à lui contester son Sahara ? D’autant plus que l’Espagne, en colonisant le Sahara marocain, n’avait pas trouvé un territoire vide, sans âme et sans vie, mais des populations qui ont été, de tous temps, attachés aux Rois du Maroc, accomplissaient leurs prières au nom de Dieu priant pour le Sultan, échangeaient avec une monnaie frappée à l’effigie du même Sultan, bref toute une histoire et une mémoire façonnées dans une interdépendance qui n’a jamais fait défaut… Invoquer, de nos jours encore, la décolonisation du Sahara marocain, répandre cette folle qualification d’un «Maroc colonial», dire et redire , et faire répéter par d’autres que le «Sahara constitue la dernière colonie dans le monde», occulter la vérité historique et politique au nom d’un expansionnisme qui ne dit pas, ou plutôt dissimule mal son nom, se contredire, eu égard au principe de décolonisation négociée, tient in fine du machiavélisme de mauvais aloi et constitue, à coup sûr, une insulte au peuple marocain.
La décolonisation du Sahara marocain, en vertu de l’article 1514 des Nations unies et en application de la Charte de l’ONU, a obéi au principe de négociation directe, entre la puissance occupante – l’Espagne – et l’ayant droit qui n’est autre que le Maroc, le seul pays qui a eu à faire face à deux empires coloniaux, la France et l’Espagne, qui a dû négocier, à deux reprises, sa libération avec des puissances différentes… Le Maroc a considérablement investi au Sahara, depuis sa libération, en 1975, et plus particulièrement, depuis l’avènement du règne de S.M. Mohammed VI. L’année 2016 a vu la mise en œuvre d’un programme de plus de 77 milliards de dirhams qui sont mobilisés pour doter les provinces du sud de chantiers majeurs…Exactement dans l’esprit de la 4ème Commission qui stipule que dans le cadre d’une autonomie, la rétrocession du territoire à son ayant-droit s’accompagne d’une obligation imposée à ce dernier : assurer les conditions de développement et d’émancipation politique et économique aux populations concernées.
C’est peu de dire que l’Initiative d’autonomie avancée soumise au Conseil de sécurité en avril 2007, le plan de développement économique en cours dans nos provinces du sud apportent la meilleure réponse à nos détracteurs… Et Sa Majesté le Roi Mohammed VI, dans son dernier discours, du 6 novembre, commémorant le 42ème anniversaire de la Marche verte, vient de le réitérer magistralement.