Santé en crise : Ne faut-il pas faire appel à la voix de la sagesse au lieu de la répression ?

La manifestation des professionnels de la santé à Rabat, transformée en un véritable drame, laisse un goût amer dans l’âme de ceux qui ont été témoins de cet événement tragique et suscite de vives inquiétudes.

Les images des forces de l’ordre utilisant des canons à eau et des matraques contre ceux qui, ironiquement, se battent en première ligne pour sauver des vies, sont profondément troublantes. Or en cette période où le Maroc est sous les projecteurs internationaux, ce spectacle de répression n’est pas seulement inapproprié mais aussi extrêmement dommageable. On a eu droit à ce spectacle le mercredi 10 juillet, alors que les forces de l’ordre ont fait usage de canons à eau pour disperser une manifestation pacifique de plusieurs centaines de professionnels de la santé venus des quatre coins du pays. Rassemblés au centre de Rabat, ces manifestants protestaient contre ce qu’ils considèrent comme « un manque de réactivité de la part du gouvernement face à leurs revendications ».

Ce qui devait être une manifestation pacifique a rapidement dégénéré. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des professionnels de la santé dispersés et bastonnés par les forces de l’ordre. Cette démonstration de force brutale intervient dans un contexte de tensions croissantes, alors que la coordination syndicale du secteur de la santé multiplie les grèves et les manifestations. Ces mouvements de protestation font suite à une série de grèves et de manifestations régionales, initiées en réponse à la non-application de l’accord signé en janvier dernier entre le ministère de la Santé et la coordination syndicale. D’autant plus que les syndicats accusent le gouvernement d’avoir agi unilatéralement en promulguant trois décrets sans consultation préalable ni fourniture de données détaillées, exacerbant ainsi la frustration parmi les professionnels de santé.

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Ainsi et après plusieurs jours de grève, la coalition syndicale de la santé a organisé, mercredi, une manifestation pour protester contre un accord relatif à la hausse des salaires qui reste suspendue. Ces revendications, formulées depuis plusieurs mois, ont poussé les professionnels à paralyser les hôpitaux publics, mettant ainsi en péril la vie des citoyens nécessitant un suivi. N’est-il pas ironique de constater que le Maroc, salué pour sa gestion exemplaire de la pandémie de COVID-19, son programme ambitieux de vaccination et ses initiatives pour moderniser le système de santé, voit maintenant son image ternie par de tels événements ? Ces succès avaient renforcé l’image du Royaume en tant que pays en développement dynamique et progressiste. Les récents événements à Rabat risquent de compromettre cette perception.

Par ailleurs, le chef de gouvernement a déclaré plusieurs fois que : « Nous avons réalisé des avancées majeures dans le domaine de la santé », mais n’est-ce pas le capital humain qu’il faut en premier écouter ? Derrière ces progrès se cachent souvent des professionnels de la santé épuisés, mal rémunérés et sous-estimés. Leur expertise, leur dévouement et leur compassion sont les piliers sur lesquels repose tout le système de santé. Pourtant, ils sont fréquemment négligés, leurs conditions de travail dégradées par des politiques budgétaires austères et une bureaucratie rigide. Ignorer leur voix et leurs besoins, c’est non seulement risquer de compromettre la qualité des soins, mais aussi aliéner ceux qui sont au cœur même du progrès médical. En ce sens, le véritable progrès commence par la reconnaissance et la valorisation de ces hommes et de ces femmes dévoués, car ils sont l’âme et la force motrice de tout système de santé durable.

D’ailleurs, les professionnels de la santé ont légitimement exprimé leur frustration face à des conditions de travail précaires, des salaires insuffisants et un manque de reconnaissance. Plutôt que de répondre par la répression, il est impératif que le gouvernement écoute ces voix et engage un dialogue constructif. La violence ne fait qu’exacerber les tensions et discrédite les efforts de réforme. La violence déclenche la violence et on peut s’attendre à des escalades. Il est crucial de rappeler que le droit de manifester est un pilier fondamental de toute démocratie. Les citoyens, y compris les professionnels de la santé, ont le droit de faire entendre leurs revendications pacifiquement.

En ces temps où le monde nous observe, il est plus que jamais essentiel de montrer le visage de tolérance de notre Maroc, le visage de dialogue et de respect des droits humains. Les manifestations des professionnels de la santé sont une opportunité pour le gouvernement de montrer qu’il est à l’écoute de ses citoyens et engagé à améliorer leurs conditions de vie. La réponse doit être empreinte de sagesse et de modération.

Faut-il rappeler que notre pays a accompli des progrès significatifs ces dernières années ? Mais ces avancées ne doivent pas être compromises par des actions répressives. Il est temps pour les gouvernants de faire preuve de leadership éclairé, de privilégier le dialogue et de rechercher des solutions pacifiques et durables aux problèmes soulevés par les professionnels de la santé. Autrement, c’est toujours le citoyen qui paie. Engageons-nous sur la voie du dialogue et de la compréhension mutuelle. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons continuer à bâtir un Maroc fort, uni et respecté sur la scène internationale. Le monde nous regarde, montrons-lui le meilleur de nous-mêmes.

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