Santé mentale : Amine Tahraoui dévoile des statistiques inquiétantes
Près de la moitié de la population marocaine, soit 48,9 %, pourrait souffrir d’un trouble mental au cours de sa vie, selon des données révélées par Amine Tahraoui, le nouveau ministre de la Santé, lors de la présentation du budget sectoriel au Parlement. La dépression se classe en tête des affections, touchant 26 % des cas, suivie des troubles anxieux (9 %), des troubles psychotiques (5,6 %) et de la schizophrénie (1 %).
Ce constat met en lumière une situation préoccupante dans un pays où les soins de santé mentale restent largement sous-développés. En effet, on compte un seul psychiatre pour 100 000 habitants, bien en deçà de la moyenne mondiale de 1,7. De même, le Maroc dispose de seulement 6,43 lits psychiatriques pour 100 000 personnes, alors que la norme mondiale s’élève à 13,3.
Outre le manque criant de ressources, le système de santé mentale marocain souffre également d’inefficacités structurelles. Un cinquième des lits existants ne sont pas utilisés, une situation attribuée à des pratiques d’hospitalisation inadaptées. La législation en vigueur, datant de 1959, est jugée obsolète par le ministre, qui appelle à une réforme urgente pour aligner les lois sur les standards internationaux et mieux répondre aux besoins actuels.
Conscient de l’ampleur des défis, Amine Tahraoui a dévoilé un plan de réforme visant à combler les lacunes du système. Parmi les mesures phares annoncées figure la création de 108 nouveaux postes spécialisés en santé mentale dès 2024. De plus, le ministre a souligné l’importance de former le personnel de soins primaires afin qu’il puisse mieux prendre en charge les patients souffrant de troubles psychologiques.
Un autre aspect crucial du plan est l’intégration de médicaments psychotropes modernes à la liste des traitements essentiels, une mesure destinée à élargir l’accès aux soins pour les personnes atteintes de maladies mentales.
Pour soutenir ces ambitions, le budget dédié à la santé et à la protection sociale sera augmenté de 1,9 milliard de dirhams en 2024, portant le total à 32,6 milliards de dirhams. Ces fonds serviront notamment à accélérer l’extension de la couverture médicale et sociale, tout en modernisant les infrastructures existantes.
La rénovation de 1 400 établissements de soins primaires figure parmi les priorités, parallèlement au renforcement des effectifs du secteur de la santé. À cet égard, 6 500 nouveaux postes devraient être créés d’ici 2025, une initiative qui vise à accroître la capacité du système de santé marocain à répondre aux besoins croissants de la population.
Un engagement face à une crise silencieuse
Le poids des troubles mentaux, souvent qualifiés de « crise silencieuse », appelle des réponses rapides et efficaces. Les engagements pris par Amine Tahraoui, bien qu’encourageants, s’inscrivent dans un contexte où les défis à surmonter sont multiples : manque de ressources humaines, sous-financement chronique et stigmatisation sociale des maladies mentales.
Cependant, l’élan réformateur du nouveau ministre et l’augmentation substantielle des budgets alloués témoignent d’une volonté politique de traiter ce problème de manière structurelle. Si ces projets sont réalisés, ils pourraient marquer un tournant décisif pour améliorer la prise en charge de la santé mentale au Maroc et réduire les inégalités d’accès aux soins dans ce domaine négligé.
Au-delà des aspects financiers et structurels, le succès de ces réformes repose sur la capacité des autorités à sensibiliser la population à l’importance de la santé mentale et à lutter contre les préjugés qui empêchent de nombreux citoyens de consulter un professionnel. Une approche holistique, combinant réformes législatives, renforcement des infrastructures et campagnes de sensibilisation, semble indispensable pour surmonter cette crise.
Le mandat d’Amine Tahraoui pourrait ainsi être un test décisif pour le gouvernement, appelé à traduire ses engagements en actions concrètes. La mise à jour des politiques publiques en santé mentale pourrait non seulement alléger la souffrance de millions de Marocains, mais aussi contribuer à un développement humain durable dans le pays.