« Scandale d’Etat » ou quand l’affaire Uber rattrape Emmanuel Macron
Par Hassan Alaoui
Le vice et la vertu ne vont jamais ensemble et le secret n’a pas bien été gardé. La France vit depuis dimanche 10 juillet une manière de Watergate.
Scandale, révélations terrifiantes suite à une enquête de 42 titres de la presse internationale mettant gravement en cause le président Emmanuel Macron, dévoilant ses relations sombres avec le groupe de Californie d’Uber, dont il a constitué depuis dix ans un défenseur fasciné contre vents et marées, une véritable curée et des soubresauts qui s’accumulent ! On évoque déjà l’idée du « feuilleton de l’été » appelé le Scandale Macron…
« Je ne suis pas un lobbyiste uberlien » ! Comme une sentence radicale, cette déclaration d’Emmanuel Macron, plongé dans une tourmente qui ne dit pas encore tout à fait son nom, nourrit encore le débat d’une affaire qui n’en finit pas de l’éclabousser voire de ternir son image. « Uber », système de transport taxi à travers une application lancé en 2009 à San Francisco ( Californie) par Travis Kalanick et Garett Camp avait comme on ne l’a que trop dit bouleversé le système du transport urbain et a mené une politique commerciale dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle était agressive.
Les tenants du nouveau système de transport manifestaient un engouement tel qu’ils étaient aveuglés par le succès de l’entreprise qui étalait ses tentacules partout dans le monde et écrasait à son passage les systèmes classiques de déplacement. « Uber », transporteur fétiche, fascinait également un ministre de l’Economie du gouvernement de gauche de François Hollande, en l’occurrence un certain Emmanuel Macron, fervent partisan du système californien qui préparait déjà, en catimini, sa montée en puissance pour accéder à la magistrature suprême.
A l’époque, on ne mesurait pas si bien que dans la vision globale de ce candidat potentiel, maître des horloges à Bercy, un projet américain du nom d’Uber allait prendre une si significative place. Non plus que très peu de temps après, à contre courant de son gouvernement et depuis 2014 précisément, il allait s’impliquer en personne dans une ou plusieurs campagnes de soutien, de forcing, de lobbyisme en faveur du groupe californien. Comme le loyal soldat, en tout cas un militant impénitent de la cause de Travis Kalanick, l’ancien ministre de l’Economie de François Hollande avait établi un système afin que ses propres collaborateurs et ses proches, disons son propre réseau, apportent leur soutien sans limite aux responsables d’Uber.
Un deal a été donc mis en œuvre et les responsables américains avaient tout de suite pignon sur rue, implantaient donc impunément leur système, écrasant ses concurrents français, défiant et moquant les décisions de la justice française, en imposant quasi violemment le service UberPop, condamné et jugé illégal par le parquet.
La presse qui s’était insurgée à l’époque n’hésitait pas à écrire que « Uber, attaquée et dénoncée a un allié secret de poids au sein du gouvernement. Son nom ? Emmanuel Macron, ministre de l’Economie ». Lui, le parangon de la vertu d’un gouvernement de gauche, se mobilisait en coulisse contre celui-ci, trahissait la confiance de son président de l’époque, se faisait l’avocat pro domo entre 2014 et 2016 en faveur de la société internationale de VTC, encourageait la déréglementation du marché dans le sillage d’une doctrine de violation de la Loi tout simplement. Les fondateurs d’Uber n’en revenaient pas de cet engouement d’un ministre, farouchement ambitieux et déjà hissé sur le parapet du pouvoir.
Le groupe Uber a bien entendu mis à profit ce soutien précieux, unique pour se propulser et écraser ses confrères français, n’était la gigantesque révolte – apparentée à un soulèvement – des chauffeurs de taxis et la décision de justice française d’interdire cette broyeuse machine californienne. Or, la vigilance de la police et des enquêteurs français de la répression contre la fraude, le fameux DGCCR a été irrésistiblement combattue par Uber.
Le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) composé de 42 organes, nous apprend que les autorités de répression se sont heurtés à un système de sécurité informatique dénommé « Kill Switch » ou coupe-circuit que l’entreprise Uber a activé qui est proprement un système illégal. « Les enquêteurs de la répression des fraudes, rapporte le quotidien français Libération, débarquent dans les locaux d’Uber dans le cadre d’une procédure judiciaire pour fouiller les ordinateurs. Mais tout ce sur quoi les agents de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) tombent, ce sont des écrans noirs. Comme si une coupure de courant venait de se produire ».
Emmanuel Macron savait-il tout cela ? A en croire les enquêteurs de l’ICIJ , des autorités de répression et des nombreuses preuves découvertes et dévoilées ici et là, le ministre de l’Economie du gouvernement Hollande, qui s’apprêtait à assumer de très hautes responsabilités au sommet de l’Etat, non seulement était au courant de telles « embrouilles », mais les encourageait à sa décharge, faisant de son Cabinet une manière d’officine de lobbying et de pouvoir d’influence, puisqu’il a exercé des pressions sur la quasi-totalité de ses collaborateurs pour, tel un agent de commerce, imposer le modèle Uber.
Les audiences accordées aux fondateurs américains de ce groupe ne participaient-elles pas d’une terrible tentative de subvertir la loi de la concurrence ? Parler d’un deal, comme la majorité des titres de la presse française a commencé à le faire depuis dimanche 10 juillet, c’est plutôt masquer un scandale d’Etat qui dévoile en fin de compte les coulisses et les secrets d’un règne « jupitérien » désormais en mal de réponse convaincante.
L’identification du macronisme au devoir de transparence et de vérité, est finie ! L’homme qui a pris le pouvoir en 2017, et en 2022 quasiment par effraction, avait enterré la légalité dans l’affaire d’Uber, notamment la fameuse loi du député du Parti socialiste (PS) Thomas Thévenoud, qui porte son nom et qui rendait un tant soit peu justice aux chauffeurs français de taxis face à la violence d’Uber, devenu un Etat dans l’Etat.