Sécheresse: Le Maroc passe à l’optimisation de la pression
La situation hydrique du Maroc ne cesse de s’aggraver. La rareté des précipitations pluviométriques accentue davantage le stress hydrique qui sévit au royaume. De nouvelles mesures d’optimisation de la pression d’eau potable sont prises par Lydec afin de gérer la pénurie d’eau. Les citoyens souffrent durement, le secteur agricole également. Une situation des plus inquiétantes qui remet en cause toutes les politiques agricoles mises en place jusqu’ici.
Tous les voyants sont désormais au rouge. Le changement climatique, couplé à un déficit pluviométrique structurel et une consommation galopante des ressources en eau, fait entrer le pays dans un quasi sinistre hydrique. La banque mondiale tire, d’ores et déjà, la sonnette d’alarme. « Le Maroc se trouve dans une zone à haute vulnérabilité climatique. », alerte-t-elle dans son rapport publié récemment. Le royaume est considéré ainsi comme l’un des pays les plus pauvres en eau à l’échelle mondiale. Preuve à l’appui, les bassins hydrauliques sont désormais à leur niveau le plus bas, notamment ceux qui approvisionnent la région de Casablanca-Settat.
Pour faire face à cette situation et optimiser la gestion de la distribution d’eau potable à Casablanca, Lydec a mis en place un plan d’action détaillé. Selon lequel, elle procédera à des opérations d’optimisation de la pression au niveau du réseau public d’eau potable, alimentant certains quartiers. C’est d’ailleurs ce qui a été annoncé dans un avis distribué aux clients. Une mesure qui sera appliquée à compter du 1er décembre.
Il convient de rappeler, à cet égard, qu’une réduction de 8% de la pression d’eau est déjà entamée, depuis le 29 août dernier, entre minuit et 5h du matin.
Milieu rural et provinces du Sud: Les zones les plus impactées
La situation hydrique est encore plus critique dans les zones rurales et les régions du Sud. Le manque de précipitations induit une baisse croissante du niveau des eaux souterraines. Plusieurs douars et zones éloignées sont durement touchés par la sécheresse. Abdel Majid Benasser, militant associatif de la ville de Zagora, explique ce déficit critique par une gestion aveugle de l’approvisionnement en eau notamment dans les provinces du sud-est du Royaume au cours des dernières années. Soulignant que le sud-est de la région se classe sous le seuil de pauvreté en eau. Outre la ville de Zagoura, d’autres provinces sont également touchées de plein fouet par la sécheresse sans merci.
A cet effet, 706 camions-citernes ont été mobilisés pour approvisionner en eau potable près de deux millions d’habitants répartis sur 75 préfectures et provinces.
Agriculture pluviale en souffrance
Les précipitations pluviométriques se font de plus en plus rares. Chose qui se répercute directement sur le secteur agricole et impacte fortement les cultures pluviales (Bour).
Considérée comme un pilier de la sécurité alimentaire du milieu rural, cette culture est la plus répandue au Maroc. Néanmoins, elle est extrêmement vulnérable aux sécheresses et à la pénurie d’eau, comme le souligne Mohammed Jalil, expert en changement climatique.
« L’agriculture pluviale reste prédominante avec presque 80 à 85% de la surface agricole utile (SAU) contre 15 à 20% de l’agriculture irriguée. », a-t-il expliqué.
De son côté, La Banque mondiale relève que l’agriculture pluviale emploie la majorité des travailleurs agricoles. Elle cite à titre d’exemple « la filière oléicole qui représente la principale espèce fruitière cultivée au Maroc avec 65 % de la superficie arboricole nationale et assure plus de 51 millions de journées de travail par an, soit l’équivalent de 380 000 emplois permanents ». Voilà donc ce qui assène un coup dur aux habitants et agriculteurs et pourrait les plonger dans la précarité.
Dans ce sens, la Banque Mondiale estime que les changements induits par le climat sur l’agriculture pluviale pourraient entraîner l’exode rural de plus de 5% de la population marocaine, d’ici 2050.
Un système agricole défaillant
La situation hydrique du Maroc ne laisse personne indifférent. Mobilisé, le gouvernement a mis en place une batterie de mesures et de politiques pour faire face à la pénurie d’eau. Et les efforts ne cessent de se multiplier.
Toutefois, toute action restera vaine et n’atteindra jamais ses objectifs escomptés tant que la politique agricole adoptée reste « défaillante ». C’est d’ailleurs ce qui ressort du rapport de la Banque mondiale qui met l’accent sur la nécessité de revoir de fond en comble la politique agricole.
Compte tenu des changements climatiques, le modèle adopté devrait s’adapter aux exigences de la situation hydrique actuelle et se tourner vers des cultures moins consommatrices d’eau. A cet égard, Mohamed Benata, ingénieur agronome, docteur en géographie et président de l’Espace de solidarité et de coopération de l’Oriental (ESCO), dénonce un « des politiques défaillantes ».
«Le Maroc a institué des politiques publiques, surtout dans le domaine agricole, visant à la surexploitation des ressources hydriques souterraines pour l’encouragement de la production et l’exportation des cultures trop consommatrices d’eau. « , a-t-il affirmé.
Le scénario de la dernière saison des pluies était catastrophique et s’il devait se reproduire ce serait très alarmant pour le pays. Ainsi, les pouvoirs publics devront absolument adopter des choix de développement susceptibles de préserver les ressources en eau disponibles plutôt que de miser sur d’autres stratégies qui épuiseront davantage le peu de ressources restant.