Verdict contre le Hirak : condamnant crimes et violences la justice a dit son mot
Hassan Alaoui
La chambre criminelle (2ème degré) de la Cour d’appel de Casablanca a donc confirmé, vendredi 5 avril tard dans la nuit, les jugements prononcés en première instance à l’encontre des accusés dans les événements d’Al Hoceima.
Des peines allant de 20 ans de prison ferme à un an de prison avec sursis ont été rendus, le 26 juin dernier, par la Chambre criminelle (1er degré) de la même juridiction. Nasser Zefzafi, ainsi que trois autres membres du Hirak, Nabil Ahmjiq, Ouassim Boustati et Samir Ighid, ont été condamnés à 20 ans de prison ferme pour « complot visant à porter atteinte à la sécurité de l’Etat », un chef d’accusation passible selon le Code pénal de la peine de mort.
«Les peines sont très légères par rapport à ce que prévoit la loi et à la façon dont ils se sont comportés devant le juge », avait commenté devant les médias Mohamed Karout, l’un des avocats des parties civiles qui représentaient l’Etat, après le jugement rendu en première instance. La confirmation du jugement en appel n’a pas manqué de susciter des réactions diverses voire contradictoires. Certaines, faisant fi des textes de loi, jouant davantage sur l’émotion nous rappellent les lendemains du premier jugement prononcé en juin dernier. La loi ne sévit pas, jamais au hasard – et ce n’est pas un simple adage – , elle est au-dessus de tout. Ceux qui la prononcent, notamment les juges, obéissent au principe de justice qui n’est pas un vain mot. En l’occurrence, personne ne saurait être au-dessus de la loi.
Les accusés du Hirak, disons plutôt désormais les condamnés et jugés, ont interjeté appel du jugement initial prononcé en juin à leur encontre. La loi leur accorde de le faire et d’user de tous les moyens légaux pour se défendre, leurs avocats ne s’étant en effet guère privés pour essayer d’anéantir sinon réduire les accusations contre leurs clients.
Sauf que les pièces à convictions et les preuves cumulées contre eux, non seulement ne laissent planer aucun doute sur leurs crimes, mais renforcent pour certains le sentiment que les jugements ont été idoines, pour ne pas dire « cléments ». Le motif de « complot contre la sécurité de l’Etat » n’est à coup sûr pas un vain mot, et en l’occurrence dans le dossier qui nous intéresse ici, il convient d’y ajouter tentatives de meurtres prémédités d’agents de la sécurité et de policiers, incendies volontaires de leurs véhicules, persécutions et violences perpétrées, coups et blessures, destruction de matériel et de mobiliers publics…
Les images choquantes des tentatives d’assassinats des membres de la police, par le moyen d’incendies de l’immeuble où ils résidaient, les fumées dégagées au-dessus des terrasses, les policiers échappant par les fenêtres, se risquant à l’impossible, enfin les provocations multiples chaque soir sur la place de la ville, les jets de projectiles et de pierres avec ce mot d’ordre « casser du policier » et détruire les symboles de l’Etat…Sur le devant de la scène , ces images de violences et de haine, répétées, ont pouvait les regarder chaque soir, avec leur propre tempo, c’était en quelque sorte la face visible de l’iceberg…Or, derrière ces « lampistes », il y avait les tireurs de ficelles, les idéologues qui tenaient à en découdre avec l’Etat, sa police, ses hommes et femmes. Et surtout, « branchés » avec les milieux hostiles au Royaume installés à l’étranger, ils recevaient moyens et consignes de certains pays d’Europe et d’ailleurs, prompts, déterminés à déstabiliser le pays. Dans le cycle des violences menées et conduites par le Hirak, il ne faut pas oublier ce fait choquant , volontairement provocateur et démoniaque, d’un Nasser Zefzafi – autoproclamé leader de la contestation – qui, le vendredi 26 mai 2017, a pris sur lui de violer le lieu sacré qu’est la mosquée de la ville, de rentrer au milieu de la prière et interrompre le prêche de l’Imam en y prenant sa place. Plus qu’un sacrilège, il s’agit-là d’un crime délibéré, fomenté et piétinant ainsi la religion sacrée du pays.
L’un des membres de cette « Cinquième colonne » confondu dans ses forfaits et sa trahison n’est autre que Hamid El Mehdaoui, agitateur de son état, délateur narcissique qui écope de 3 ans, alors que les preuves cumulées contre lui sont d’une gravité telle qu’il pourrait être, selon un observateur, passible de la « peine capitale ». L’enquête légale menée sur lui et autour de lui s’est fait fort de le confondre : il était le relais voire même le porte-parole des séparatistes rifains installés en Europe, pourvoyeurs du Hirak, ceux qui, se réclamant de la sécession, n’en démordent pas de vouloir « abattre le régime » et créer leur chimérique « république du Rif ». Pourtant, de l’avis de beaucoup El Mehdaoui, qui revendique le statut de journaliste et, à ce titre, entend s’inscrire dans l’esprit du droit de la presse alors qu’un faisceau de preuves tangibles lui est opposé, semble bénéficier d’un jugement plutôt léger.
Le complot contre l’Etat n’est pas seulement le cycle de violences fomentées, mais la planification en sous-main, avec la complicité étrangère, d’une entreprise de déstabilisation. Ceux qui répondent de ce délit grave, parmi les condamnés du Hirak, le savent bel et bien ou devraient le savoir. Quand on compare les jugements prononcés dans le cadre de l’affaire d’Al Hoceima, et ceux de la Catalogne en Espagne, là où la police espagnole , intervenant violemment et activement contre les manifestants, tabassant et réprimant ces derniers, on se dit que la police marocaine est décidément civique et plutôt éduquée et respectueuse.
Les peines prononcées en Espagne sont de 25 ans minimum parce qu’elles relèvent de la justice la plus implacable, une justice dite contre le délit non moins grave de sécession et de déstabilisation de la nation. Au Maroc, cependant, le procès des membres du Hirak a été équitable à la fois dans son instruction, ses procédures, ses délibérations et son verdict. Cela, à coup sûr, ne semble guère convaincre les avocats des coupables, les partisans du mouvement , les proches et les associations diverses qui, ici et là, s’agitent et dénoncent un procès inique. Puisqu’ils ont interjeté appel, en juin dernier, le jugement de première instance a été automatiquement et de lui-même annulé pour laisser place à l’Appel et, dans ce cadre, offrir aux avocats des accusés le moyen de contester, de plaider sur de nouvelles preuves qui innocentent les mis en cause. Ces derniers ont refusé d’assister au procès de la Cour d’Appel de Casablanca et leurs avocats, se passant le mot d’ordre, ont boycotté la plaidoirie, ne laissant au juge aucun autre choix que de trancher conformément à la loi. C’est dire qu’en faisant appel, les responsables du Hirak avaient la possibilité d’apporter des preuves et de contester le premier jugement, de le contredire et le cas échéant de bénéficier d’un autre verdict. Leur raidissement et le boycott des audiences et du débat contradictoire n’auront finalement réussi qu’à empirer leur cas, alors que la partie civile, les forces de police agressés ad hominem notamment et l’Etat attaqué, n’allaient en fin de compte, et selon certaines sources de la défense de la partie civile, n’exiger qu’un dirham symbolique.
La règle de droit a fonctionné de bout en bout dans le procès si long et juste des membres du Hirak pour aboutir à un verdict équitable eu égard aux violences commises pendant des mois et des mois. « Les accusés ont pu exprimer librement leur point de vue, et des observateurs étrangers étaient présents pendant les audiences. Les conditions pour un procès équitable étaient bien réunies », souligne Brahim Rachidi, avocat des parties civiles. On rappellera, cependant, qu’à ce jour, ils ont bénéficié des conditions nécessaires pour assurer leur défense. Ils ont fait appel, leur défense a plaidé comme il se doit, et aujourd’hui encore, ils ont la possibilité du recours de la Chambre de cassation que la loi prévoit comme ultime mécanisme légal pour se défendre et modifier leur peine.