Zohour Alaoui, une grande et digne représentante du Maroc à Berlin
Par Hassan Alaoui
Sur la liste des 14 ambassadeurs et ambassadrices nommés lundi 20 août par Sa Majesté le Roi, figurent deux femmes appelées à représenter le Royaume auprès d’Etats, pour le moins, significatifs.
L’une d’entre elles , Zohour Alaoui a été désignée à Berlin et son choix reflète, plus qu’une représentativité, un symbole : une femme dans la capitale du pays le plus important de l’Union européenne, une diplomate chevronnée qui a exercé ses talents aux Nations unies, à l’UNESCO et dans d’autres instances internationales avec entregent, une grande capacité de dialogue, une compétence reconnue par tous et, ce qui n’est pas le moindre détail, un sens de l’engagement quasi militant.
Zohour Alaoui a grandi dans le sillage de la prestigieuse diplomatie, grâce à son père Moulay Driss Alaoui, lui-même grand commis de l’Etat, ambassadeur exceptionnel de feu Sa Majesté Hassan II au Gabon pendant de longues années, ce qu’on peut appeler un « missi dominici » permanent auprès de feu Haj Omar Bongo dont il était le quasi confident, ensuite depuis 1989 en Libye pendant des années…jusqu’aux heures tragiques de ce pays parti en déliquescence.
Zohour Alaoui a baigné dans cette ambiance, certes, elle en a appris les règles, les usages et en a connu les contraintes. Mais elle s’est construite d’elle-même en ferraillant avec les contextes et les diplomates des Nations unies, donnant la preuve illustre qu’il n’est pas d’exclusivité en matière de diplomatie et de relations internationales, non plus de monopole aux hommes, encore moins l’exception que ces derniers croient réserver de temps à autres à des femmes pour reconnaître mezzo voce leurs mérites.
Sauf que si exception il y a, elle revient à Zohour Alaoui cooptée pour une capitale comme Berlin qui est aujourd’hui plus qu’un défi pour elle, un de plus en réalité. L’Allemagne est à présent ce qu’on appelle un « grand poste », un promontoire direct d’où ont successivement dominé des leaders comme Willy Brandt, Helmut Schmidt, Helmut Kohl, Gerard Shröeder et aujourd’hui Angela Merkel qui tient le haut du pavé à l’Europe et au monde , à la tête de l’un des premiers pays industriels de la planète.
Non que le « poste » en question de Berlin – disons de l’Allemagne, occupé autrefois par Ahmed Osman – constitue une difficulté, mais parce l’opportunité, à la fois du choix, la confluence des enjeux, le nécessaire repositionnement de notre diplomatie confié à une femme d’expérience et de culture, ne nous laissent pas indifférents. L’Europe, comme les Etats-Unis, Zohour Alaoui les connaît bien pour y avoir exercé avec un sens aigu de la responsabilité et un engagement renouvelé. Le parcours initiatique est tout à son honneur : d’abord le ministère des Affaires étrangères, le poste de Chef du service de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité des Nations unies– instance suprême -, chef de la Division de l’ONU, ensuite Directeur de celle-ci et des Organisations internationales.
Ce parcours éblouissant ne fut interrompu – l’a-t-il jamais été d’ailleurs – que lorsque S.M. Mohammed VI la nomma en 2006 ambassadeur en Suède…On eût pu croire que ce changement de poste, reflètera aussi un changement de vocation ! Que non ! Zouhour Alaoui, incarnant la diplomate ouverte à d’autres champs, sera nommée Ambassadeur Déléguée permanente du Maroc auprès de l’UNESCO en 2011, profil idoine, d’autant plus qu’il incarne en quelque sorte non pas seulement le piédestal , mais ce qu’elle porte en elle-même depuis toujours, secrètement, l’engagement humanitaire par la culture, le rapprochement de l’Homme avec son destin, un mélange des valeurs qu’elle porte et la quête de cette irrésistible conscience universelle.
Diplomate avérée, oui ! Et ce depuis des lustres. Sur son fronton s’est inscrit depuis des lustres ce terme de « servir », d’abord son pays et son Roi, ensuite l’Humanité au sens large. Faut-il s’étonner dans ces conditions que le 30 octobre 2017 elle soit élue à l’unanimité à la Présidence de la 39ème Session de la Conférence générale de l’UNESCO avec un mandat de 2 ans, autrement dit jusqu’en 2019 ?
De ce fait, elle sera la première femme du monde arabe, musulman et d’Afrique à se hisser à la tête de cette prestigieuse fonction, au sommet de l’organe le plus important de l’UNESCO. C’est peu dire que le rayonnement sur le Royaume du Maroc a vite retenti, et que notre pays connaîtra une consécration politique sans précédent sur la scène internationale. Zohour Alaoui en sera le pivot et le symbole de cette dynamique aux échos remarquables.
La nomination de Zohour Alaoui à Berlin, outre la dimension politique soulignée par le choix pertinent du Souverain, survient à point nommé, à un moment où ce pays s’apprête à intégrer le Conseil de sécurité pour deux ans à partir de janvier 2019, tout comme l’Afrique du sud. Confrontée et frottée depuis des années à cette diplomatie multilatérale des Nations unies, trempée dans le combat sur les travées et les couloirs de l’Assemblée générale, comme du Conseil de sécurité, riche de son expérience d’une irréductible volonté chevillée au corps, d’expliquer et de convaincre, Zohour Alaoui saura à coup sûr déployer son art de persuasion de grande représentante du Maroc pour défendre nos dossiers, instaurer – avec le « soft-power » qui la caractérise – une coopération bilatérale avec un pays européen majeur, un partenaire incontournable. Elle saura marquer notre présence à l’ombre de ce Brandebourg qui signifie l’unité allemande, son intégrité territoriale réalisé en 1989 après 43 ans de division et de déchirements. Un pays avec lequel le Maroc a su conserver des relations exemplaires et une coopération pleine de perspectives.
On conclura en rappelant que Zohour , assumant désormais la nouvelle image du Maroc, femme de caractère et de conviction, diplomatique au fait des questions politiques, et des enjeux géopolitiques saura aborder avec les autorités allemandes les questions de l’heure : la coopération économique, qu’elle va redynamiser, l’immigration avec la perspective du Sommet prévu sur le même sujet au mois de décembre au Maroc, la coopération sécuritaire, la culture et autres sujets pendants.