5ème anniversaire d’Al Boraq : pour un Maroc à grande vitesse

Par Farida Moha

Emprunté par plus de 5 millions de voyageurs, Al Boraq fête ce mois son 5ème  anniversaire.   Un succès amplement mérité faisant ainsi, passées aux oubliettes, les voix discordantes des adversaires de la LGV qui mettaient en avant lors de son lancement, la question de la soutenabilité économique du projet, le coût des investissements et dans la foulée la question de l’efficacité économique souvent controversée…

Aujourd’hui, la quasi totalité des personnes que nous avons sondées au départ de notre voyage à Tanger et à l’arrivée à Casablanca, conviennent du saut qualitatif opéré par la LGV qui, grâce à une contraction du temps de circulation, leur permet d’être projetés de ville en ville. Tanger-Casablanca dans un premier temps, et demain Tanger-Agadir en quelques heures, c’est aussi une contraction sidérante de l’espace dans un confort indéniable. En somme un nouvel espace-temps que l’on appréhende en heures et en minutes et qui a transformé la vie de nombre d’entrepreneurs, hommes d’affaires, professeurs d’université, informaticiens et usagers simples. Des performances qui ont réduit l’empreinte Carbonne et qui respectent les standards environnementaux de la grande vitesse en Europe en offrant une alternative écologique au transport aérien.

Un saut qualitatif donc, qui a renforcé la vocation de Tanger comme hub régional, et tiré vers le haut les infrastructures ferroviaires : connections du port Tanger-Med avec extension de l’hinterland, meilleur positionnement de Kenitra pour accueillir de nombreux sites industriels, relance des activités à Fès Meknès, connections également de Nador au réseau national, doublement de lignes Casa-Marrakech, Casa-Fès et une évolution significative du secteur ferroviaire. Le projet de la LGV ne s’est pas fait, faut-il le souligner, au détriment du développement du réseau classique.

Lire aussi : L’ONCF lance un ambitieux projet de modernisation avec l’achat de 168 nouveaux trains

L‘impact de la LGV, est un levier de mobilité propre, à la portée du grand nombre, ne se limite pas seulement aux flux des millions de voyageur. Il impacte le projet de la régionalisation avancée du Maroc. C’est en effet un outil de changement géopolitique et économique des territoires qu’il peut désenclaver à condition de rester vigilant sur la question de l’équité territoriale et de et de son aménagement au profit de tous. A condition également que les acteurs locaux des villes traversées se mobilisent pour booster l’effet LGV sur la localisation des entreprises, la création d’emplois, de logements et d’aménagement de nouveaux quartiers, de zones d’activités  et  développement notamment du secteur touristique.

S’ il est indéniable que les trains à grandes vitesse  ont un effet dit « structurant » que l’on peut constater de visu sur la ville et la région de Tanger, il faudrait s’atteler à des études socioéconomiques sur les interactions  entre infrastructures de transport telles que la LGV, les dynamiques territoriales et les connections entre ce projet ferroviaire , tourisme et développement des territoires .

A la reconfiguration du paysage industriels du Royaume, il convient d’ajouter la qualification des ressources humaines, ingénieurs et techniciens de l’ONCF et des différentes entreprises nationales qui, en termes de sous-traitance et d’employabilité ont participé à hauteur de 60% au projet et qui ont bénéficié de formation, de nouveaux savoirs faire technique et financiers et de transfert des compétences du partenaire porteur, à savoir la SNCF (Société nationale des chemins de fer français) et ses filiales. Tout un arsenal de compétences et d’innovations qui permet à ce dernier de relancer et développer un écosystème industriel ferroviaire national et d’améliorer son modèle de mobilité durable par l’acquisition de quelques 168 nouveaux trains dont 18 à grande vitesse…

Une mutation qualitative du transport de haut standard

Une mutation du transport ferroviaire qui a transformé les villes avec une nouvelle génération de gares, lieux de passage et de croisements, des points d’ancrage mais surtout des lieux de vie, d’animation urbaine qui avec leurs services et espaces  commerciaux séduisent les voyageurs et répondent à leurs besoins. Les nouvelles gares de Tanger, Rabat, Casablanca mais aussi  Marrakech, Fès et Oujda  qui accueilleront demain la LGV sont des véritables places publiques, cœur battant des villes, que tout un chacun, étudiants, salariés et entrepreneurs fréquentent quotidiennement. En l’espace d’une décennie, les gares se sont transformées et sont devenues des  modèles d’architecture qui allient modernité et tradition , espace convivial et des agoras culturelles conjuguées à la créativité des architectes marocains et des équipes de l’ONCF .
En ces temps anxiogènes de bouleversements et basculements, sans doute faut-il rappeler ces projets réalisés avec fierté. Des succès reconnus par tous  jusqu’à nos confrères algériens, pourtant peu amen vis-à-vis du Maroc, qui avaient au moment de son inauguration salué la prouesse technologique de la LGV, « la plus rapide d’Afrique,  vitrine de la modernisation  du Royaume  et du savoir-faire ». Au Maroc, écrivait  Algérie focus , ils n’ont ni pétrole ni gaz, ni réserves de changes qui se chiffrent en centaines de milliards  mais dans ce pays musulman arabe et berbère, exactement comme nous, le développement est une affaire prise au sérieux : le premier TGV marocain va dans un premier temps, relier Tanger à Casablanca  distantes de 350 km  en 2h10 contre 4h45 aujourd’hui.

Un autre journal aujourd’hui disparu, « Le Matin d’Algérie » rappelait qu’à l’instar de la Chine, de la Russie ou de l’Inde qui veulent aménager leurs territoires et développer la mobilité durable,  le Maroc a opté pour le train à grande vitesse en projetant un schéma directeur qui prévoit un couloir atlantique allant de Tanger à Agadir et un couloir maghrébin qui va de Casablanca à Fès et Oujda en attendant peut-être demain une LGV Maghreb au grand bonheur des populations…

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