Venise abasourdie après une « aqua alta » historique
Venise s’est réveillée abasourdie mercredi après une « acqua alta » (marée haute) d’une ampleur exceptionnelle qui a causé d’importants dégâts et alors que sont annoncés plusieurs épisodes du même type pendant les jours à venir.
« Nous affrontons aujourd’hui encore des marées record. (…). Nous demandons au gouvernement de nous aider, les coûts seront élevés », a tweeté mercredi matin le maire de Venise, Luigi Brugnaro, qui a annoncé dans la nuit qu’il allait demander la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
« La situation est désastreuse, on se prépare à une nouvelle épisode ce matin », a déclaré pour sa part le gouverneur de la région de Vénétie, Luca Zaia, interrogé sur la chaîne d’information SkyTJ24, appelant à la plus grande prudence.
Une marée haute d’une ampleur exceptionnelle de 1,87 mètre s’est abattue mardi sur la Cité des Doges, surprenant les touristes qui pataugeaient dans les ruelles inondées tandis qu’un puissant sirocco faisait déferler les vagues sur la place Saint-Marc.
Il s’agit de la deuxième plus haute « acqua alta » enregistrée à Venise depuis le début des relevés en 1923, derrière celle du 4 novembre 1966 (1,94 mètre).
Le niveau des flots était redescendu à 1,10 mètre mercredi matin mais d’autres épisodes sont annoncés dans la journée et jusqu’à vendredi, au rythme de deux marées par jour, selon le Centre des marées de Venise. Ce dernier annonçait notamment un pic de 1,60 mètre pour 10H30 (09H30) mercredi.
La ville commençait mercredi matin à évaluer les dégâts: la célèbre basilique Saint-Marc, joyau de la Sérénissime, a été inondée sous un mètre d’eau et la crypte et le presbytère complètement noyés pendant la nuit.
Selon le procurateur de l’édifice, Pierpaolo Campostrini, une inondation comme celle de mardi s’est seulement produite cinq fois dans l’histoire de la basilique –érigée en 828 et reconstruite après un incendie en 1063–, la donnée la plus préoccupante étant que sur ces cinq précédents, trois ont été constatés au cours des 20 dernières années, dont une fois en 2018.
L’épisode de marée a causé la mort de deux personnes, selon les médias italiens, l’une d’elle, un Vénitien de 78 ans, ayant péri électrocuté alors qu’il tentait de faire démarrer des électropompes dans son logement inondé.
« Moi j’habite au 2e étage mais je suis allé aider des amis qui habitent au rez-de-chaussée, on a dû surélever leur lave-linge », à déclaré Mario, un Vénitien, à l’AFP-TV.
« En tant que Vénitien, je devrais dire tout le mal que je pense de ceux qui gèrent la ville, mais c’est comme ça, que voulez-vous faire », a-t-il ajouté.
Les images diffusées par les télévisions montraient mercredi des dizaines de bateaux ayant rompu leurs amarres et dérivant dans la lagune.
De nombreuses gondoles ont également été ballottées sur les eaux et traînées dans les canaux vénitiens. Les gardes-côtes ont émis un « avis de danger » en raison de la présence d’obstacles submergés dangereux pour la sécurité de la navigation.
Les opérations de coordination des nombreuses interventions (250 pendant la nuit et plus de 100 pompiers mobilisés) sont compliquées par le fait que les lignes téléphoniques ont été interrompues.
Un niveau de 1,87 m qui ne signifie pas pour autant que la Cité des Doges se trouve immergée sous près de deux mètres d’eau. Il faut en effet retrancher de cette hauteur le niveau moyen de la ville qui se trouve entre un mètre et 1,30 m.
Venise est régulièrement touchée par le phénomène des « acque alte », pics de marées particulièrement prononcés qui provoquent la submersion d’une partie plus ou moins grande de la zone urbaine insulaire.
L’acqua alta inonde souvent les parties basses de la ville, dont la place Saint-Marc, et peut être amplifiée par le sirocco, comme cela a été le cas dans la soirée de mardi.
Pour protéger la ville de cette calamité qui altère chaque fois un peu plus son patrimoine artistique, le projet MOSE (acronyme de Module expérimental électromécanique, et signifiant Moïse en italien) est en cours de construction depuis 2003 mais le surcoût et les malfaçons ont entraîné de nombreux retards.
Le projet consiste à installer 78 digues flottantes qui se lèveraient pour fermer la lagune en cas de montée de la mer Adriatique.
Avec AFP