Mouhcine Jazouli ou « Monsieur Afrique » !
Par Hassan Alaoui
Il va de soi que le qualificatif désigne bel et bien Mouhcine Jazouli, nommé lundi par Sa Majesté le Roi ministre délégué chargé de la coopération avec l’Afrique. Il va de soi aussi que sa désignation est d’autant plus significative qu’elle nous interpelle, pour plusieurs raisons : celui dont le poste nouveau est désormais crée, avec ses services et ses « infrastructures » n’est issu d’aucune formation politique, ni appartient à quelque cercle que ce soit. Ce qui, manifestement, le distingue des autres ministres nommés dans la foulée de l’opération de remplacements des ministres limogés, dont ceux appartenant quant à eux au PPS et au Mouvement populaire.
Or, si ses confrères du gouvernement travaillent plutôt en interne, au Maroc et pour le Maroc, Mouhcine Jazouli déploiera en revanche son action à l’échelle d’un continent tout entier, soit pas moins de 30,37 millions de kilomètres carrés et une population globale de 1,2 milliard d’habitants. Autant dire que ce n’est pas une mince affaire, celle en particulier de porter la voix du Maroc dans des contrées reculées, et notamment auprès de pays et de gouvernements qui ne nous sont pas acquis de si tôt.
« Monsieur Afrique » est connu pour affectionner depuis longtemps le continent qu’il a sillonné et pour lequel il a voué de nombreuses missions en tant qu’expert et voire « stratège ». La formule du « The right man at the right place » lui sied tellement qu’il n’est pas d’autre « personne » justement en mesure d’incarner de nos jours le nouveau visage de la diplomatie africaine du Royaume. Sa désignation s’inscrit en effet dans une tradition qui a disparu fin 1963, avec la non reconduction cette même année de son lointaine prédécesseur, feu Abdelkrim Khatib, désigné en juin 1961 ministre des Affaires africaines, et ministre d’Etat aux mêmes responsabilités par feu le Roi Hassan II.
Rétrospectivement, on se rend compte que l’Afrique a constitué dès la Libération du Maroc, un champ d’action privilégié. Tant et si bien qu’elle avait justifié à juste titre la création d’un super ministère avec une figure de proue, que fut Abdelkrim Khatib qui avait noué de précieux contacts avec les leaders du continent, les mouvements de libération nationale – de l’ANC jusqu’au Frelimo en passant par le FLN algérien – et défendu l’image de leader du Maroc au sein de l’Afrique. Il est vrai que durant cette époque post-coloniale, à l’heure où les empires occidentaux se désintégraient, la solidarité avait un nom et l’Afrique, dans ses combats d’indépendance et d’affirmation, l’incarnait.
Mouhcine Jazouli s’inscrit, à coup sûr à la fois dans les pas de son lointain prédécesseur et dans la vision continentale, forgée et articulée sur des objectifs ambitieux, qui est celle de Sa Majesté Mohammed VI, artisan de cette diplomatie offensive, caractéristique essentielle de notre politique africaine.