Projet de loi de finances 2019: l’exécutif espagnol en quête d’un compromis
A peine trois mois après son arrivée au pouvoir, le gouvernement socialiste se trouve déjà confronté à l’un des défis majeurs de la rentrée politique espagnole qui consiste à chercher un compromis autour du projet de la Loi de finances 2019 que l’exécutif compte présenter en novembre prochain.
Avec seulement 84 députés sur 350 au Congrès, les socialistes se trouvent en position minoritaire qui les oblige à trouver des compromis voire même des concessions pour faire approuver le budget de l’État pour 2019, le but étant aussi de réussir leur première rentrée politique et de dépasser leur fragilité parlementaire.
Les défis socio-économiques d’envergure à relever illustrent bien la complexité du processus de négociation qui attend l’exécutif espagnol. D’un côté, il doit respecter ses engagements budgétaires, promouvoir la croissance économique et créer de l’emploi, et de l’autre chercher un compromis gagnant-gagnant avec l’aile de la gauche radicale et les centristes.
En vertu d’un accord conclu récemment avec le parti de la gauche radicale « Podemos« , l’exécutif est appelé à rechercher un mécanisme juridique, qui sera un projet de loi, en vue de supprimer le droit de veto du Sénat lors du processus d’adoption du budget de l’État, sachant que le parti populaire (PP, droite) dispose d’une majorité absolue dans cette chambre.
L’objectif de cette initiative est d’éliminer la double approbation des objectifs de stabilité budgétaire et de dette publique pour l’année prochaine, et ce, en vue d’approuver les budgets expansifs prévus.
A cet égard, l’approbation des objectifs budgétaires de 2019 a été reportée jusqu’à ce que la réforme convenue avec Podemos puisse être finalisée, une décision qui a été qualifiée par le PP de « régression démocratique » qui limite la capacité du Parlement avec ses deux chambres.
Par ailleurs, l’augmentation des impôts que Podemos soutiendra, la création de nouvelles taxes, la disparition des déductions fiscales ou encore le démantèlement des cotisations de travail pourraient, selon des calculs effectués sur la base du budget de l’État de 2016, avoir une incidence directe sur 4 millions de contribuables, ont estimé des experts, qui précisent que des taxes sur les bénéfices des banques, le diesel ou l’environnement finiraient par toucher presque toute la population.
Pour les partis indépendantistes, des mesures effectives de changement de politique doivent être mises en oeuvre par le gouvernement de Pedro Sanchez pour qu’ils continuent à le soutenir au Parlement, notamment en rapport avec la Loi de Finances 2019. Ils s’attendent en particulier à ce que l’exécutif intervienne dans le procès contre les dirigeants indépendantistes emprisonnés pour leur implication dans le processus sécessionniste en Catalogne en 2017.
La phase d’incertitude engendrée par les tractations autour du projet de la Loi de Finances 2019 pourrait, selon des économistes, nuire à la croissance espagnole, qui est probablement en train d’entrer dans une légère phase de ralentissement, comme en témoigne le rythme annuel de croissance qui a freiné à 2,7% au deuxième trimestre contre 3% au premier trimestre.
Au delà des contraintes internes qui devraient réduire les marges de manœuvre économiques et financières du gouvernement, des risques extérieurs majeurs planent aussi sur la stabilité de la quatrième économie de la zone euro. Il s’agit en particulier d’une éventuelle détérioration de la conjoncture mondiale ou d’un choc macroéconomique exogène.
Certains vont même plus loin en estimant que la durée de vie de ce gouvernement risque d’être limitée, étant donné qu’il est fort probable qu’il ne parvienne pas à élaborer un projet de budget qui soit adopté par le Congrès des députés.
Le gouvernement espagnol se trouve ainsi soumis, lors de sa première rentrée politique, à des contraintes qu’il doit dépasser s’il veut réussir cette étape décisive de son mandat, représentée par l’adoption du projet du budget 2019, et s’engager dans des réformes plus ambitieuses en vue de renforcer la compétitivité de l’économie espagnole.