Alger invente un contrepoids aux expulsions atroces et barbares des Marocains en 1975

Par Taieb Dekkar (*)

Au lieu de présenter ses excuses aux Marocains expulsés de son pays par le dictateur Boumediene, le jour de l’Aïd Al Adha, pour la simple raison qu’ils étaient marocains, l’ambassadeur algérien, «envoyé spécial et personnel» de Ramtane Lamamra, nous apprend que nos compatriotes avaient tout simplement  « quitté  l’Algérie en 1975 », comme si c’était de leur plein gré.

Au lieu de condamner son gouvernement pour cet acte barbare, élevé au rang de  «crime contre l’humanité», en raison de l’atrocité des conditions dans lesquelles ces marocains furent extirpés de chez eux et conduits à la frontière, «l’envoyé spécial» algérien tente de replacer le débat sur les crimes perpétrés par le régime «progressiste» du dictateur Boumediene, sur un autre registre, celui des biens des marocains confisqués par l’Algérie, que réclament toujours les victimes, depuis maintenant plus de 45 ans.

Ces marocains «ne possédaient pas de biens propres en Algérie,  mais étaient de simples artisans et ouvriers, voire des métayers, détenteurs du cinquième des locataires de biens immobiliers  sur des terres appartenant à l’Etat algérien ou à des tiers», selon l’envoyé spécial algérien, une fonction créée depuis quelques mois par le pouvoir algérien, pour tenter de réanimer une diplomatie  en décadence, comme d’ailleurs le pays tout entier.

Depuis déjà 1990, le pouvoir algérien invoque les droits des algériens prétendument expropriés au Maroc, pour trouver un contrepoids aux revendications des ressortissants marocains, expulsés d’Algérie, au lendemain de la grandiose Marche verte, le jour de l’Aïd Al Adha, qui symbolise chez les musulmans, une fête de solidarité,  d’entraide et de sacrifice.

Il s’agit de 45.000 familles marocaines, qui ont fait les frais d’une décision arbitraire d’un dictateur, qui proclamait paradoxalement haut et fort, son engagement pour  «un Maghreb des peuples»  et qui nous en donne une application concrète sur le terrain. La diplomatie algérienne n’éprouve apparemment aucune honte pour évoquer, sans vergogne, cette page de l’histoire sombre de ce sinistre pays voisin du Maroc, qui affiche une audace excessive pour exiger des excuses du Maroc, suite aux vérifications et aux contrôles d’identité des ressortissants algériens, qui se trouvaient sur le territoire marocain, lors de l’attentat contre l’hôtel  « Atlas Asni »  à Marrakech au mois d’Aout 1994, et dont les auteurs étaient, raison de plus,  tous des franco-algériens. De simples contrôles, qu’il n’y a pas lieu de comparer aux  atrocités auxquelles se sont livrées les forces de sécurité algériennes, lors de l’expulsion des marocains d’Algérie.

Nous savons toutefois que la diplomatie algérienne pousse son animosité à l’égard de notre pays jusqu’à  perdre tous ses repères «progressistes» et ses slogans démagogiques anti-coloniaux et anti-impérialistes. Rappelez-vous la position officielle de la diplomatie algérienne, lors du conflit entre le Maroc et l’Espagne sur l’Ilot Leila. Alors ministre des affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem, qu’il ya lieu de citer, parce son nom restera gravé à cette triste page de l’histoire de la diplomatie algérienne, s’est rangé du côté de Madrid, sur la base, dira-t-il, du principe de l’intangibilité des frontières. Oui à la colonisation de deux villes, situées au nord du Royaume, par fidélité au sacro-saint principe de l’intangibilité des frontières,  inscrit par l’Algérie dans la charte de l’OUA, pour justement enrayer toute revendication territoriale marocaine, à l’ouest de l’Algérie sœur.

S’agissant des Algériens prétendument expropriés par le Royaume du Maroc, il y a lieu de préciser qu’ils se trouvaient au Maroc avant l’indépendance de l’Algérie et qui étaient ou de grands fermiers ou des entrepreneurs, ils étaient entrés au Maroc, sous le protectorat français, en tant que ressortissants français, comme cela est consigné dans les actes de propriété enregistrés auprès notamment de la Conservation foncière du Royaume du Maroc.

A l’indépendance du Royaume du Maroc, les étrangers, quelle que soit leur nationalité, car il y avait également des Espagnols, mais aussi d’autres nationalités, n’ont pas été chassés du pays par la force et la violence, voire assassinés, comme en Algérie, ni dépossédés de leurs biens. Ils ont continué à jouir de leurs biens, sachant que les forces coloniales, qui  se sont introduites au Royaume, venant du département français voisin, ont forcé les paysans marocains à  abandonner leurs terres fertiles, pour les cantonner dans des activités pastorales dans les montagnes. De grands fermiers français ou espagnols s’emparèrent des terres fertiles, qu’ils ont mises en valeur  pour développer la production agricole et l’exportation vers l’hexagone. Les autorités du protectorat avaient, en outre, attribué certains privilèges aux français et autres nationalités, notamment des agréments de transport en commun ou encore des débits de boissons et autres. Les français d’origine algérienne, qui étaient rentrés au Maroc, dans le cadre de cette stratégie coloniale, profitèrent de cette situation de rente, pour développer outre le transport en commun, de vastes fermes agricoles, partout dans le pays, qui répondaient naturellement aux objectifs de l’hexagone.

Ce n’est qu’en 1973, c’est-à-dire, 17 ans après l’indépendance du Maroc, que le gouvernement marocain, en vertu d’une loi nationale, la loi sur la Marocanisation, décida de transférer 50 pour cent des biens qui sont aux mains des étrangers sous le contrôle des marocains ou de groupes financiers ou industriels marocains (l’Algérie avait le droit de nationaliser ses hydrocarbures, restées aux mains des français). Certains étrangers se sont alors associés à des marocains, tandis que d’autres ont carrément vendu la totalité de leurs biens, pendant qu’une troisième catégorie continue à ce jour, de jouir de ses biens. Toutefois, ces étrangers n’étaient pas des Algériens, car l’Algérie n’existait pas à l’époque. Certains ont accompagné la colonisation française au Maroc et en furent encouragés, voire sollicités, s’accaparant de vastes périmètres ou s’appropriant certaines activités, pour s’inscrire dans le cadre de la stratégie des autorités coloniales.

Car au fond, qu’est-ce qui aurait empêché ces Français d’origine algérienne de  développer de telles activités sur le territoire du département français  voisin !  Parce qu’ils auraient été traités et perçus comme des collaborateurs des autorités coloniales, tout simplement. Au Maroc, ils s’exposaient moins à de telles accusations.

Si les autorités algériennes décident, aujourd’hui, de plaider la cause des « français » d’origine algérienne, c’est pour  « inventer» un contrepoids aux revendications des Marocains victimes des expulsions arbitraires, inhumaines, discriminatoires, et injustes d’un régime, qui nous arrosait de slogans anticoloniaux  et anti-impérialistes. Ce régime s’est révélé être, au bout du compte, un héritier copie-conforme des autorités coloniales et impérialistes, en reniant les engagements du gouvernement provisoire algérien (GPRA) de rétrocéder au Royaume les territoires annexés au département français à l’Est du pays et en s’alignant sur le colonialisme dans l’affaire du Sahara et des autres territoires marocains occupés. Les autorités algériennes sont prêtes à tout, dès qu’il s’agit de contrer les intérêts d’un pays voisin ancestral, à l’histoire millénaire, puissant, stable politiquement et dont les choix stratégiques, intérieurs et extérieurs, se sont révélés justes, fiables et crédibles.

(*) Journaliste et écrivain

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