Algérie-USA: Tebboune assomme Antony Blinken d’un monologue sans objet
Par Taieb Dekkar
Le président algérien Abdelmajid Tebboune vient d’assommer le Secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, d’un long monologue, resté sans réponse auprès de l’auditeur. Ce ne sont évidemment pas des entretiens, puisque c’est le président qui a monopolisé la parole et le discours, jusqu’à épuisement de la matière.
Le pire pour le chef de la diplomatie américaine, moins habitué à des discours sans objet, est qu’il ait été, avant ou après, acculé à écouter un autre discours prolixe et exubérant similaire de Ramtane Lamamra, son homologue, diriez-vous.
Je m’en tiendrai strictement au discours du président algérien. Il avait mille fois raison lorsqu’il affirme que les pays du voisinage sont différents de l’Algérie. Il n’y a que la Tunisie qui ressemble à l’Algérie et avec laquelle elle coopère parfaitement.
Vrai. Il s’agit de deux dictatures. Kais Said a dissous le parlement et gère seul le pays à son gré. Un parlement élu démocratiquement. Il a envoyé ses opposants en prison et ouvert des enquêtes judiciaires contre d’autres, pour les faire taire, éternisant une période d’exception dans un pays qui avait aboli la dictature et instauré la démocratie, au prix de lourds sacrifices. L’ex-président Merzouki est poursuivi pour trahison, parce qu‘il aurait découragé des organisations internationales à réunir leurs assises en Tunisie, pour ne pas cautionner l’usurpation du pouvoir par le président.
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En Algérie, c’est l’armée qui gouverne depuis 1962. Elle avait éliminé 250.000 algériens, durant la décennie noire, au lendemain de l’interruption du processus électoral, le 11 janvier 1992, venus allonger la liste des Chouhadas dans ce pays, dont l’oligarchie au pouvoir, cramponnée aux privilèges, à la rente et à la corruption et aux détournements, refuse de céder. Le pouvoir a par ailleurs engagé une vaste opération d’arrestations parmi les activistes du Hirak pour contrer la réactivation du Hirak, un mouvement spontané de contestation du régime militaire, qui est resté deux ans durant.
Les régimes se ressemblent également, s’agissant des pénuries alimentaires fréquentes, y compris le pain, tout récemment en Tunisie.
Autre registre abordé par le président algérien: les projets de développement de l’Algérie, des projets évidemment, qui restent au stade de la réflexion et de l’imagination. Dans ce cadre «utopique», L’Algérie produirait (au conditionnel) 30.000 tonnes de blé, dont elle exporterait 21.000 tonnes au Maroc, en Egypte, en Tunisie et en Afrique, «parce que l’Algérie dispose d’un vaste territoire». A priori cette logique utopique est logique.
Il reste que pour le moment, c’est le Maroc qui exporte vers l’Union européenne, l’Europe, l’Afrique et l’Asie, les tomates, les tomates cerises, les plantes aromatisées, les poivrons, les haricots verts, les navets, les pommes de terre douces, les aubergines, les fraises, les courgettes, le melon, les abricots, les oranges, les clémentines, les produits de la pêche…voire les fleurs. Il avait même réalisé son autosuffisance, en matière de blé, en 2020.
Le Maroc exporte depuis des années et assure son autosuffisance en lait, matière première fondamentale pour la population. L‘Algérie exporte les hydrocarbures et importe quoi manger, presque tout.
Mais, la perspective parait bonne pour l’Algérie, du moins au stade des idées.
*journaliste et écrivain