Brexit : Le Royaume-Uni à l’heure des regrets ?

Par: Mohamed Saad Bouyafri

Sept ans après le divorce tumultueux entre Londres et Bruxelles, l’heure des regrets semble avoir sonné du côté britannique, où moins d’un cinquième des électeurs favorables au Brexit se disent aujourd’hui heureux de son issue.

Sévèrement impacté par la crise inflationniste internationale, avec des prix qui grimpent à un rythme plus élevé que toutes les autres nations du G7, le Royaume-Uni est en proie à une crise du coût de la vie qui pousse ses citoyens à repenser leurs choix.

Dans une consultation, réalisée à l’occasion du septième anniversaire du référendum vendredi, l’institut de sondage Public First a demandé à plus de 4.000 électeurs pro-Brexit leur avis sur la situation. Moins d’un cinquième d’entre eux (18 %) ont déclaré que le processus s’était bien ou très bien déroulé, tandis que 30 % ont estimé qu’il ne s’était ni bien ni mal déroulé, et 26 % ont indiqué qu’il était encore trop tôt pour se prononcer.

Près d’un tiers des partisans de la sortie de l’UE interrogés (29 %) estiment toutefois que le Brexit a eu un impact économique négatif, alors que parmi les « Brexiters » qui pensent que la rupture ne s’est pas bien passée, beaucoup accusent les politiciens de l’avoir « mal gérée« .

Dans ce groupe, 70% déclarent que le Brexit aurait pu bien se passer, et près de la moitié (48 %) pensent que les hommes politiques auraient pu le faire fonctionner, « mais qu’ils n’ont même pas essayé« , précise l’institut.

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Le directeur du Think Tank « UK in a Changing Europe », qui a été le premier à reprendre les résultats de cette consultation, a estimé que la déception concernant la manière dont le Brexit a été géré est susceptible d’exacerber la méfiance à l’égard des hommes politiques.

De nombreux électeurs de la gauche pensent que le Brexit n’a pas été un succès parce que les politiciens les ont déçus. « Le danger est que cela conduise à une érosion de la foi dans la politique et les politiciens« , a souligné Anand Menon.

De son côté, Rachel Wolf, une des fondatrices de Public First, a fait savoir qu’il existe une opinion dominante selon laquelle « les politiciens ont tout gâché« , notant toutefois qu’une majorité de personnes jugent qu’il est encore « trop tôt » pour porter un jugement définitif, alors qu’une majorité très claire (72%) n’a plus envie de continuer à parler du Brexit.

Des chiffres qui expliquent en partie la réticence du parti travailliste et des libéraux démocrates à mettre l’accent sur la sortie de l’UE et ses conséquences lors de leurs campagnes, à 18 mois des prochaines élections générales.

La mise en œuvre de la décision de quitter l’UE a même divisé le parti conservateur au pouvoir à plusieurs reprises au cours des sept dernières années. Les querelles sur la relation du Royaume-Uni avec l’UE ont terminé le mandat de Theresa May et ont permis à Boris Johnson d’obtenir une majorité de 80 sièges en 2019 en promettant de « faire aboutir le Brexit« .

A contrario, en Écosse, la question fait à peine débat. En 2016, les Écossais ont voté pour le maintien dans l’Union européenne avec une marge de 24 % : 62 % pour le maintien et 38 % pour la sortie.

Cet avis nettement plus tranché dans la nation du nord du Royaume-Uni est également partagé par ses dirigeants, puisque l’exécutif écossais a publié vendredi un rapport explosif dans lequel il accuse le Brexit d’avoir, entre autres, limité la croissance économique, restreint le commerce, augmenté les coûts alimentaires et diminué les opportunités pour les jeunes.

La liberté de mouvement a disparu, les voyages sont plus coûteux, la coopération pâtit de barrières bureaucratiques, et le marché européen est devenu inaccessible à de nombreux produits écossais, causant la banqueroute de plusieurs entreprises, soutient Édimbourg.

Mais pour 61% des Brexiters interrogés, la situation finira par s’arranger. Une opinion partagée par Westminster qui affirme qu’une fois débarrassé des règles européennes superflues, le Royaume-Uni pourra saisir pleinement les opportunités du Brexit et développer son réseau commercial international. En attendant, le sujet continuera à nourrir les divisions et à faire couler beaucoup d’encre.

Avec MAP

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