Ce qu’il faut savoir sur les enjeux de l’élection à la tête de la CNT
Par Hassan Alaoui
Ce samedi 17 juillet se tiendra à Marrakech la cérémonie pour l’élection à la présidence de la Confédération nationale du tourisme (CNT) qui, pour la première fois, semble prendre une dimension significative et devient un enjeu essentiel. Elle a la particularité, cette année, de voir s’affronter deux équipes qualifiées de binômes.
Le premier formé de Jalil Benabbès Tâarji et Aziz Chérif Alami, le deuxième de Hamid Bentahar et Hicham M’Hamdi Alaoui. Jusqu’ici, il n’y avait que des candidats individuels qui se présentaient et sollicitaient les suffrages des électeurs, mais jamais de tandem. Tandis que la crise du Covid-19 continue de ravager le secteur, laissant entrevoir quelques timides éclaircies, l’intérêt pour son avenir ne s’estompe point, du moins chez les professionnels.
Au creux de cette vague de sinistrose non avouée, omniprésente néanmoins dans les esprits, deux tandems se sont constitués, affichant l’un et l’autre une grande ambition, déclinant depuis quelques semaines des programmes de rénovation, de restructuration, de création d’emplois, de promotion à l’international. Sur le principe, en effet, l’enjeu électoral demeure démocratique, les candidats battant le haut du pavé. Sur le fond en revanche, la différence est substantielle, parce qu’il existe une nette différence de parcours entre les membres du premier groupe et ceux du deuxième.
Jalil Benabbès-Tâarji n’est pas né de la dernière pluie, il incarne le modèle du manager du tourisme national depuis plus de trente ans, président de groupes divers, au carnet d’adresses bien fourni, investisseur à titre personnel et familial. Autrement dit, maître de ses propriétés et de son destin, jamais « interchangeable »…
Son coéquipier, Aziz Chérif Alami, jeune directeur général du groupe Atlas Voyages, premier voyagiste du pays et d’Afrique , est à la lignée familiale et au tourisme, national et international ce que le symbole de l’avenir d’un métier est à cette importante activité qui a procuré au Maroc en 2019 quelque 80 Milliards de dirhams. Avec son aîné coéquipier dans la course à la tête de la CNT, il part bille en tête, l’optimisme inscrit sur son fronton et l’expérience de modélisation, de traceur de perspectives et de gestion en bandoulière. Les deux « leaders » se complètent.
Ils sont soumis à de virulentes critiques et à des a priori. Ils entendent simplement changer les habitudes de gestion au sein de la CNT, apporter un vent frais, associer les membres de la CNT qui se sont vu totalement exclus voire bannis des décisions unilatérales prises pendant six ans. Les vices de forme, selon eux, ont constitué la marque essentielle d’une gestion qui, paradoxalement et en violation des règles, a duré six ans. Aucune fédération constituant l’ensemble des membres de la Confédération regroupant selon la CGEM pas moins de 140 entreprises, n’a remis le PV de son assemblée générale au titre de l’exercice 2020… La CNT elle-même moins encore que les autres….
Un coup de tonnerre a frappé pourtant cette dernière et pris de court le secteur entier : Cinq fédérations se sont retirées en 2018 et ont déposé leur « démission », criant à l’anomalie et au scandale, dénonçant ce qu’elles ont appelé un « coup d’Etat », parce qu’après avoir exigé le PV d’une assemblée, elles n’ont reçu aucun document, le président faisant preuve d’un silence méprisant, ignorant jusqu’au huissier dépêché à cette occasion par les membres démissionnaires.
Ce qui nous fait dire qu’à peine 4 à 5 fédérations du secteur sont à jour, selon certaines sources concordantes. Aucune instance officielle, ni le ministère du tourisme, ni l’ONMT et encore moins les membres de la CNT n’ont donc été avisés.
A l’élection de samedi 17 juillet, aucun grand groupe, nous dit-on, ne participera à l’élection, autrement dit ni Atlas Hospitality ; ni le groupe Mogador ; ni Royal Air Maroc ; ni Air Arabia ; ni le Club Med ; H. Partners ; KTI-KTH ; Interedec ; Ajial ; CDG Hôtel…etc. Ces absences d’aussi significatifs mastodontes du tourisme ne présagent rien de crédible, si tant est que l’on puisse imaginer que le vainqueur du scrutin aura la main facile. Il faut noter que les professionnels seront exigeants à l’avenir, ne toléreront point le laxisme voire l’incohérence de la gestion sortante. Jalil Benabbès Tâarji, en qualité de président de l’Association nationale des investisseurs touristiques (ANIT), de promoteur, de président du groupe Tikida et RIU qui emploie près de 3000 personnes et Aziz Chérif Alami, jeune manager d’un groupe qui emploie pas moins de 1150 personnes pour sa part, se présentent comme les rénovateurs des structures d’une fédération en quasi ruines, endormie sur ce qui reste de « lauriers » en berne…
Un programme enraciné dans les enjeux du tourisme et de l’économie
« Les effets dévastateurs de la pandémie COVID-19 sur tous les maillons de la chaîne de valeur touristique (hébergements, agences de voyage, transports touristiques, guides, locations de voitures, restauration, animation, artisanat, infrastructures culturelles, …) exigent une CNT engagée, déterminée et significativement renforcée, pour proposer et peser sur les décisions stratégiques qui conditionneront l’avenir de toutes les professions du Tourisme, et en premier lieu, les programmes de sortie de crise et de relance ».
Tel est le préambule des propositions que le duo Jalil-Benabbès Tâarji et Aziz Chérif Alami, publie dans le cadre de leur programme publié sur leur site. Et que nous avons reçu. Les deux candidats exposent ainsi leur vision avec en premier ce souci d’y regrouper « les métiers et tous les territoires »…, avec les opérateurs de tous les niveaux et « en bonne intelligence avec les pouvoirs publics ».
Sortir de la crise
L’un des mots clé de leur engagement est celui de la sortie de crise. Ils entendent y mettre tous les moyens et mobiliser tous les mécanismes, promotion, investissements, création d’emplois, formation, communication, etc…Pour ce faire, ils proposent un « soutien financier immédiat aux entreprises, de promouvoir, pandémie oblige, un Maroc comme destination sûre au plan sanitaire ; un plan triennal de relance du secteur par segments d’activités ; enfin de développer le capital humain.
Grandes lignes du programme Benabbès-Taarji et Chérif Alami
« Afin d’accompagner l’industrie touristique marocaine, disent-ils, il nous faut tous ensemble au sein de la CNT mettre en œuvre un plan de choc pour garantir l’avenir du secteur. Une industrie qui représente près de 500 mille d’emplois directs et près de 7% du PIB, il est primordial que son sauvetage et sa relance doivent être une priorité partagée par tous ».
• La prorogation du mécanisme de l’Indemnité Forfaitaire de 2.000 dirhams (l’IF) et les mesures de soutien liées à celle-ci, jusqu’à 3 mois après la levée de l’état d’urgence sanitaire et, à tout le moins, jusqu’au 31 Décembre 2021. Nous sommes convaincus que ce délai est un minimum puisqu’il y a unanimité sur (i) l’intensité et (ii) la durée de la crise, ainsi que (iii) la lenteur de la reprise. C’est la même logique « d’aide à la reprise » qui a prévalu au deuxième semestre 2020.
• Le reprofilage des crédits pour l’ensemble des entreprises du secteur et report des leasings pour les transporteurs et loueurs idéalement jusqu’en Avril 2022.
• La prorogation des reports de crédits et leasings pour tous les salariés du secteur – dûment déclarés à la CNSS – et ce jusqu’à la levée de l’état d’urgence sanitaire idéalement, et au 31 Décembre prochain au plus tôt. Actuellement, les salariés du secteur font face à une double peine : (i) la réduction de leurs revenus (ii) la poursuite des prélèvements bancaires pour les traites avec les agios et les frais d’impayés qui s’accumulent. Il est souhaitable et urgent qu’un accord puisse être trouvé entre le GPBM, l’APSF et Bank Al-Maghrib pour soulager ces salariés de cette pression additionnelle.
• La conclusion urgente des travaux initiés dès le 12 Mars dernier avec le GPBM en vue d’un reprofilage volontariste et adéquat des crédits d’investissements pour les établissements hôteliers, et ce avec le concours de la CCG et de sa tutelle.
• Prévoir un report du quota d’utilisation des devises de change par les agences de voyages en prenant comme base l’année 2019.
Le tourisme est une industrie pas comme les autres, elle est cœur du développement économique et social du Maroc. Elle fait l’objet de la plus haute attention de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui, dès son intronisation en juillet 1999, lui accorde une attention particulière. Grandes infrastructures, routières, aéroportuaires, maritimes, développement de pôles comme Dakhla, Agadir, Essaouira, Casablanca, Rabat, Tanger, Tétouan qui ont connu des mises à niveau spectaculaires et reçu de gros investissements. En 2019, le Maroc a été classé « première destination touristique d’Afrique ». L’ensemble des forces convergent vers la perspective d’un tourisme nouveau, respectant les critères d’un développement durable.