La Chaire Fatéma Mernissi, une manière de « prolonger le travail » de la défunte intellectuelle
La Chaire Fatéma Mernissi est une manière de prolonger le travail de la défunte intellectuelle, a souligné, mercredi à Rabat, Driss Ksikes, écrivain et directeur du Centre de recherches de l’Institut des hautes études de management (CESEM).
« Le but de cette chaire est de donner des bourses à des doctorants et des posts-doctorants et de continuer ce travail de tissage que menait Fatéma Mernissi entre l’universitaire, le civique et le créatif », a indiqué dans une déclaration à la MAP M. Ksikes à l’occasion de l’inauguration de la Chaire Fatéma Mernissi au siège de l’Université Mohammed V Al Irfane-Rabat. « Ceci entend faire sortir les chercheurs des conceptions orthodoxes de la recherche pour être utiles à la société », a affirmé M. Ksikes, également coordinateur de ladite chaire, notant que « le seul souci de Fatéma était qu’il y ait des jeunes qui prolongent ses idées ». Même son de cloche chez Mokhtar El Harras, l’autre coordinateur de cette chaire, qui a expliqué dans une déclaration similaire que cette chaire « ne fonctionnera pas uniquement dans un cadre académique étroit mais cherchera à s’ouvrir sur les acteurs de la société civile, les artistes, les journalistes, et à tous ceux intéressés par les questions essentielles sur lesquelles a porté le travail de la défunte Fatéma Mernissi ». Créée par HEM Business School et l’Université Mohammed V de Rabat, en hommage à la sociologue disparue le 30 novembre 2015, la chaire Fatéma Mernissi est portée et coordonnée par le Cesem, centre de recherche de HEM, d’un côté, et la Faculté des lettres et des sciences humaines-Rabat Agdal, de l’autre.
Les deux coordonnateurs de la chaire Fatéma Mernissi assurent que cette chaire se veut un projet de diffusion des idées de la défunte sociologue et de perpétuation de son esprit, un espace stimulant pour tisser des liens entre les espaces académique, civique et médiatique.
Cette chaire cherche à faire dialoguer ses travaux avec d’autres tout aussi fertiles en idées, d’ici et d’ailleurs, octroyer des bourses à des jeunes chercheurs ayant des démarches innovantes, accorder des prix à ceux qui se distinguent par la qualité de leurs recherches, ajoute-t-on.
L’inauguration de la Chaire Fatéma Mernissi a été marquée par la présence de la ministre par intérim de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de la formation des cadres, Jamila El Moussali, d’une pléiade de chercheurs nationaux et étrangers et de proches de la défunte.
Cette inauguration s’inscrit dans le cadre du colloque international « Mille et une facettes de l’œuvre et de la vie de Fatéma Mernissi »qui se tient à l’Université Mohammed V de Rabat du 30 novembre au 2 décembre. Au menu de cet évènement, une alternance d’activités scientifiques, de témoignages et de moments artistiques au cours desquels chercheurs, artistes, journalistes, professeurs politiciens, vont contribuer à la réflexion sur une série de thématiques, dont « femmes/hommes, société et démocratie », « dynamiques locales et jeunes à l’ère de la mondialisation », « économie réelle et entrepreneuriat social » et « questions culturelles et enjeux médiatiques ».
Née en 1940 à Fès, Fatéma Mernissi a fait ses études à Rabat puis en France et aux Etats-Unis où elle a animé de nombreux séminaires.
Depuis les années 80, elle enseigne à l’université Mohammed V de Rabat. Sociologue et écrivain de renom, elle mène en parallèle un combat pour l’égalité et l’émancipation de la femme, et crée les « Caravanes civiques » et le collectif « Femmes, familles, enfants ».
La défunte, qui s’est intéressée au statut de la femme dans l’islam, a écrit de nombreux ouvrages qui ont été traduits dans plusieurs langues dont « Sexe, idéologie et Islam », « Le Harem politique », « Sultanes oubliées », « Le Monde n’est pas un harem » et « Chahrazade n’est pas marocaine ».
En mai 2003, l’illustre intellectuelle reçoit, avec Susan Sontag, le prestigieux Prix Prince des Asturies.
En novembre 2004, sa riche biographie et son combat pour l’égalité des sexes ont été récompensés par le Prix Erasmus, décerné par la Fondation néerlandaise Erasmus, ex-aequo avec l’auteur syrien Sadik Jalal Al-Azm et à l’Iranien Abdulkarim Soroush.
Fatéma Mernissi a été également choisie en 2003 membre du comité des Sages pour le dialogue des civilisations, mis sur pied par la Commission européenne sous la présidence de Romano Prodi.