Consommation : Les ménages entre espoir et incertitude pour 2022
Par Mouhamet NDIONGUE
Les problèmes environnementaux s’aggravent. La hausse des prix alimentaires pose un risque important pour 2022. Les impacts de la pandémie et du changement climatique affectent la sécurité alimentaire, en particulier dans les pays en voie de développement. Faut-il s’inquiéter de la baisse des consommations voire de l’inflation ?
Alors que la malnutrition a considérablement diminué ces dernières décennies, l’insécurité alimentaire a de nouveau augmenté ces dernières années, une tendance accélérée par la crise du Covid. Pour Il y a deux implications principales pour l’économie marocaine : un autre choc inflationniste ou une baisse de la consommation des ménages qui devient de plus en plus récurrent, selon les dernières notes du Haut-Commissariat au Plan (HCP).
Sur le plan mondial, la situation s’est améliorée au cours des deux dernières décennies et la malnutrition a considérablement diminué. Mais paradoxalement, la vulnérabilité a considérablement augmenté ces dernières années. La crise énergétique et les problèmes d’approvisionnement minent la production alimentaire mondiale. Le risque d’une hausse des prix ou même d’une pénurie augmente. Cela aura de graves conséquences pour la population, mais aussi des effets économiques qui, dans des cas extrêmes, peuvent entraîner des mouvements sociaux qu’il ne faut pas sous-estimer.
Cependant, la FAO estime que le nombre de personnes sous-alimentées a fortement diminué, de plus de 150 millions, alors que la population a augmenté significativement (+1,3 milliard) sur la même période.
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En conséquence, la proportion de personnes sous-alimentées a chuté de façon spectaculaire, passant de 13,2 % de la population mondiale en 2000 à 8,9 % en 2018. À ce rythme, nous pourrions approcher de zéro d’ici 2030. Un vœu pieux…
Toutefois, une analyse plus détaillée de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) révèle une situation précaire. D’une part, la tendance à la baisse s’est inversée à la fin de la dernière décennie, la FAO observant dans son dernier rapport que « même avant l’apparition de Covid-19, le monde n’était pas sur la bonne voie pour éliminer la faim et la malnutrition d’ici 2030 ».
Maroc, la tendance reste mitigée
Selon le HCP dans son rapport sur la situation économique en 2021 et ses perspectives en 2022, la consommation finale nationale, principale composante de la demande intérieure, aurait progressé de 6,1% en 2021, une croissance équivalente à une contribution de 4,8 points de pourcentage à la croissance du PIB. Cette croissance est tirée principalement par la consommation des ménages, soutenue en 2021 par le raffermissement de leurs revenus, de l’accroissement des prêts à l’habitat et à la consommation ainsi que la bonne tenue des revenus nets en provenance du reste du monde qui auraient cru de 24%.
Plus des deux tiers (67,4 %) des ménages au Maroc ont connu une détérioration de leur niveau de vie au cours des 12 derniers mois.
C’est ce qui ressort d’un rapport du bureau de la planification et des statistiques du HCP. Environ 20 % n’ont constaté aucun changement dans leur niveau de vie et 12,3 % ont constaté une amélioration.
Plus d’un tiers (29,4%) s’attendent à ce que la situation se détériore davantage au cours des 12 prochains mois, 42,5% ne s’attendent à aucun changement et 28,1% voient des améliorations dans les perspectives.
La confiance des consommateurs a chuté. Au quatrième trimestre 2021, 72% des ménages pensaient qu’il était inapproprié d’acheter des biens durables. En outre, 84% s’attendent à ce que les taux de chômage se détériorent davantage au cours des 12 prochains mois, tandis que seulement 6,4% s’attendent à une amélioration.
Selon 51,8% des ménages, leurs revenus sont suffisants pour couvrir leurs dépenses, 44,3% disent avoir épuisé leurs économies ou emprunté de l’argent pour joindre les deux bouts.
Seuls 3,9 % des ménages ont pu mettre de l’argent de côté au cours des 12 derniers mois.
Des prix en augmentation et une perte de pouvoir d’achat des ménages
Comme annoncé par plusieurs organismes économiques, 2022 reste assombri par le variant Omicron. Selon HCP, la décélération de la croissance pourrait également se répercuter sur la croissance des revenus, la consommation et l’épargne nationale. En termes de projections, le revenu national brut devrait ralentir en 2022 pour atteindre un taux de croissance de 2,5%, largement inférieur à la moyenne de 4% réalisée entre 2014 et 2019.
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Toutefois, la consommation finale des ménages devrait augmenter de 2,8% en volume. En revanche, les analystes du HCP notent que sa variation en valeur aurait atteint 4,6%, reflétant une perte du pouvoir d’achat suite à la hausse des prix, qui devraient continuer à augmenter en 2022 au rythme de 1,8%. En effet, le pouvoir d’achat des ménages devrait s’accroître de seulement 0,7% en 2022, accusant ainsi une baisse de son rythme de progression qui est passé d’une moyenne annuelle de 2,4% entre 2000 et 2009 à 1,1% entre 2010 et 2019, soutient le rapport. Une situation qui s’est accompagnée aussi bien par une aggravation de l’endettement des ménages qui s’estime aujourd’hui à plus de 34% du PIB (près de 400 Milliards de DH) et par une décélération de la croissance de leurs crédits à consommation qui est passé d’une moyenne annuelle de 20,5% à 6,6% sur ces deux périodes et de chuter de 4,1% en 2020 avec la crise du Covid. En total, les crédits bancaires devraient s’accroître de 3,7% en 2022, sous l’effet de la poursuite de redressement de la reprise prévue des activités économiques et de l’impact attendu des programmes de soutien des ménages et des entreprises