Errachidia : l’art du Beldi, un patrimoine immatériel

L’art du Beldi ou l’Aïta Filalia, l’une des composantes du patrimoine musical millénaire du Maroc, est assurément le style musical qui habite le cœur des populations de Tafilalet (Province d’Errachidia). Il est la voix qui exprime leur joie, leurs émotions et leurs préoccupations.

Né du Malhoun et inspiré de la beauté du paysage oasien du Sud-Est du Royaume, ce genre musical poétique reflète la vie quotidienne des habitants de cette région historique dans leurs heurs et malheurs. Ses poèmes abordent tous les thèmes : spirituels, intellectuels et autres, sous des formes artistiques de toute beauté, alliant la splendeur des instruments musicaux traditionnels à celle des mots pesés.

Le Beldi, qui se joue principalement à l’oud, au sintîr, à la darbouka, au tarra, et au kllal, a vu le jour à Ksar Souk (l’actuelle Errachidia), plus précisément dans la commune de Chorafa Mdaghra, avant de se propager dans les villes voisines, dont Erfoud, Rissani, Tinghir… sous l’impulsion des pères fondateurs de cet art populaire.

Parmi les maîtres fondateurs de cette musique, reconnue par l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (ISESCO) en tant que patrimoine immatériel purement marocain, figurent Cheikh Mohamed Baout, Moulay Ali Belmesbah, Aroub Ould Allou, Aicha Zaqoud, Abdallah Zanbil, Mouloud Lkaoui, Youssef Bouri, Rakou Dib et Mouloud El Meskaoui.

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« Notre art du Beldi ne se résume pas à de belles paroles et à des chants rythmés, il est bien plus. Il est le registre musical traditionnel de notre région et un riche trésor culturel pour notre mémoire collective », estime le maître Mouloud El Meskaoui, considéré comme l’unique successeur de Mohamed Baout, figure emblématique de ce genre musical.

Dans une déclaration à la MAP, maître El Meskaoui souligne que l’art du Beldi joue un rôle d’avant-garde pour résoudre un certain nombre de problèmes sociaux de cette région et promouvoir les valeurs de tolérance, de compassion, de compréhension et de coexistence.

« Le chant du Beldi instruit nos enfants et nos jeunes et crée le bonheur des amateurs et des créateurs issues des catégories sociales les plus diverses. C’est un art qui appelle à s’attacher à tout ce qui est beau », relève le musicien.

Abordant le volet musical de cet art, maître El Meskaoui explique que le Beldi est riche de ses rythmes, ses paroles poétiques et ses mélodies captivantes qui offrent aux chercheurs un domaine d’investigation fertile à explorer.

Pour Abdessadek Salem, chercheur spécialiste de l’art du Beldi et du patrimoine culturel de Tafilalet, ce style musical joue un rôle de trait d’union entre le passé et le présent de la région en interprétant les mutations sociales, économiques et culturelles et en diffusant les valeurs authentiques des habitants de la région.

« Cet art populaire repose beaucoup sur l’improvisation ainsi que sur des rythmes qui lui sont propres et des chants caractéristiques appelés +mayat+ », note le chercheur dans une déclaration à la MAP, ajoutant que les paroles du Beldi se distinguent par un jargon spécifique de la région.

Said Karimi, professeur à la Faculté polydisciplinaire d’Errachidia et chercheur en culture anthropologique, observe, pour sa part, que la jeunesse de la région d’Errachidia accorde un intérêt grandissant à l’art du Beldi.

« Il y a des jeunes qui souhaitent percer dans ce domaine. Ces dernières années ont vu l’émergence de nouvelles perceptions artistiques de l’art du Beldi, ainsi que l’introduction d’instruments de musique modernes, tels que le violon, la guitare électronique et les effets sonores », a-t-il fait remarquer.

M. Karimi, par ailleurs président du Conseil de la commune d’Errachidia, s’est montré optimiste quant à la préservation et la transmission de ce patrimoine immatériel aux générations futures.

« Grâce à la population et à la jeunesse de la région d’Errachidia, le Beldi restera toujours vivant et prospère. Les habitants de cette région sont très attachés à leur authenticité et apprécient tout ce qui est authentique », a-t-il assuré.

Avec MAP

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