Sénégal : la communauté internationale appelle Macky Sall au respect de la constitution

Le Sénégal, pays qui se targuait d’être un exemple de démocratie en Afrique, vient de subir un « coup de force » de la part de son président, Macky Sall. Celui-ci a décidé de reporter le scrutin présidentiel prévu le 25 février 2024, sous le prétexte « fallacieux » de crise institutionnelle. Cette décision, jugée « arbitraire et illégal », par l’opposition, la société civile et plusieurs organisations socioprofessionnelles, prolonge de facto le mandat du président, au pouvoir, et lui permet de se maintenir à la tête du pays sans l’aval du peuple.

Triste fin pour le président Macky, arrivé au pouvoir en 2012. A son arrivé, l’homme cristallisait beaucoup d’espoir pour un peuple qui voulait s’engager dans une dynamique de développement à l’instar des pays anglophones du continent. Mais à quelques semaines de la fin de son mandat, Macky Sall a trouvé des subterfuges pour se maintenir au pouvoir déclenchant encore une fois une fois manifestation, comme celles de 2021, et ayant fait 14 morts. La décision de Sall a provoqué la colère et l’indignation de la population sénégalaise, qui voit ses droits et ses libertés bafoués par un régime autoritaire. L’opposition et la société civile ont dénoncé cette violation de la Constitution sénégalaise et du calendrier électoral, et ont appelé à la mobilisation générale pour exiger le respect de la démocratie. Des manifestations pacifiques ont été violemment réprimées par les forces de l’ordre, faisant plusieurs blessés et morts. Celle du vendredi 9 et samedi 10 ont pour l’instant occasionné deux morts.

Face à cette crise politique sans précédent, la communauté internationale a exprimé sa préoccupation et son soutien au peuple sénégalais, qui aspire à exercer son droit de vote dans des conditions transparentes et inclusives. Plusieurs organisations et pays ont condamné la décision de Macky Sall et ont appelé à son retrait immédiat. Ils ont également demandé aux autorités sénégalaises de garantir les libertés fondamentales, et notamment celles de manifester pacifiquement et de s’exprimer publiquement, qui sont des principes fondamentaux de l’État de droit.

L’ONU appelle au respect de la constitution

Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a appelé les acteurs nationaux à engager le dialogue, à maintenir un environnement politique pacifique, à s’abstenir de recourir à la violence et à assurer la tenue d’une élection présidentielle inclusive et transparente dans le cadre de la constitution sénégalaise. Son porte-parole, Stéphane Dujarric, a déclaré, vendredi 9 février, lors d’un point de presse que le chef de l’ONU « réaffirme l’engagement des Nations Unies à continuer de soutenir la consolidation de la démocratie et la promotion de la paix, de la stabilité et du développement au Sénégal ». Toutefois, ces appels au dialogue et à la paix semblent bien vains face à l’entêtement de Macky Sall, qui refuse de reconnaître sa faute et de céder à la pression populaire.

L’Union africaine exprime sa préoccupation

Le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a exprimé sa « préoccupation » suite au report des élections présidentielles au Sénégal, dans un communiqué diffusé dimanche dernier. « La situation politique dans ce pays où le modèle politique a toujours été apprécié avec haute appréciation ne saurait laisser aucun africain indifférent », a-t-il déclaré, soulignant l’importance du respect de la légalité constitutionnelle et du processus électoral. Il a également appelé au calme et à la retenue, et a réitéré la disponibilité de l’Union africaine à accompagner le Sénégal dans la préservation de sa démocratie et de sa paix. Cependant, ces déclarations restent trop timides et trop générales pour avoir un impact réel sur la situation. L’Union africaine devrait prendre des mesures plus fermes et plus concrètes pour faire respecter les normes démocratiques et sanctionner les violations commises par le régime de Macky Sall, dont les populations appellent aujourd’hui « junte ».

L’Union européenne appelle au respect de la tradition démocratique

L’Union européenne et le Sénégal sont liés par des relations humaines, politiques et économiques étroites depuis des décennies, rappelle Bruxelles dans un communiqué. La longue et solide tradition démocratique du Sénégal et des valeurs partagées, telles que l’aspiration au dialogue et au consensus politique, ont toujours été des éléments importants d’une coopération basée sur la confiance.

Ainsi, l’Union européenne a exprimé ses préoccupations suite à la décision des autorités sénégalaises de reporter le scrutin présidentiel, qui risque d’entacher la longue tradition démocratique au Sénégal et d’ouvrir une période de grande incertitude pour le pays. Dans une déclaration du haut représentant au nom de l’Union européenne, Josep Borrell, l’UE a appelé les autorités du Sénégal à respecter les aspirations légitimes des citoyens et de toutes les forces vives de la nation à préserver la démocratie. Les libertés fondamentales, et notamment celles de manifester pacifiquement et de s’exprimer publiquement, sont des principes fondamentaux de l’État de droit que les autorités sénégalaises se doivent de garantir.

L’UE a lancé un appel aux autorités à prendre les mesures nécessaires afin d’organiser l’élection présidentielle le plus rapidement possible, en conformité avec la Constitution du Sénégal et le Protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance. « Les citoyens sénégalais doivent pouvoir choisir leurs dirigeants politiques par la voie électorale dans le respect de l’État de droit, et dans les délais impartis », précise l’UE. Il est primordial de maintenir l’image du Sénégal comme pilier de démocratie et de stabilité dans la région et sur le continent africain. L’UE a appelé aussi l’ensemble des acteurs à régler leurs différends à travers un dialogue responsable et les voies de recours pacifiques prévues. Ces appels sont certes louables, mais ils ne suffisent pas à faire plier Macky Sall, qui semble faire fi des principes démocratiques et des engagements internationaux. Toutefois, les Sénégalais appellent l’UE devrait user de son influence économique et politique pour faire pression sur le régime et le contraindre à respecter la volonté du peuple.

Les États-Unis soutiennent la déclaration de la CEDEAO

Les États-Unis également réagi au report de l’élection présidentielle. L’Ambassade américaine à Dakar a indiqué dans un communiqué que les États-Unis soutiennent la déclaration de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) appelant le Sénégal à rétablir le calendrier électoral conformément à sa Constitution. « Nous avons entendu un large éventail d’acteurs sénégalais de la politique et de la société civile qui partagent ce point de vue et nous continuons à rester en contact avec toutes les parties prenantes concernées pour réitérer notre soutien à des élections libres, équitables et dans les meilleurs délais », a ajouté l’Ambassade. Néanmoins, ces déclarations restent trop « diplomatiques et trop prudentes », selon les Sénégalais pour avoir un effet dissuasif sur Macky Sall.

La CEDEAO suit avec préoccupation l’évolution de la situation

La CEDEAO, organisation régionale regroupant 15 pays d’Afrique de l’Ouest, dont le Sénégal, a dit « suivre avec préoccupation l’évolution de la situation au Sénégal » et « déconseiller toute action ou déclaration » pouvant aller « à l’encontre » de la Constitution et « encourager » la classe politique à « rétablir le calendrier électoral ». Dans un communiqué, la CEDEAO a affirmé qu’elle prendra « toutes les mesures nécessaires pour accompagner » le Sénégal et « maintenir » sa « tradition démocratique ». Elle a également exhorté les acteurs politiques et sociaux à privilégier le dialogue et la concertation, et à éviter toute forme de violence. Toutefois, la situation reste tendue au Sénégal où de plus en plus de voix se lèvent pour demander au respect de la constitution. De grandes manifestations sont d’ailleurs prévues la semaine prochaine où une coalition hétéroclite dénommée « Aar sunu élection » (protéger notre élection) et qui engrange de plus en plus de membres, appelle à barrer la route à Macky Sall. Les lendemains du Sénégal restent incertains.

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