« Uber Files » : les autorités italiennes sur la sellette
Les chauffeurs de taxi italiens, qui protestent déjà depuis des semaines contre un projet de loi sur la concurrence, ont arrêté, il y a deux jours spontanément, le service dans toute l’Italie après la publication de l’enquête sur les fichiers Uber. Ils croient une main derrière la libéralisation des licences du transport privé de passagers imposée par le chef du gouvernement Italien Mario Draghi.
Lundi, des représentants de chauffeurs de taxi italiens, à Rome, se sont enchaînés aux clôtures de fer de la Piazza Colonna, dans le centre-ville de la capitale italienne. D’autres représentants des chauffeurs de taxis manifestent dans les rues du centre. « Après le scandale des fichiers Uber – expliquent les chauffeurs de taxi au site italien Ansa – nous voulons de la clarté et de la transparence sur une histoire qui, à ce stade, prend des contours grotesques ». Manifestations également à Naples où ce matin environ 500 chauffeurs de taxi se sont mis en grève occupant la place avec plus de 300 voitures blanches, pour protester contre la libéralisation du secteur qui conduirait à l’introduction sur le marché de multinationales telles que Uber.
→ Lire aussi: Révélation de liens privilégiés entre Macron et Uber
La publication des dossiers Uber a mis en lumière dans des documents confidentiels qui révèlent comment Uber a mené, pendant des années, une gigantesque campagne de lobbying, mettant la pression sur les dirigeants politiques, les premiers ministres, les présidents, les milliardaires, les oligarques, les magnats des médias, pour devenir des leaders dans le secteur des transports, bouleversant le secteur des taxis. Tout cela tout en pouvant compter sur des soutiens de haut niveau comme Emmanuel Macron, lorsqu’il était ministre de l’Economie, et l’ancienne commissaire européenne Neelie Kroes. « Nous voulons savoir de qui le patron d’Uber a été reçu au Palazzo Chigi et de quoi on a parlé » ont tonné les syndicats de taxis italien, parlant de « scénarios inquiétants » en référence à une réunion qui a eu lieu fin mai avec le PDG mondial de l’entreprise, « à un moment où – expliquent-ils – sans raison apparente les chauffeurs de taxi ont été inclus dans le projet de loi sur la concurrence, malgré le fait que la libéralisation du service n’est pas prévue par la directive européenne », rapporte le média italien.
Les chauffeurs de taxi s’opposent particulièrement aux passages de l’article 10 du projet de loi italien sur la concurrence qui font référence à une « adaptation de l’offre de services aux formes de mobilité qui s’effectuent par l’utilisation d’applications Web », à la « réduction des obligations administratives supportées par les opérateurs de services publics non réguliers et à la rationalisation de la législation aux tarifs et aux systèmes de travail posté » et la « promotion de la concurrence, y compris lors de l’octroi de licences ».
Dans les plus de 124 000 documents internes obtenus par le Guardian, qui couvrent une période de cinq ans au cours de laquelle Uber a été dirigé par Travis Kalanick, qui a démissionné en 2017, il y a aussi l’Italie. En fait, l’autre média italien L’Espresso rend compte d’une campagne de pression, menée entre 2014 et 2016, dans le but d’accrocher et de conditionner le Premier ministre de l’époque, Matteo Renzi, et certains ministres et parlementaires du Parti démocrate. Le leader d’Italia Viva a expliqué qu’il n’avait « jamais suivi personnellement » les questions des taxis et des transports et que, cependant, son gouvernement n’avait approuvé aucune mesure en faveur du géant californien.