Vers la nécessaire flexibilité des changes?
Hicham Bensaïd Alaoui
Depuis de nombreuses années, la valorisation du dirham marocain est artificiellement figée en fonction des étalons « euro » et « dollar américain », monnaies de référence des principaux partenaires économiques du Royaume.
Par voie de conséquence, et contrairement à l’essence même d’une monnaie nationale, sensée refléter en théorie les évolutions et les grandeurs macro-économiques ou sociales d’un pays, le dirham marocain semble davantage traduire les équilibres ou déséquilibres en vigueur dans l’Union Européenne ou chez l’Oncle Sam. A ce titre, l’amendement opéré en 2015 dans la composition du panier de cotation du dirham, désormais indexé à 60% sur l’euro et à 40% sur le dollar, contre une parité à 80-20 auparavant, n’avait été opéré que pour mieux refléter la structure des échanges économiques du Royaume, de plus en plus libellés en dollar.
Car si le système actuel de change en vigueur chez nous ne semble pas refléter réellement l’évolution de nos principaux agrégats économiques, au contraire, par exemple, du dinar algérien, du cedi ghanéen, du naira nigérian ou encore du real brésilien, il a de fait, a minima, le mérite, non négligeable, de contenir l’inflation à des niveaux maîtrisés, mais également de ne pas exposer l’endettement et les déficits jumeaux à des fluctuations de change exogènes. Considérons l’exemple ci-après pour illustrer davantage le propos : soit un emprunt de 10 millions d’euros octroyé par la France en 2010, et remboursable en 2017. Si le pays bénéficiaire de l’emprunt est l’Algérie, dont le dinar a ‘décroché’ substantiellement (-30%) depuis 2010, l’impact sur les finances du pays serait mécaniquement négatif, tout simplement parce qu’il faudrait 30% de dinars supplémentaires pour rembourser le capital initialement souscrit. Le débat est tout autre pour le Maroc, en raison justement de l’indexation en amont du dirham sur l’euro, annihilant ainsi, techniquement, tout risque de déflation majeure de la monnaie et donc de surenchérissement de l’endettement.
Impact positif donc du point de vue de l’endettement… Mais quid des autres grandeurs macro-économiques, et au-delà, des équilibres sociétaux?.