Alger crée un G4 pour suppléer les instances légales de l’Union africaine

Par Taieb Dekkar (*)

Il faut reconnaitre que l’Algérie est réellement «un pays pivot» dans la déstabilisation du Maghreb, du monde arabe et du continent africain.

L’Algérie veut transposer son modèle de gouvernance, qui manque cruellement de légitimité et qui est décrié par le peuple algérien lui-même, au Maroc et en Afrique. Le Hirak, mouvement populaire spontané, qui a éclaté en février 2019 et qui s’est poursuivi, pendant deux ans, mobilisant des millions d’algériens, tous les mardis et vendredi, ne se serait pas tu, sans la répression massive et féroce du pouvoir. Le Hirak clamait à l’adresse du pouvoir et de l’armée «dégage», «pouvoir civil et non militaire».

Le peuple algérien frère, en dépit de plusieurs révoltes populaires, en 1988, en 1992, puis en 2019, n’a pas pu s’affranchir du joug de la junte militaire qui dirige le pays d’une main de fer.

Certains hommes «politiques» algériens, sortis du ventre du FLN, un parti en partie responsable de la tragédie actuelle du peuple algérien, et des médias algériens, connus pour leurs liens avec les services de renseignements, proposent aux marocains, leur modèle de gouvernance, en d’autres termes, une république sur le triste et sinistre modèle algérien, qui prive le peuple algérien, bien que doté de pétrole et de gaz, des pommes de terre, des lentilles, d’eau potable dans les robinets dans la capitale, de l’huile, de lait.

Voici pour vous, marocains, un modèle de «république, démocratique et populaire», riche en ressources du sous sol, qui expose son peuple à la misère. Cette situation, qui a trait à la survie et à l’existence de la population, est couplée à la fermeture absolue et totale du pays, aux libertés et à la démocratie. L’armée, dont le rôle central dans la gouvernance du pays, est contesté par le peuple, s’oppose depuis 1965, à l’émancipation du peuple algérien, qui a payé un lourd tribut, en pertes humaines, qui vient s’ajouter aux sacrifices consentis pour l’indépendance.

→ Lire aussi : La politique de répression du régime algérien vise à réduire au silence toute dissidence

Dès que les intérêts de la junte sont en jeu -il n’y a pas lieu de confondre ces intérêts avec ceux du peuple- le pouvoir algérien innove en matière diplomatique, pour enrayer son isolement ou prévenir une débâcle diplomatique en perspective.

Prévoyant une grave «disette» diplomatique, au niveau du Conseil de sécurité, lors des prochains exercices où Alger ne dispose d’aucun pantin pour soutenir ses visées, le diplomate «chevronné», qui somnolait récemment, lors d’un sommet dans le golfe, a convoqué à Oran les pays africains, anciens et nouveaux membres du Conseil de sécurité, pour «coordonner» les positions du continent africain devant cette tribune. Dans l’esprit de Lamamra, cette coordination revêt une seule signification: une coordination contre le Maroc.

D’autre part, et maintenant que la présidence de l’Union africaine est assumée par le Sénégal, et que le Royaume siège au sein du Conseil de sécurité et de la paix, longtemps monopolisé par Alger, notre voisin de l’Est, fait preuve d’ingéniosité pour trouver un format qui se substituerait provisoirement, ou qui suppléerait les nouvelles instances légales de l’Union africaine, et qui déciderait à leur place, redoutant une marginalisation de sa cause par les nouvelles instances de l’Union africaine, dont la composition est théoriquement favorable aux thèses marocaines.

Ainsi, Alger aurait concocté, en marge du sommet de Bruxelles, la mise en place d’un G4, un collège de quatre chefs d’Etat (Nigéria, Ethiopie, Algérie, Afrique du Sud), dont les pays reconnaissent tous la RASD algérienne, qui devrait être réactivé au sein de l’Union africaine, pour contribuer à la résolution des crises et défis qui prévalent sur le continent africain. Il s’agit pour le G4 d’accompagner l’Union africaine, en proposant des solutions concrètes.

Redoutant la marginalisation de sa cause première, Alger crée donc un semblant d’autorité «suprême» africaine, qui viendrait se substituer aux instances légales de l’Union africaine, pour enrayer en quelque sorte, toute décision ou proposition, qui irait à l’encontre de ses positions.

La constitution de cette nouvelle entité est contestable. La présidence de l’Union africaine devrait repousser cette initiative, qui vient empiéter sur les instances légales, leurs prérogatives, et leur mandat.

(*) Journaliste et écrivain

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