Karim Medrek : «L’Australie considère le Royaume comme un partenaire privilégié dans la région» (Suite)

En 2017, le Maroc a été le seul pays arabe à avoir été retenu par l’Académie diplomatique australienne pour prendre part à son cycle de formation. Peut-on dire que sur le plan diplomatique, il y a plus de connexion entre les appareils diplomatiques des deux pays ?

– C’est bien le but derrière cette participation. Le programme existe depuis un certain nombre d’années, mais il a été redynamisé l’année dernière avec la participation d’une diplomate marocaine aux travaux de ce cycle de formation, aux côtés des futurs diplomates australiens et de nombreux autres pays.
Effectivement, cela permet de renforcer les connexions existantes et de forger des réseaux particulièrement actifs, entre les diplomates de demain. Il est, ainsi, fort probable que les diplomates issus de cette formation se retrouvent, un jour ou l’autre, affectés dans un même poste diplomatique ou dans leurs pays respectifs.
D’ailleurs, l’Académie marocaine des Études diplomatiques a conduit, en 2017, avec grand succès, un cycle de formation spécialement dédié aux diplomates des Etats insulaires du Pacifique. Ce stage, qui a combiné les aspects pratiques et théoriques relatifs à la diplomatie et aux grandes questions d’actualité internationale et régionale, a permis à une douzaine de diplomates en herbe, issus de ces pays, de mieux connaître le Maroc et l’Afrique et d’approfondir leurs connaissances sur la région et sur certaines questions et domaines intéressant le Royaume.
Je vous laisse donc imaginer par vous-même l’impact positif qu’a ce genre de programme de formation sur les relations entre le Maroc et ces pays.
J’espère que, dans un proche avenir, nous réussirons à mettre en place un partenariat et une coopération pérennes entre l’Académie marocaine des Études diplomatiques et son homologue australienne.

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Comment évoluent les relations avec la Nouvelle-Zélande ?

– Je dois, tout d’abord, vous dire que c’est un pays fascinant avec une culture riche et un modèle de société extrêmement dynamique. Nous avons, avec ce pays, des relations basées sur un dialogue continu et empreint de franchise, visant à poursuivre le développement de nos relations bilatérales.
D’ailleurs, c’est dans cette logique que nous avons récemment conclu deux Mémorandums de grande importance, portant, pour le premier sur l’établissement d’un mécanisme de consultations politiques entre les ministères des Affaires étrangères des deux pays et pour le second sur la coopération dans les domaines économique, scientifique, culturel et technique.

Des consultations politiques approfondies entre les hauts fonctionnaires des ministères des Affaires étrangères des deux pays, auront lieu incessamment et devraient permettre de tracer la voie à un renforcement des relations avec la Nouvelle-Zélande, dans différents secteurs.
Toutefois, la diplomatie officielle, à elle seule, ne peut remplir tous les besoins d’une relation partenariale approfondie et requiert, essentiellement, un appui de la part du secteur privé pour pouvoir identifier et développer de nouvelles voies de coopération. Il y a, également, des opportunités palpables de tirer profit de l’expérience néo-zélandaise dans des domaines tels que l’agriculture, l’éducation et la formation, mais aussi, dans la gestion locale et les politiques de développement.
Par ailleurs, le Maroc et la Nouvelle-Zélande ont, tous deux, des objectifs ambitieux en matière de protection de l’environnement. Le partage des expériences respectives des deux pays ne peut qu’apporter une contribution significative au processus de mise en place des politiques nationales en la matière. Cela devrait, aussi, permettre d’exploiter les capacités respectives des deux pays, en matière de recherche et de développement, dans ce secteur doublement prometteur des points de vue environnemental et économique.

L’ambassadeur du Maroc aux Fidji présentant ses lettres de créance au Président de la République.

 Le rôle que joue le Maroc dans la résolution d’enjeux globaux, allant du changement climatique aux questions de développement et la place grandissante qu’occupe désormais le Royaume à travers la région pourraient-ils donner une nouvelle dimension au partenariat avec les pays du Pacifique ?

– En effet, les questions relatives au changement climatique constituent une source de préoccupation concrète pour les pays de la région. Ils sont les premiers à être menacés et certains Etats insulaires risquent même de disparaître tout simplement, dans les années à venir, en raison de la montée des eaux des océans. Plus globalement, ce phénomène inquiétant affecte ces pays, également, du point de vue des ressources et des moyens de subsistance.
C’est pour cela que le rôle du Maroc, en tant que président de la COP 22 et le dynamisme de notre présidence, surtout, le fait qu’elle ait été orientée, essentiellement, vers les Etats du Sud, ont marqué la perception de notre pays, par ces Etats. Le fait que la présidence de la COP ait été reprise, directement après par Fidji, a contribué à consolider les liens entre le Maroc et l’ensemble de ces Etats. D’ailleurs, le passage de flambeau qui a eu lieu, en octobre 2017, était un moment qui a, remarquablement, illustré l’adhésion du Maroc aux principes d’une coopération Sud-Sud, solidaire et fraternelle.
De plus, le Maroc avait, depuis 2013, lancé un processus de rapprochement avec les Etats insulaires du Pacifique, à travers le Forum Maroc-Etats du Pacifique qui a conduit à l’adoption de plans d’actions bilatéraux portant sur des secteurs divers, tels que la formation des cadres, la coopération technique, culturelle et économique, entre autres. Ces plans d’action fournissent un cadre général, appelé à être progressivement développé et consolidé.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le Maroc offre, depuis de nombreuses années déjà, des bourses en faveur des étudiants de ces Etats, qui souhaitent poursuivre leurs études au sein des Universités marocaines. Des dizaines d’étudiants des Etats du Pacifique ont bénéficié de ce programme, particulièrement apprécié, en raison des horizons nouveaux qu’il leur ouvre, dans des domaines qui font, parfois, défaut aux systèmes éducatifs de leurs pays.

Mr. l’Ambassadeur, parlez-nous de la communauté marocaine en Australie.

– Les Marocaines et Marocains vivant en Australie et en Nouvelle-Zélande sont très attachés à leur pays d’origine et fiers de leur culture millénaire. Cet attachement se manifeste, d’ailleurs, par le maintien des liens culturels et cultuels et par la régularité des visites qu’ils effectuent au Royaume, malgré la distance. Ceci ne les empêche pas, pour autant, d’être très bien intégrés dans leur pays d’accueil.
A chaque fois où j’ai eu l’occasion de les rencontrer, je constate à quel point nous disposons de réelles potentialités. Des gens qualifiés, responsables et pleinement épanouis. La société australienne bénéficie, largement, des compétences d’origine marocaine : des professeurs universitaires, médecins, ingénieurs, Chefs d’entreprises, informaticiens, sans oublier les artistes, sportifs et plusieurs chefs de la gastronomie marocaine.
Il y a, également, de plus en plus d’étudiants, qui sont inscrits dans les prestigieuses universités australiennes. J’ai rencontré de brillants doctorants à Canberra, Brisbane et Adelaïde, dans divers secteurs de recherche de pointe.
A ma prise de fonction, l’une de mes préoccupations a été de prendre contact avec mes compatriotes résidant dans les différentes juridictions. Malgré la spécificité de l’Australie : un État-continent, j’ai eu le plaisir de rencontrer les Marocains de Sydney, Adélaïde ou encore Auckland en Nouvelle Zélande. Je compte me rendre, dans les prochains mois à Melbourne, Brisbane et Perth pour interagir avec les autres membres de la communauté marocaine.
Par ailleurs, le poste a mis en place de nombreux moyens de communication et d’interaction avec nos concitoyens, qui résident parfois à de grandes distances de l’Ambassade. Une série de mesures visant à simplifier les procédures administratives et les faciliter ont, également, été parmi les priorités de l’action de l’Ambassade, dans le domaine consulaire.
Actuellement, nous estimons les ressortissants marocains résidant en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans certains Etats du Pacifique à un peu plus de 10.000 personnes.
Nos statistiques se basent sur le registre de notre service consulaire, qui renseignent sur les ressortissants ayant eu recours au service du consulat, tout en tenant compte, également, des statistiques officielles des pays d’accueil. Toutefois, il n’est pas facile d’évaluer le nombre des ressortissants marocains résidant en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans certains Etats du Pacifique. En effet, les chiffres diffèrent, selon les sources et approches statistiques retenues, ce qui constitue un obstacle au croisement des données et à leur interprétation. Nous sommes tributaires de plusieurs autres paramètres.
À titre d’exemple, dans les statistiques de la population étrangère, telles que publiées par les services d’immigration australienne, elles ne comptabilisent ni les enfants nés de mère ou de père marocain naturalisé, ayant acquis la nationalité du pays d’accueil, ni les Marocains ayant une double nationalité ou ayant utilisés un autre passeport pour entrer en Australie. Cela explique en grande partie, les écarts observés entre les chiffres publiés par le pays d’accueil ou certains organismes, et les chiffres qui sont en notre possession.

Après un peu plus d’une année d’exercice, quels sont les progrès réalisés et quels sont vos objectifs et les initiatives retenues pour 2018 ?

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p style= »text-align: justify; »>- En diplomatie, il est souvent difficile de mesurer précisément les progrès et les réalisations. Toutefois, il est indéniable que sur le plan politique, les relations avec l’ensemble des pays du Pacifique ont été empreintes de dynamisme et de bonne volonté.
La visibilité du Maroc dans la région a été fortement amplifiée par l’organisation de diverses activités de diplomatie publique, en particulier au sein des universités australiennes et par une utilisation accrue des moyens de communication digitale.
L’action culturelle a également, connu un renforcement notable, en particulier en Australie grâce à une présence régulière dans des événements de grande envergure, visant à faire connaître notre histoire millénaire et notre culture diversifiée, ainsi que les atouts touristiques uniques dont dispose le Royaume.
Ceci devrait se poursuivre en 2018. Néanmoins, la promotion économique est, sans aucun doute, la pierre angulaire de notre plan de travail pour l’année en cours. D’ores et déjà, des initiatives concrètes ont été lancées. Elles devraient se poursuivre et s’accroître durant cette année, non seulement en direction de l’Australie, mais également, de la Nouvelle-Zélande et des Etats du Pacifique.

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