Tourisme: les agences de voyages perturbées par les plateformes digitales

Par Zahira Bechari 

Alors que le secteur du tourisme cherche à se remettre des effets de la pandémie de COVID-19, la concurrence des plateformes en ligne vient à son tour perturber la reprise de certains acteurs du secteur. Les agences de voyages qui ont traditionnellement joué un rôle clé dans la promotion et la vente de voyages au Maroc, sont confrontées à des défis pour maintenir leur part de marché face à la concurrence numérique.

Les agences de voyages au Maroc font face à une concurrence de plus en plus féroce de la part des plateformes digitales, telles que Booking, Expedia, AirBnB, Lilgo  et d’autres acteurs. Ces plateformes ont révolutionné la manière dont les voyageurs réservent leurs hébergements, vols, et autres services de voyage. Elles offrent des options de réservation en ligne très facile avec souvent des tarifs compétitifs, et une disponibilité 24h/24. Autre atout, elles offrent aussi une commodité et une accessibilité accrues via leurs interfaces en ligne conviviales

Les méfaits du digital rarement soulevé 

Les plateformes digitales, telles que Booking, Expedia, et d’autres, ont gagné en popularité auprès des voyageurs qui cherchent à réserver leurs voyages en ligne de manière rapide et facile. Ces plateformes offrent souvent une gamme de choix d’hébergement, de vols et d’activités, avec des options de comparaison de prix et des avis de voyageurs. En conséquence, les agences de voyages au Maroc se retrouvent confrontées à une concurrence accrue de ces plateformes en ligne, ce qui a largement affecté leur capacité à attirer et à fidéliser les clients. Toutefois, certaines agences de voyages marocaines ont tenté de se digitaliser, à l’exemple de Atlas Voyages qui a déjà lancé son API (Application Programming Interface) en 2018 pour mieux vendre la destination Maroc, en plus de Monarch Travel, une autre agence de voyages marocaine, qui prévoit toujours de doubler son chiffre d’affaires global grâce à son site de réservation en ligne. Cette dernière ayant espéré vainement atteindre plus de 70% de son chiffre d’affaires via le canal en ligne vers l’année 202 s’est trouvée  d’emblée abattue contre les différents acteurs en ligne, notamment Booking.com qui détient le monopole des réservations et qui se veut difficile à détrôner.

La fédération des agences de voyages appelle le gouvernement à protéger le secteur

Face à cette concurrence croissante des plateformes digitales, la fédération des agences de voyages au Maroc a appelé le gouvernement à prendre des mesures pour protéger le secteur, exprimant ainsi ses préoccupations quant à l’impact de la concurrence des plateformes en ligne sur les agences de voyages traditionnelles, notamment en ce qui concerne les avantages concurrentiels, les coûts de fonctionnement et les réglementations. Mohammed Semlali, Président de la Fédération Nationale des Agences de Voyage du Maroc (FNAVM), dénonce la concurrence déloyale des plateformes de réservation hôtelière en ligne. Cette concurrence, subie depuis des années sans que le Maroc puisse riposter, est jugée totalement inadmissible par M. Semlali. Il souligne le fait qu’un résident marocain de Rabat doit parfois, voire souvent, passer par une plateforme étrangère pour réserver une nuitée à Agadir, ce qui est inacceptable.

La fédération des agences égrène les pertes 

Décidément, la concurrence des plateformes numériques a eu de fortes répercussions financières sur les agences de voyages au Maroc. La fédération des agences de voyages estime que les agences traditionnelles subissent des pertes financières en raison de la concurrence des plateformes en ligne, que ce soit en raison d’une baisse du volume des ventes, d’une diminution des marges bénéficiaires ou d’autres défis financiers découlant de cette concurrence. En conséquence, les pertes actuelles sont estimées à environ 30% des nuitées réservées par les nationaux. Widad Benhammou, directrice du groupe Terratour, souligne que les Marocains contribuent à une fuite de devises, sans que l’État puisse exercer un contrôle sur la perte de recettes, qui sont en outre défiscalisées. Elle s’indigne également du fait qu’un hôtel appartenant à un Marocain doive payer des commissions en devises à une plateforme étrangère pour que les clients nationaux puissent réserver une chambre, tout en exprimant sa préoccupation devant la dépendance croissante des hôteliers envers ces plateformes, représentant jusqu’à 80% de leur chiffre d’affaires, une situation qu’elle considère comme inacceptable.

Enfin, il est important de noter que les défis financiers et les pertes déclarées peuvent varier en fonction de la taille et de la nature spécifique des agences de voyages au Maroc. Les petites agences locales, en particulier, pourraient être plus vulnérables à la concurrence des plateformes digitales en raison de leur capacité limitée à investir dans la technologie et le marketing en ligne. Cela peut également avoir un impact sur l’emploi dans le secteur, avec la possibilité de réductions de personnel dans certaines agences de voyages traditionnelles. Il est donc essentiel pour les agences de voyages traditionnelles et pour le gouvernement marocain de prendre des mesures pour atténuer les défis posés par la concurrence des plateformes digitales. Cela pourrait inclure des efforts pour promouvoir les avantages des agences de voyages traditionnelles, tels que le service client personnalisé, l’expertise locale et la connaissance approfondie du marché, ainsi que la mise en place de réglementations équitables pour les agences de voyages en ligne et traditionnelles. La collaboration entre les agences de voyages et les plateformes digitales pourrait également être explorée pour créer des partenariats gagnant-gagnant et optimiser les opportunités offertes par la transformation digitale du secteur du tourisme. 

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