« Tu mérites mieux » ou le pari gagnant de Aziz Akhannouch

Par Hassan Alaoui

Il a le panache et la conviction chevillée au corps. Lorsqu’il gravit les marches de l’estrade, convié par l’animateur qui a déjà chauffé la salle, Aziz Akhannouch, vent debout est tout de suite dans la plongée, dans la mêlée ;  il n’a pas de mots assez forts pour emporter immédiatement l’adhésion des militants du RNI venus l’écouter dans ce décor populaire qui ressemble à une soucoupe de Lâaouina al-Harra. Nous sommes au dernier meeting de la tournée de cinq étapes que le parti a organisées cette première semaine du mois de juin.

A Casablanca, bien sûr, après Agadir, Marrakech, Tanger et Oujda. La métropole économique a valeur de symbole, parce qu’elle concentre pas moins de 60% de l’activité économique nationale et incarne la diversité, le cosmopolitisme et un potentiel urbain sans commune mesure avec les autres villes. Elle symbolise également, dans la foulée, la grande cité urbaine qui est un des enjeux majeurs inscrits dans la feuille de route du RNI qui, précurseur en la matière, a lancé le thème des Cent villes, se projetant dans la décennie en cours, anticipant sur l’urbanisation inexorable qui sera le futur visage du Royaume…

Aziz Akhannouch a le charisme d’un leader, confronté à des adversaires qui n’arrivent pas à le déstabiliser, parce qu’il incarne, outre la jeunesse en politique, l’anti-modèle de la classe des « chevronnés ». D’aucuns se sont employés, au sein de tous les autres partis, ouvertement ou sous cape, à critiquer sa montée en puissance, son statut d’entrepreneur, d’employeur de milliers de personnes, de « riche » même et de chef de file du centre-droit sur l’échiquier. Du centre droit à fibre libérale – qu’il faut plutôt qualifier de « social-démocrate », au regard de la dimension sociale que comporte son programme sur lequel s’adosse désormais sa campagne pour les élections de septembre 2021.

« Tu mérites mieux ! Le slogan sonne comme un cri de cœur, il est devenu l’emblème médiatique qui accompagne toutes les actions du parti lors de cette campagne de l’été et de l’automne 2021. Si Casablanca clôture ainsi une tournée quasi triomphale, elle constitue en revanche l’occasion pour le RNI de réaffirmer avec force sa volonté de mettre plus que jamais en œuvre l’ambitieux programme en 5 grands axes et 25 mesures concrètes qui les fondent. Elle devient la capitale où les dirigeants du RNI réitèrent avec solennité leur ambition de faire du changement leur marque. D’emblée, il convient de souligner que jamais parti politique au Maroc n’a élaboré et soumis un programme aussi chiffré au plus près, si exhaustif et si précis qu’il ne laisse rien au hasard. Autant que l’énumération des secteurs concernés, celle des chiffres donnent à vrai dire le tournis. Ils recouvrent un champ spectral avec des préoccupations qui relèvent de l’urgence – notamment dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 – et d’autres étalées sur le moyen et long termes.

Le montant global de 275 Milliards de dirhams couvrant le quinquennat 2021-2026 a été certes avancé, c’est le premier chiffre ! Mais il évoluera également avec le temps, les nouveaux contextes et autres besoins. Ce sera donc 55 milliards mobilisés chaque année d’ici 2026, en faveur :

1)- de la protection sociale ; 2)- de la Santé ; 3)-de l’Emploi ; 4)- de l’Education ; 5)- de l’Administration. Chacun de ces axes comporte aussi cinq grandes mesures qui sont détaillées. De prime abord, ces axes sont les reflets vivants des préoccupations des citoyens du Maroc et s’inscrivent dans ce que l’on pourrait appeler la grande Réforme de la société. Ils sont le résultat d’une politique d’écoute attentive qui a duré cinq ans maintenant et qui a concerné pas moins de 300.000 personnes, les responsables du RNI scrutant paroles, contributions sur les sites et les réseaux sociaux pour se forger une « doctrine » sur les doléances populaires…

Voici d’ailleurs une déclinaison des thématiques réalisée par le RNI :

La protection sociale
La protection sociale constitue l’un des piliers phares du programme du RNI, elle s’inscrit dans le droit fil du projet de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Dans le cheminement des propositions du parti, elle souligne la nécessité d’une assurance contre les risques de la vie avec une « la couverture maladie, les allocations familiales et un revenu de dignité pour les personnes âgées ». Elle concerne tous les Marocains. Le RNI en fait son credo, trace la route avec cette réserve que « le défi reste celui de la mise en œuvre, notamment la généralisation de l’assurance maladie. Il reste que le parti s’estime capable de réussir le pari de cette mise en œuvre.  « Fort de sa gestion des départements ministériels qui co-pilotent l’exécution de cette réforme (finances, commerce et industrie, agriculture et artisanat), le RNI dispose de la vision et des compétences pour la faire réussir ». Dans cet ordre d’idées, 5 propositions concrètes viennent soutenir ce programme : un minimum vieillesse ; la protection des travailleurs au sens large ; l’AMO pour tous ; un plan handicap  et un soutien pour les familles.

Le programme ainsi décliné mérite bien son intitulé pédagogique : Tu mérites mieux que ça !

Un revenu mensuel garanti de 1 000 dirhams pour les personnes âgées de 65 ans et plus, avec une assurance maladie sans cotisation pour les plus démunis.

La Santé
Le RNI qui n’a pas attendu l’arrivée de la pandémie de la Covid-19 avait déjà mis en place un dispositif de réflexion sur ce secteur.

Il propose de doubler le budget de la santé publique sur les 5 prochaines années et de renforcer les moyens matériels de la santé publique, augmenter les effectifs et améliorer la situation des médecins et de professionnels de santé, pour atteindre une couverture sanitaire équitable.

  • Renforcer les effectifs des personnels de santé en revalorisant leur rémunération et en améliorant leurs conditions de travail.
  • Mettre à niveau les CHU et en ouvrir quatre supplémentaires durant le mandat, dont un CHU accompagné d’une faculté euro-méditerranéenne de médecine.
  • Investir dans la télémédecine et renforcer les efforts de prévention (dépistage précoce, médecine de famille…)
  • Dès 2022, un transfert de 400 dirhams mensuels pour les personnes âgées de plus de 65 ans. Ce montant atteindra 1000 dirhams en 2026.
  • Le registre social unique permettra de cibler les personnes en situation de précarité, éligibles au minimum vieillesse. Sans attendre ce ciblage, nous le verserons à tous les anciens Ramedistes de plus de 65 ans.
  • Pour tous les bénéficiaires du minimum vieillesse, l’accès à l’assurance maladie obligatoire se fera gratuitement.

L’Emploi
Notre ambition est de bâtir les fondements d’une économie inclusive, en particulier par la préférence aux entreprises nationales et par des initiatives spécifiques pour reconnaître et encourager la contribution économique des femmes.

Pour atténuer l’impact de la crise, nous mettrons immédiatement en œuvre un plan de relance de l’activité, incluant notamment un grand programme de travaux publics. Cette réponse conjoncturelle sera accompagnée par une nouvelle génération de plans sectoriels dans l’agriculture, la pêche, l’industrie, le tourisme et l’artisanat.

Créer 1 million d’emplois directs pour relancer l’économie après la crise du Covid-19 . Lancer des programmes de petits et grands travaux publics pour les chômeurs, soutenir les projets des auto-entrepreneurs, et accélérer les plans sectoriels (agriculture, industrie, tourisme et artisanat).

Créer de nouvelles opportunités pour les jeunes et les femmes.

  • Financer les projets d’entrepreneuriat, associatifs, environnementaux, culturels et sportifs, par le programme “Al Forssa”.
  • Soutenir les entreprises et créer des emplois de qualité grâce à des plans sectoriels ambitieux dans l’agriculture, la pêche, l’industrie, le tourisme et l’artisanat.

L’Education
L’école publique demeure incapable de remplir son double rôle de transmission des savoirs et d’ascenseur social.
L’actuel système éducatif à deux vitesses implique une dévalorisation de la place de l’école publique : le déclassement social des enseignants en est un des symptômes, et les victimes innocentes de cette situation sont les enfants.

Une école publique de l’égalité des chances nécessite de renforcer la qualité de la formation des enseignants, et de revaloriser leurs salaires.
Réussir le pari d’une école de qualité repose aussi sur une ambition pédagogique renforcée, la généralisation effective du préscolaire, et de proposer à chaque enfant des conditions d’accueil favorables à l’apprentissage, de l’école primaire, notamment dans le monde rural, à l’université.

 Revaloriser le métier d’enseignant et améliorer leur formation, augmenter leurs salaires en début de carrière à 7 500 dirhams mensuels nets.

  • Augmenter le salaire des enseignants en début de carrière, et les accompagner durant tout leur parcours, en évaluant régulièrement leurs compétences.
  • Améliorer la formation initiale des enseignants, par le renforcement des structures existantes et par la création d’une Faculté de l’Éducation dédiée aux métiers de l’enseignement.
  • Développer une formation continue de qualité et un soutien pédagogique au profit du corps enseignant.

La Réforme de l’Administration
Le RNI entend s’attaquer au monstre de l’Administration avec une réforme profonde. C’est le 5ème pilier majeur de son programme.

L’amélioration des services publics, dit-il, nécessite de renforcer le contrôle de leur qualité et d’accroître la transparence de l’offre disponible et des modalités d’accès. « Nous systématiserons le contrôle des services publics par des instances dédiées, en particulier pour l’éducation et la santé, et renforcerons la transparence de l’administration et de l’aide sociale en accélérant la transition digitale.

Une plus grande facilité d’accès doit être assurée pour chaque citoyen. Nous garantirons l’accès universel aux services publics en créant un guichet unique qui accompagnera les familles dans leurs démarches administratives élémentaires. Nous étendrons cet effort de simplification administrative par la création d’un Fonds d’accompagnement de l’officialisation de Tamazight et d’un « Pass jeunes » pour la mobilité, la culture et le sport. »

Les 5 piliers du programme des Indépendants ont, quoiqu’on en dise, le grand mérite d’être chiffrés à la fois globalement et, quasiment en détails annuels. Avec cette indication, réitérée par son leader, Aziz Akhannouch que les autres secteurs d’activités ou priorités nationales ne sont pas oubliées. Il est évident que, dans ce contexte électoral, le RNI devance ses adversaires en présentant un cahier de charges complet. Les secteurs de l’Agriculture, du tourisme, de l’artisanat, de la pêche, de l’industrie, le chantier de la jeunesse, des nouvelles technologies sont d’autant plus pris en compte qu’ils ne constituent pas des zones éloignées ou écartées, ne serait-ce que parce, en tant que composante essentielle du gouvernement, le RNI y occupe depuis toujours alternativement ces portefeuilles.

Depuis 2016, date à laquelle Aziz Akhannouch a pris les rênes du RNI, un vent de renouveau ne cesse de souffler sur cette formation de plus de quarante-cinq ans d’âge, puisque les premiers fondements avaient été jetés en 1976 et que le tout premier Congrès avait été tenu à Casablanca en 1979. Un parti enraciné dans la réalité des citoyens, patriotique, force de proposition dont les ministres, tour à tour, ont assumé depuis des années des fonctions et rempli des missions qui vont de la Présidence du Conseil, au département des finances, la diplomatie en passant par le tourisme, l’agriculture, la pêche, l’éducation nationale et autres activités. Sur le fronton du parti sont inscrits, peut-on dire, les soucis quotidiens de citoyens qui deviennent en effet les priorités des priorités. On peut citer l’exemple de cette priorité des priorités qui est la lutte contre le chômage – aggravé par la pandémie du Covid-19 – chiffré à quelque 580.000 pertes d’emplois en 2020, serpent de mer de tous les gouvernements et auquel le RNI s’attaque frontalement avec des propositions audacieuses et, certainement, un soutien concret.

Près de 200 000 adhérents effectifs, et plus de 180.000 militants engagés dans le « challenge électoral », devenu un combat de tous les jours, le Rassemblement national des indépendants n’a pas seulement le poids et la force d’un parti leader. Il est historiquement implanté dans le champ politique, économique, social et culturel du pays avec ses valeurs nationales et patriotiques.

Le pari du RNI est, à coup sûr, de redonner à la politique ses lettres de noblesse, avec un nouveau langage franc et une adhésion participative aux citoyens. Plus de langue de bois, ni de compromissions. Du militantisme et de l’engagement de ses troupes il en fait la base de ses succès. Il est, c’est le moins que l’on puisse dire, sur la ligne de crête, à l’image de son leader, engagé comme un soldat, un baroudeur qui ne lâche pas prise…

 

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