Rabii Berady propose une analyse holistique de l’entreprenariat au Maroc

Au Maroc l’initiative startup nation est très engagé avec plusieurs réformes et programmes d’accompagnement, mais des lenteurs subsistent. Cependant, ces dernières années, l’esprit d’entreprise est placé au cœur des stratégies économiques et sociales du royaume, et sa promotion est désormais une nécessité fondamentale dans tous les segments de la vie politique.

Avec tous une panoplie de politique développée, « faudrait-il peut-être penser à démocratiser l’entrepreneuriat, vulgariser les notions y afférents et surtout intégrer cet axe, tôt, dans notre système éducatif, afin d’avoir une génération d’entrepreneur dans l’âme. »

Rabii Berady, Docteur en Management Stratégique apporte une analyse holistique de l’entreprenariat au Maroc. Berady a travaillé pendant plusieurs années dans des projets d‘accompagnement de grandes entreprises, PME et microentreprises, ainsi que dans des cabinets internationaux tels que le cabinet Deloitte & Touche, Mazars, Grant Thoronton…

Selon lui, plusieurs questions restent à être élucidées : considérons-nous l’entreprenariat comme une alternative pour une chasse de subventions et de fonds d’accompagnement pour réaliser un gain à court termes ? Les initiatives actuellement engagées par nos Etats sont-elles considérées comme une ruée aux trésors par nos entrepreneurs ?

Quelles sont les principales contraintes liées au développement de l’entreprenariat au Maroc ?

Malgré l’intérêt que présente l’entrepreneuriat pour notre pays ces dernières années, ils y en résident des obstacles qui entravent toute tentative entrepreneuriale dans ce sens ; en effet, une grande majorité de jeunes motivés par la création de leurs activités, se heurtent à un certain nombre d’obstacles les décourageant, voir les handicapant de transformer leurs idées et intentions de projets, en actions de créations effectives de projets sur le terrain.

Il est important de noter que les obstacles dont fait face les entrepreneurs, peuvent varier d’un cas à l’autre, mais s’articulent dans leurs majorité autours de contraintes inhérentes au projet lui-même, des contraintes de marché, des contraintes légales, des contraintes de moyens ou personnelles liées à l’engagements dans une dynamique entrepreneuriale, ou même, dernièrement, des contraintes liées au contexte Covid 19, ce qui pèse lourd sur l’entrepreneur « monsieur tout le monde ».

Il est très important, de souligner que l’entrepreneuriat, en même temps qu’elle représente un concept historique dans notre pays, reste très jeune et a besoin d’encore plus de structuration et de maturité, et ce, pour qu’elle puisse atteindre le même niveau de qualité que d’autres pays à l’instar du notre. Notre écosystème actuel, a besoin de mécanismes permettant de soulager les porteurs de projets lors du lancement, il a besoin d’outiller ces derniers par des solutions pour faciliter les démarches administratives ou même dans l’accomplissement de leurs idées de projets en termes de coaching ; certes, de plus en plus, plusieurs initiatives voient le jour, mais ces dernières restent timides par rapport à la forte dynamique dans laquelle s’est engagé notre pays.

Comment analysez-vous les défis de l’entrepreneuriat ?

Aussi surprenante que puisse sembler la question, et en dépit de la grande attention donnée lors de ces dernières années à l’entrepreneuriat au travers les différents systèmes dans notre société, il n’existe pas une approche simple, rapide et réussie à appliquer pour réussir un model avec un impact garanti.

Une partie du défi réside dans le fait que l’on ne sait pas encore quand l’apprentissage de

L’entrepreneuriat doit commencer, quelle est sa nature, ce qu’il doit enseigner et qui doit s’en charger !  Le résultat est qu’il n’y a pas de consensus clair sur la nature et les objectifs de l’apprentissage de l’entrepreneuriat dans notre pays, et ce, de par la timidité des recherches et l’absence de modèles et théories acceptées et partagées de l’apprentissage de l’entrepreneuriat pour nos « jeunes » ; faudrait-il peut-être penser à démocratiser l’entrepreneuriat, vulgariser les notions y afférents et surtout intégrer cet axe, tôt, dans notre système éducatif, afin d’avoir une génération d’entrepreneur dans l’âme.

Une autre partie du défi, réside à mon sens, sur le comment est présenté l’initiative entrepreneuriale dans notre pays, est ce qu’il s’agit là d’une alternative à l’échec de l’employabilité, ou le paradigme est beaucoup plus large et important qu’une approche quantitative à atteindre. Peut-être faudrait-il œuvrer pour un mindeset entrepreneuriale par excellence, où l’objectif est de monter une dynamique globale avec une stratégie d’un pays homogène visant le développement d’une économie forte sur l’ensembles des piliers le constituant.

Finalement, considérons-nous l’entreprenariat comme une alternative pour une chasse de subventions et de fonds d’accompagnement pour réaliser un gain à court termes, les initiatives actuellement engagées par nos Etats sont-elles considérées comme une ruée aux trésors par nos entrepreneurs, savons-nous les mettre sur la bonne voie pour que l’effort investie puisse aboutir. Peut-être faudrait-il configurer les mécanismes autrement et déployer les choses différemment, afin que d’une initiative à une autre, nous puissions capitaliser et construire une pyramide d’excellence, au lieu d’avoir des actions qui s’étendent sur la durée, pour n’aboutir qu’à une minorité ayant passé le cap, alors que nos convoitons une « startup nation »

Pour Morocco Tech, Morocco Now, Forsa… Quelles sont les opportunités offertes par ces programmes aux entrepreneurs ?

Ces dernières années, l’esprit d’entreprise est placé au cœur de l’actualité économique et sociale dans le monde entier, et sa promotion est désormais un vecteur fondamental dans toutes les politiques de développement économique.

Au Maroc, le rythme des réformes économiques et sociales s’est accéléré et des avancées majeures ont été réalisées au niveau de la stabilité économique et au niveau de l’ouverture du marché de l’emploi.

Ces programmes visent à accompagner les porteurs de projets dans tous les secteurs de l’économie ; ils visent ainsi à diminuer, voire éliminer, les difficultés d’accès des entrepreneurs aux sources de financement, et à venir à bout des contraintes qui freinent la réussite des petites entreprises.

Nous pourrions souligner les grands axes d’objectifs de ces initiatives, à savoir :

  • Aider les entrepreneurs dans la préparation des études de leurs projets et dans la conception de leurs plans d’affaire ;
  • Faciliter l’obtention de subvention ou crédits à des conditions avantageuses ;
  • Assurer l’accompagnement des entrepreneurs dans toutes les étapes du projet.

Il faut souligner qu’il est pratiquement indispensable de les connaître toutes, et de savoir quelle subvention convient-elle à son projet.

Est-ce que l’environnement juridique de certaines entreprises marocaines peut offrir des opportunités plus grandes ?

Personnellement, je considère que l’environnement juridique des entreprises Marocaines pourrait donner lieu à plusieurs chantiers dont l’objectif est de proposer des solutions qui pourraient augmenter les chances de l’écosystème entrepreneurial actuel de prospérer.

Le climat des affaires est une notion dont l’amélioration est un souci permanent, créer un climat des affaires propice à l’entrepreneuriat pourrait présenter une composante importante pour la compétitivité du Maroc à l’échelle africain et même mondial, ce sur quoi d’ailleurs œuvre les hautes instances de notre pays.

Au fils des années, le climat des affaires ne cesse de préoccuper de plus en plus les différents acteurs politiques et économiques vu le rôle que peut jouer l’entrepreneuriat en matière de création de richesses et d’emplois

La contribution des entreprises marocaines dépend, en grande partie, de la manière dont le gouvernement pourras façonner le climat juridico-économique par le biais de la protection des droits de propriété, de la fourniture d’infrastructures de qualité, des interventions adéquates sur les marché le marché financier.

Sur quels leviers ou stratégie s’appuyer pour développer l’entreprenariat ?

En vue d’améliorer la stratégie de développement, il est indispensable d’insister sur les points suivants :

  • La diffusion de la culture entrepreneuriale et de l’autonomie des entrepreneurs,
  • L’accompagnement des jeunes porteurs d’idées de projets,
  • La facilitation d’accès aux sources de financement, sur la base d’une étude très approfondie pour éviter l’assistanat pouvant handicaper le mindset entrepreneuriale, voir le tuer chez les porteurs de projets,
  • La facilitation d’accès au marché à travers l’octroi d’une partie de marchés publics aux jeunes entrepreneurs, cela nécessiterait, bien sûr, un travail de fond sur les mécanismes de référencement et toute la dynamique historique déjà existante,
  • La simplification des procédures administratives, et ce, pour aider les petites et les très petites entreprises à passer vers le secteur formel,
  • L’organisation des campagnes incitatives et encourageantes au niveau national sur l’entrepreneuriat,
  • L’organisation des journées régionales promouvant l’entrepreneuriat dans chaque territoire,

Quel est la place de la régionalisation dans le rôle que jouent les écosystèmes de l’entreprenariat dans le renforcement de l’employabilité dans les territoires ?

Le but initial de la régionalisation, comme nous le savons, est de favoriser un mode de développement local dans le but officiel de réduire les inégalités entre les régions et d’orienter la croissance économique locale ; ces grands axes ont été sélectionnés dans la priorité de la régionalisation, à savoir :

  • Favoriser l’emploi et accélérer le développement social,
  • Mettre en valeur le potentiel touristique des régions et encourager le développement des infrastructures touristiques,
  • Augmenter la production agricole et développer les entreprises agro-alimentaires locales,
  • Développer l’industrie régionale et les infrastructures industrielles,
  • Développer les infrastructures urbaines et protéger l’environnement,
  • Développer les infrastructures de transport des régions,

Le concept de l’entrepreneuriat est omniprésent dans ces priorités ; le but est de faire de la région un pôle dynamique et attractif, en sélectionnant les points forts de la structure productive locale (agro-alimentaire ; logistique ; textile, tourisme, industrie…) pour renforcer la volonté principale d’augmenter les capacités économiques des villes et favoriser la compétitivité des régions.

L’entrepreneuriat pourrait jouer un rôle indispensable pour le développement d’une économie locale, mettre sur pied un écosystème régional local entrepreneurial sur la base des besoins de chaque région / territoire, et qui sera le moteur économique des entreprises locales ne pourra qu’être bénéfique ; nous parlons de régionalisation, nous parlons d’autonomiser économiquement chaque région, comment cela pourrait-il se faire, si ce n’est que par le développer d’un écosystème entrepreneurial basé sur les richesses locales.

Propos recueillis par Mouhamet Ndiongue

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